L’inégalité devant l’impôt


par  Philippe
Publication : décembre 1987
Mise en ligne : 10 juillet 2009

LE système fiscal français est fondamentalement injuste. Il fait, en effet, bien davantage appel à l’impôt indirect qu’à l’imposition directe. C’est ainsi que la taxe à la consommation, la TVA (Taxe à la Valeur Ajoutée), contribue de 55 à 58 % aux recettes fiscales totales tandis que l’impôt sur le revenu n’en représente que 40 à 45 %. Ce qui constitue tout-à-fait l’inverse de pays aux économies comparables à la France, comme la GrandeBretagne ou l’Allemagne Fédérale.
En 1979, le Conseil des Impôts calculait qu’en moyenne chaque Français acquittait entre 9 et 10
de ses revenus en TVA et concluait que c’était un impôt injuste.
En effet, le travailleur qui ne gagne que 6 000 F par mois dépense la totalité de son salaire, en acquitte donc environ 10 % en TVA et n’épargne rien. A l’inverse, celui qui perçoit 30 000 F, va seulement consommer une partie de ses gains, acquittera la TVA uniquement sur cette somme et épargnera ou placera la part non consommée qui ne sera, par conséquent, pas soumise à l’impôt indirect. Les revenus modestes sont ainsi plus lourdement taxés par la TVA -que ceux qui ne sont pas entièrement consacrés à la consommation. La répartition de l’impôt indirect est injuste et les plans d’austérité économique successifs n’ont fait qu’accentuer cette injustice.
De son côté, l’impôt sur le revenu échappe totalement au contrôle des contribuables. La Direction Générale des Impôts (DGI) s’efforce de la banaliser et d’en rendre la perception "indolore". Grâce aux vieux clichés tenaces véhiculés notamment par les ouvrages scolaires de morale, puis d’instruction civique, le bon citoyen se fait un devoir d’acquitter son impôt sur le revenu, avec assiduité, afin de concourir au bien-être collectif. Encore bien des gens croient "dur comme fer" que, grâce à lui, de nouvelles écoles et de nouveaux hôpitaux seront construits ainsi que de nouvelles routes. Malheureusement, la réalité montre que, de plus en plus de classes sont supprimées par manque d’enseignants, que ce sont les cotisations à la Sécurité Sociale qui servent à financer les nouveaux hôpitaux et les usagers qui paient, par droits de péage interposés, les autoroutes tandis que le budget de la défense nationale s’enfle considérablement au fil des années.
En vérité, l’Etat traite ses administrés comme des moutons auxquels il est vraiment inutile de rendre des comptes. Et, bien sûr, ce sont les plus démunis qui sont les plus pénalisés. Les salariés, dont les revenus sont déjà déclarés par leurs employeurs, sont vérifiés, en moyenne, une fois tous les 2 ou 3 ans. Les déclarations des sociétés le sont, elles, une fois tous les 17 ans en moyenne, par contre. Le comble est atteint avec la suppression de l’impôt sur les grandes fortunes, qui avait débuté avec l’exonération des oeuvres d’art, objets de grande spéculation, alors que l’INSEE montre que 10 % des ménages français concentrent 55 à 60 % des fortunes et patrimoines alors que 50  % des ménages n’en possèdent ’que 3,5 à 4 %. Il faut également déplorer que l’avoir fiscal, qui avantage les gros actionnaires de sociétés existe toujours, malgré le scandale Chaban-Delmas (1). Enfin, l’exemption de la taxe foncière a été ramenée de 25 à 20 ans au détriment des petits propriétaires.
Il faut noter que l’administration fiscale fonctionne de plus en plus mal, surtout dans les grands centres de la DGI comme Paris, Marseille ou Lyon, à cause d’une sousadministration des besoins des administrés. Un recensement contradictoire entre syndicats et administration révélait, en 1982, que 15 000 agents supplémentaires auraient été nécessaires pour une meilleure administration fiscale, c’est-à-dire une bonne application et un contrôle efficace des lois fiscales. Avec ses 85 000 agents actuels, le fisc est incapable d’informer les administrés sur le système fiscal qu’il est chargé de faire respecter. Par contre, ce que la DGI semble vouloir plutôt favoriser, c’est de faire "casquer" le contribuable le plus en douceur possible par des versements échelonnés de l’impôt sur le revenu, avec les tiers provisionnels et, depuis une dizaine d’années, les prélèvements mensuels. Mais ce n’est là qu’une pastille amère sans aucune commune mesure avec une meilleure transparence fiscale et sociale que préconise le Syndicat National Unifié des Impôts (SNUI) en réclamant l’affichage en mairie des revenus de tous les administrés de la commune.

Philippe.

(1) Lorsqu’il était Premier Ministre, dans les années 70, et que le fisc lui remboursait de l’argent du fait de ses nombreuses participations financières, au lieu de percevoir son impôt sur le revenu !


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