Lettre aux Parlementaires haut-savoyards

Lettres ouvertes
par  J. HAMON
Publication : juillet 2003
Mise en ligne : 15 novembre 2006

Nous avons déjà traité le problème des retraites, et même beaucoup. Mais la façon dont le gouvernement a entrepris ses réformes a suscité tellement de réactions que nous y revenons pour publier deux “lettres ouvertes” à des parlementaires. La première s’adresse aux élus d’un département, la seconde à un député qui a réagi de façon quelque peu originale.

Le 30 mai 2003,

Messieurs,

La France doit résoudre rapidement quelques problèmes pour assurer l’avenir de ses résidents.

- Le plus important d’entre eux est la nécessité de réduire nos émissions de gaz à effet de serre à moins de 5% de leur présent niveau, avec abandon des énergies fossiles conventionnelles, et remplacement de la route par le rail, au sens large de ce terme ; rien n’est fait, et fort peu envisagé.

- L’impact social du vieillissement de la population vient ensuite, exigeant une révision complète de la politique de l’habitat et de celle des transports pour les rendre compatibles avec les personnes à mobilité réduite, et un vaste programme d’aides à domicile, de résidences décentes pour les GIC isolés, une reconsidération du rôle et de la rémunération des médecins de famille s’impose ; rien n’est fait, et fort peu envisagé, ou bien dans la mauvaise direction.

- L’inadéquation des établissements d’enseignement aux besoins prévisibles du pays est notable, l’ambition politique n’ayant pas les moyens de sa mise en œuvre ; les lycées professionnels refusent près de 80% des candidats issus de la 3ème générale ; les formations hospitalières sont en sous-effectifs dans presque tous les domaines ; le réseau de soins de proximité se réduit comme une peau de chagrin ; trouver du personnel infirmier pour des soins à domicile relève du miracle.

Résoudre les problèmes précités devrait créer des millions d’emplois, faisant disparaître le chômage. Dans ce contexte, le problème des retraites n’est nullement prioritaire.

Le projet sur la réforme des retraites que vous allez examiner, n’a ni base économique, ni base démographique, ni base sociale. La croissance nette (hors inflation) du PIB national est plus rapide que la croissance démographique. La France dispose ainsi chaque année de plus en plus de ressources nettes par résident. Qu’en fait elle ? C’est la question que vous devrez poser.

L’âge moyen de mise à la retraite, légal pour les fonctionnaires, de facto par suite de plans sociaux dans le secteur privé, est pratiquement le même, 57,5 années dans le public, 57,6 années dans le privé. L’amélioration du rendement de chaque travailleur, acquis dans le privé qui dégraisse en conséquence, et décidé dans le public, ne devant plus remplacer que la moitié des fonctionnaires partant à la retraite, va diminuer considérablement le nombre de cotisants aux caisses de retraite, et augmenter le nombre déjà notable des résidents à la recherche d’un emploi. Dans cette optique, il ne suffit pas d’accroître la durée des années de cotisations et leur montant, il faut supprimer le principe même d’un droit à la retraite. Le proposerez-vous ?

Si rien ne changeait, les fonctionnaires retraités n’auraient guère que 27,5 années à vivre, et les retraités du privé 25 années, tous nos présents retraités étant morts vers 2030. Où est le problème tant craint de 2040 ? L’espérance de vie s’accroît mais, pour un retraité, ce qui compte c’est l’espérance de vie en bonne santé, qui ne croît guère. Dans un cas que je connais bien, après des études universitaires variées, l’un des miens ne pourra faire valoir ses droits à la retraite qu’après 70 ans ; est-ce sérieux ? Souhaitez-vous une population de retraités grabataires ou, en réformant toujours à la baisse la Sécurité Sociale, organiserez-vous leur mort prématurée ?

L’économie nationale dépend pour une large part de la consommation des ménages devant gagner moins (accroissement des cotisations retraite, baisse des retraites) et s’efforcer de mettre quelques sous de côté pour parer au pire. Moins de consommation, moins de croissance. Est-ce votre objectif ?

Je viens de lire les propositions de modification des conditions de retraite des parlementaires français. Un petit effort supplémentaire ne serait-il pas nécessaire, pour vous conformer aux règles habituelles, sans années doubles, et sans cumul ?

L’école a failli. Nos résidents savent lire et écrire, pas toujours bien (pollués par une télévision dont le français laisse à désirer), et parfois fort mal. Malheureusement, presque tous savent compter, ce qui les amène à manifester contre le présent projet de réforme des retraites. Luc Ferry devrait ajuster les programmes scolaires pour que les futures générations ne sachent plus compter.

J’exagère à peine. Je ne doute ni de votre honnêteté, ni de votre dévouement à la République, mais seulement de votre capacité d’accès et d’exploitation d’analyses socio-économiques indépendantes.

Je lirai avec intérêt les comptes-rendus de vos interventions lors des débats parlementaires sur les retraites.

Bien cordialement, et bon courage.


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