Repensons nos revendications


par  P. BUGUET
Publication : octobre 1976
Mise en ligne : 11 mars 2008

A l’anxiété, à l’insécurité collective, des remèdes divers sont proposés. Groupements idéologiques, syndicats, partis, exaltent et cultivent leur clientèle :
- les premiers sur une société altruiste, idéalement évoluée,
- les seconds, sur le salariat à perpétuité par le plein emploi,
- les derniers sur l’amélioration des revenus par l’arrêt de l’inflation et, à la fois, du chômage, dans le cadre « Prix-Salaires-Profits »...
Certains, pleins de généreuses aspirations, demandent le sacrifice momentané de catégories sociales pour l’exemple, pour créer un état de fait et entraîner la collectivité vers les réformes fondamentales. C’est exaltant, le sacrifice, mais pas courant, et, en conséquence, il s’épuise vite, sa proposition reste aléatoire.
Ce qui est moins attrayant, mais qui est positif, parce qu’il correspond à une réalité économique, c’est : LA REVENDICATION DE REVENUS DISSOCIES D’UN TRAVAIL FOURNI.
Analysons le problème :
Nous voyons nos Gouvernants se muer en commis-voyageurs à l’exportation, se lancer à corps perdu dans les armements, les grands travaux  : activités productrices de biens non commerciables dans le pays, mais créant des revenus indispensables pour l’écoulement de la production utile qui, de plus en plus mécanisée, dispense de moins en moins de revenus pour son acquisition.
Ces mesures s’avérant insuffisantes face à l’évolution plus rapide encore des techniques productives, la Banque, pour sa part, développe le crédit qui, par son agio onéreux, accroît l’écart entre les salaires et les prix.
Malgré l’inflation aussi fluctuante qu’artificielle, l’abondance des biens subsiste, nous submerge.
Que se stoppe l’accentuation crédits-travaux non productifs et c’est le blocage des échanges, de l’économie elle- même.
Est-ce irrémédiable ?... Non !
Le suicide collectif ne s’accepte que sous l’emprise de nécessités implacables.
Est-ce le cas ?... Non plus !
Nous avons au contraire : abondance de biens et un équipement productif prometteur d’abondance plus grande encore. Il nous suffit de créer les revenus correspondant au volume de cette production pour la répartir.
Les mesures de survie du capitalisme, sous la pression de notre potentialité productive, sont quelque peu anarchiques ; l’adaptation est douloureuse, confuse.
La sauvegarde du profit passe par l’échange lucratif.
Au stade actuel de notre productivité, le passage à la consommation des biens produits ne peut plus être lucratif que par l’apport de revenus ne créant pas de biens destinés au marché ; c’est-à-dire de revenus restant disponibles pour l’écoulement de biens de consommation commercialisés.
Depuis nombre de décades nos gouvernements successifs, sous l’égide de la Banque, l’ont parfaitement compris :
Pour diminuer l’écart entre la valeur de la production offerte et le pouvoir d’achat qu’elle libère, ils se sont appliqués, soit à raréfier les produits destinés au marché (opération dénommée « Assainissement du marché  »...) - soit à créer des revenus d’appoint par : la production d’armements,
les exportations onéreuses, grands travaux, subvention aux investissements, à la construction, etc., pour fermer le cycle : production utile - consommation, libérateur du « profit-tabou ».
A ces revenus créés par une production inutile, ruineuse par son impact sur la dévaluation de la monnaie, annihilant sa capitalisation même, nos augures consentirent l’aide directe, mais parcimonieuse, à la consommation sous forme d’allocations et subventions sans contre-partie de travail - Retraites, prestations familiales, de logement, de chômage, aide à l’habitat, secours aux économiquement faibles, aux handicapés, ristourne aux rentiers, etc.
Ce principe de revenus sans contre-partie de travail fourni, adopté pour la pérennité du profit échangiste lui-même :
" démontre que la création de cette forme de revenus est une nécessité pour l’écoulement des biens produits  ;
" amorce le nouveau mode de répartition de ces revenus (leur distribution).
" implique que la création de ces revenus soit assurée et contrôlée par l’Etat en fonction du volume total de la production de biens et services réalisés.
Nous cheminons lentement vers une Economie Distributive, mais, si le chemin tracé est irréversible, n’appartient-il pas aux impatients dont nous faisons partie, de l’élargir, d’en faire une avenue directe, d’en supprimer les détours ? Car, le capitalisme ne s’y oriente qu’à son corps défendant ; ses managers font la rafle, ils plument hâtivement la collectivité au passage.
Par leurs privilèges du crédit, de battre monnaie, ils tiennent la consommation en laisse.
La résistance de la puissance financière chancelle ; le coup de pouce de la grande masse de la collectivité réduite à la portion congrue, malgré notre potentialité d’abondance, nous entraînerait à une « Economie des besoins », sans attendre la faillite totale du profit.
Le problème actuel est donc de faire face à la diminution des revenus dégagés par la production, par le développement des revenus sociaux.
Nos voisins d’outre-Atlantique, dont l’équipement productif plus automatisé dégage encore moins de revenus en regard de leur production, sont parvenus à ce stade critique :
Après le secours de chômage à 90% du salaire, pour tout chômeur ; la retraite calculée sur les dix années où le salaire était le plus élevé ; l’allocation a toute femme à l’âge de la retraite, n’ayant pas même participé à la production ; se profile pour les mois qui viennent : le salaire garanti à tout homme ou femme dans l’âge de la période active.
Ces réformes sociales sont inscrites dans l’évolution économique elle-même ; tant il est vrai qu’il ne nous appartient pas de faire longtemps échec aux techniques qui bousculent nos structures économico-sociales conçues au siècle dernier.
Pourquoi faire les sourds alors que la collectivité entière ne peut qu’y gagner sécurité et bien-être ?
Serons-nous longtemps à la remorque de nations fief du du capitalisme, nous qui prétendons être le berceau de l’émancipation sociale ?
Au socialisme idéaliste, au socialisme de voeux, doit succéder leur réalisation : LE SOCIALISME DISTRIBUTIF.

AVANÇONS-EN L’HEURE !


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