Au fil des jours


par  J.-P. MON
Publication : novembre 1982
Mise en ligne : 9 janvier 2009

Pour les gouvernements de droite comme de gauche un seul mot d’ordre, la rigueur : en Norvège, le gouvernement conservateur présente un budget de rigueur (réduction des investissements publics et de ceux des communes, réduction des impôts sur les profits des entreprises, augmentation du prix de l’électricité, ...) ; au Danemark, il y a un peu plus d’un mois, le gouvernement social-démocrate démissionnait parce qu’il ne pouvait pas faire adopter par le parlement des mesures d’austérité économique et le gouvernement de coalition centre-droite qui lui succède s’empresse de présenter un autre plan d’austérité (économies draconiennes dans les dépenses de l’Etat, taxation des caisses de retraites, ...) ; en R.F.A., le nouveau gouvernement (chrétien-démocrate-libéral) décide la compression de certaines allocations sociales, le gel des augmentations de retraites et des salaires de la fonction publique  ; En France, en présentant le IXe plan, Rocard, avec la bénédiction de Mitterand, annonce une « rigueur confirmée » (il faut « renforcer l’indépendance de la France par une compétitivité nouvelle ») ; en Suède, le nouveau gouvernement (social-démocrate) dévalue de 16 %, prépare un budget très austère (freinage des dépenses de l’Etat et des communes pour limiter le déficit budgétaire, annonce une baisse inéluctable des revenus...) ; même au Japon (d’où, dit-on, viennent tous nos maux) la situation n’est guère brillante (croissance économique ralentie, aggravation du déficit budgétaire qui atteint 400 milliards de nos francs, soit 6% du PNB, stagnation de la demande intérieure, baisse des exportations, ....) ; en Angle terre, là c’est vraiment le délire au congrès des conservateurs (parti du Premier Ministre) on propose de «  dégraisser » les services publics, de privatiser l’éducation et la médecine, de réduire les dépenses publiques, de rétablir la peine de mort et les châtiments corporels, de renforcer la répression sous toutes ses formes...) .
Bref, on est partout dans la plus totale absurdité.

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C’est qu’en effet tout le monde veut être compétitif, et bien sûr, plus compétitif que le voisin afin de pouvoir exporter (« exporter ou mourir » disait déjà le ministre de l’Economie de Hitler). Pour cela, il faut faire serrer la ceinture à ses nationaux pour réduire les coûts de production ; il faut réduire l’inflation car cela entraîne la baisse des taux d’intérêts, donc favorise les investissements et donc les créations d’emplois. On peut aussi dévaluer pour vendre moins cher, etc...
La dévaluation, ça n’est pas du tout du goût des voisins.
C’est ainsi que le Danemark proteste violemment contre la dévaluation suédoise qualifiée par le ministre des Finances de déraisonnable, d’injustifiée et d’antisolidaire : « c’est le début d’une guerre commerciale entre les pays industrialisés, du genre de celle que nous avons connue au moment de la crise de 1930 où chaque pays croit pouvoir se débrouiller au détriment des autres ».
Du coup, le Danemark s’apprête lui aussi à dévaluer. Il n’y a pas de raison de s’arrêter en si bon chemin... A la longue la monnaie ne représentera plus rien.
Autre stupidité : investir pour créer des emplois. Tous les chefs d’entreprises investissent quand ceci leur permet de produire plus avec moins de main-d’oeuvre. La création d’emplois, c’est le cadet de leurs soucis... et comme les machines n’achètent pas ce qu’elles produisent, les producteurs ne peuvent plus vendre : c’est ça la véritable crise, et pas autre chose.

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Le comble, c’est quand on investit non seulement pour diminuer les emplois mais encore pour réduire les capacités de production.
C’est le cas de la sidérurgie.
Témoin les déclarations de M. Davignon, vice-président de la commission européenne chargée . des affaires industrielles  : La Communauté a mis en place depuis un an un nouveau code des aides très rigoureux ; les subventions publiques qui doivent d’ailleurs disparaître complètement en 1985, ne sont autorisées que si les modernisations qu’elles permettent s’accompagnent d’une réduction des capacités de production
Le taux d’utilisation des capacités de production dans la sidérurgie est de 62 % dans la CEE, de 60 % au Japon et de 40% aux Etats-Unis. Rappelons que dans la CEE, depuis la fin de 1978, 151 000 emplois ont été supprimés.

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En septembre, aux Etats-Unis, le chômage vient de dépasser le taux de 10,1% (près de 12 millions de chômeurs) ; ce taux est pour la première fois supérieur à celui de la crise de 1929.

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Ce rapide tour d’horizon nous montre que quelles que soient les politiques menées dans le monde, on ne sait plus que faire contre «  la crise ». Les économistes les plus lucides commencent à l’admettre. C’est ainsi que M. J. Steinberg, de Cambridge, écrivait dans le « Financial Times » du 7 septembre  : « Les gouvernements pendant les quinze années qui viennent vont faire des promesses qu’ils ne pourront tenir et en seront punis. Il est manifeste qu’aucun gouvernement, où que ce soit, n’a la moindre idée de ce qu’il faudrait faire pour sortir de l’actuel stagflation » (le mélange de stagnation et d’inflation).
Et si on faisait l’Economie Distributive ?


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