Au fil des jours


par  H. MULLER
Publication : février 1990
Mise en ligne : 2 avril 2009

La dérive du socialisme

Fermeture des entreprises non rentables, chômage, concurrence, vérité des prix, monopoles démantelés, vente de biens publics et généralisation de celle des terres et des immeubles, autogestion, actionnariat pour les travailleurs achetant leurs entreprises, système bancaire ouvert sur le monde extérieur avec accueil des capitaux étrangers, voilà pour la Pologne où l’on fait "appel à la population pour de nouveaux sacrifices". Déjà 900 % de hausse sur les prix restés à peu près stables depuis une trentaine d’années. De quoi dégoûter les Polonais de l’économie de marché, providence de leurs seuls commerçants. Au fil de 16 dévaluations successives, les épargnants ont perdu leur laine. La veille de chaque nouvelle hausse, les accapareurs vident les boutiques, créant des pénuries commodément imputées à l’ancienne gestion socialiste. Du moins l’Etat apuret-il ainsi peu à peu sa dette intérieure.
Economie de marché, de profits privatisés, de libre concurrence  ? ’On croit rêver. Jetés par dessus bord les fonds de consommation, un système de prix qui assurait leur stabilité, leur bas niveau pour les produits et services courants. Jetés pareillement aux orties le Plan, la globalisation des profits, leur centralisation par un unique investisseur rendu capable des plus étonnantes et gigantesques réalisations, en matière d’urbanisme, recherche, combinats, spatial, mise en valeur, irrigations , enseignement, sport, culture, défense. Révolues la sécurité de l’emploi et du revenu pour chacun, la gratuité des soins, de l’enseignement, bref tout ce qui faisait l’originalité des sociétés de l’Est aventurées aujourd’hui sur la voie périlleuse d’un ultralibéralisme.

Chine, 400 millions de tonnes de céréales

Presque un record "en attendant les 500 millions". Pourtant, un article de foi place les pays socialistes au trentesixième dessous en matière de production agricole. Qui croire ?

Week-end à Berlin

Un intéressant spectacle pour les Allemands de la RDA. De belles vitrines à regarder. Ils ont défilé devant les boutiques aussi inaccessibles à leurs désirs qu’elles le sont, partout ailleurs, aux familles des chômeurs, à la multitude des sans-le-sou. Du moins, l’énorme processsion des "Trabant" a-t-elle témoigné que la RDA ne comptait pas que des va-nu-pieds. Des carrosseries en platique, des moteurs deux-temps ? Disons du léger, de l’économique. N’avons-nous pas, sans complexe, roulé des années durant dans nos deuxchevaux presque aussi simplettes ?

Trop, c’est trop

La RFA veut bien accueillir un nombre limité de réfugiés bon teint arborant le label du dissident dûment catalogué, juste de quoi alimenter la propagande antisocialiste, à condition que leur présence ne menace ni le confort, ni le revenu des nantis du crû. Mais, trop, c’est trop. Le libéralisme n’a jamais été une institution d’entraide et les fonds de la Croix Rouge ont leurs limites. Les Etats-Unis n’ont-ils pas été les premiers à tirer la sonnette d’alarme en fermant leur territoire à l’accès des dissidents soviétiques.?
Un certain désenchantement se manifeste déjà parmi les flots des réfugiés et s’esquisse l’amorce d’un reflux. On va leur promettre une part de cette once de liberté qu’ils revendiquent, améliorer leur ravitaillement et ils finiront par réintégrer leur lieu d’origine après une escapade qui leur aura fait découvrir que la vie pouvait être à l’Ouest plus difficile, plus âpre pour les malchanceux.

Berlin, choc en retour

Marché noir, contrebande, trocs, trafics en tous genres, arnaque, la joie pour le commerce, la fête pour les antiquaires. Chassés de la RFA pour faire place aux réfugiés, les Turcs filent sur Strasbourg et Paris.
La perspective d’une réunification ? S’agissant d’une même ethnie, un acte politique peut toujours l’imposer au nom de la démocratie, de sa règle majoritaire. Ce ne serait jamais qu’une entorse de plus aux accords de Postdam déjà violés à maintes reprises par les alliés occidentaux (création de la RFA, réarmement allemand, non démantèlemet de l’industrie de la Ruhr, alliance atlantique et pacte de l’OTAN dirigés contre l’Union soviétique, ingérences multiples, politiques et audiovisuelles en matière de propagnade, réforme monétaire, etc..). Restent à régler le problème des écarts de prix, celui posé par les régimes sociaux. Mais les 14 millions d’Allemands concernés, embrigadés de gré ou de force au sein d’un Etat unifié fort de 80 millions des leurs, ne tarderont pas à s’adapter, bon gré mal gré, à leurs nouvelles conditions de vie, à l’instar de toutes les minorités tenues de se plier à la loi d’une majorité.

Et l’Europe ?

Celle de 1993 a déjà du plomb dans l’aile. Une grande Allemagne n’a que faire de la poussière de ses concurrents ouest-européens cherchant à lui tailler des plumes, et que l’on voit se déchirer à belles dents, sous le masque hypocrite d’une fausse solidarité. Son expansion économique est à l’Est et le basculement dans l’économie de marché, de l’Union soviétique et des démocraties populaires, lui en ouvre la voie royale et pacifique.
Plus de menace militaire, plus d’ennemi à l’Est ? L’anti-soviétisme, ciment de l’Europe des Douze, passé à la trappe ? L’Otan, la "force de dissuasion" reléguées aux vieilles lunes ? De telles perspectives, on le conçoit, n’emballent guère la nuée des affairistes orbitant autour des budgets de la Défense, ni les personnels employés dans ses industries ou siégeant dans ses innombrables bureaucraties.
Les lobbies s’activent. La propagande change de registre. II faudrait temporiser, préparer un point de chute pour cette Europe en voie de désagrégation, prête à tomber en quenouille, quasi-abandonnée par son principal partenaire. Mais tout va trop vite. A l’Est, tout le monde est pressé. On a brûlé les idoles, décapité le Pouvoir. Sur tous les fronts à la fois, l’incendie déferle et il est trop tard désormais pour allumer des contrefeux, pour enrayer une pareille chienlit. Les responsables ? Un chef d’orchestre ? Is fecit cui prodest.
Aujourd’hui, les Allemands ont un tiersmonde à leur porte ; d’immenses besoins à alimenter. Des débouchés pour un siècle. Reste à les solvabiliser, ce dont les systèmes monétaires et financiers englués dans les exigences du profit se sont toujours avéré incapables. Une lueur d’espoir en faveur d’un socialisme à monnaie de consommation.


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