À travers la grande presse


Publication : 1er décembre 1935
Mise en ligne : 5 octobre 2006

Dans un seul numéro d’Excelsior

Une enquête sur la misère des étudiants :

Nous allons voir fonctionner le bureau.

Des étudiants s’approchent d’une chaise où une jeune fille leur tend des papiers. Ils remplissent un bulletin d’adhésion, et ceux qui ont besoin de travailler remplissent une fiche de travail. Les cas urgents sont examinés spécialement. La seule condition à remplir : être étudiant.

- Mais ceux qui ne peuvent plus être étudiants, qui ne peuvent plus payer leurs inscriptions ?

- Nous leur prêtons l’argent nécessaire.

- Vous leur trouvez des places ? - Quelquefois. La plupart du temps, il y a deux cents candidats pour une place [1].

« Voyez-vous, c’est la grave question : trouver du travail.

« Toutes ces demandes sont centralisées. Trop souvent, les propositions qu’on nous fait ne sont pas sérieuses. On vient nous demander des représentants pour placer des aspirateurs, des articles de Paris ; parfois, d’étranges compagnies d’assurances offrent des places, mais en demandant un cautionnement. Quelle ironie ! Il y a des inventeurs fous, comme cet inventeur d’une extravagante machine qui nous demande des expérimentateurs !

« Nous demandons qu’on nous aide. Nous cherchons des leçons, des secrétariats, des traductions, des préceptorats, des travaux de copies...

« Nous acceptons, nous sollicitons des dons, des vêtements, des livres, des repas... »

Une jeune fille entre. C’est la trésorière.

- Il y a X..., qui voudrait vous parler, dit-elle au jeune président Pierre Lavalle. Il dit que c’est très urgent...

Je me lève.

- Une question encore. Comment distinguez-vous ceux qui ont vraiment besoin de ceux qui veulent seulement augmenter leurs ressources ?

- C’est facile, répond avec une sorte d’amère philosophie le président. Un étudiant qui a vraiment besoin est prêt à faire n’importe quoi pour vivre.

N’importe quoi !...

Suivi du communiqué suivant :

CERCLES.

Après-demain samedi 23 novembre et le lendemain dimanche 24, le Cercle des gourmettes, ce vivant et intéressant groupement féminin, organise à Lyon un goûter Bacchus en l’honneur des vins de France.

Frontignan, muscat, malvoisie, les vins doux d’Anjou, Montbazillac, Graves et Sauternes sans parler des vins de Champagne, accompagneront toutes les plus délicates friandises.

Plus de trente membre du Cercle des gourmettes de Paris, dont Mme Etteinger est présidente, et Mme J.-C. Charpentier, feront le déplacement de Lyon pour retrouver leurs collègues lyonnaises.

Ces petites folles sont d’une inconscience, ma chère !

Enfin, les hauts faits italiens en Ethiopie :

Asmara, 20 novembre. D’après des dépêches officielles et semi-officielles reçues à Asmara, les Ethiopiens ont subi des pertes énormes lors du raid des vingt avions Caproni de bombardement sur les troupes concentrées dans la vallée du Mai Messie. C’est le coup le plus dévastateur qui leur ait été porté depuis le début de la campagne. Bien qu’il n’y ait pas eu de communiqué officiel sur le chiffre des pertes, on estime à 1.500 le nombre des tués et blessés. Les autorités se sont contentées de déclarer que les pertes ont été énormes et que le raid a produit un grand découragement. On croit même que cette défaite pourra faire changer le plan de l’offensive éthiopienne. Plusieurs milliers d’ennemis se préparaient, en effet, à déclencher une attaque contre les troupes italiennes, mais maintenant ils vont peut-être se trouver obligés d’adopter une attitude plus défensive. Les mitrailleuses tirèrent sans répit et le ronflement des moteurs amena immédiatement la déroute parmi les Ethiopiens. Les avions vinrent au milieu d’eux, déversèrent sur leurs rangs des bombes et des grenades et une grêle de balles. Les Ethiopiens avaient eu recours au camouflage pour cacher leur mouvement, mais la première attaque les délogea de leurs cachettes. Les avions semèrent la panique parmi les Abyssins, qui employèrent le canon contre avions, les mitrailleuses et les fusils contre cette attaque. Les aviateurs italiens rapportent qu’ils ont vu l’ennemi s’enfuir dans toutes les directions, tandis que des mulets et des chameaux étaient pris d’une terreur folle, à cause des explosions. Le lieutenant Octini vit une bombe éclater au milieu d’une centaine d’hommes, dont aucun ne se releva. « Si nous avions volé un peu plus bas, nous aurions pu décapiter nos ennemis avec nos avions. Il n’est pas douteux qu’ils se sont servis avec efficacité de leurs canons contre avions, mais ils ne purent échapper à notre averse de bombes et de grenades », nous dit le comte Ciano. « Tous les avions ont reçu des balles venant de toutes les directions. Une nappe de balles arrivait de la vallée elle-même, tandis qu’une autre arrivait en même temps des collines avoisinantes. » Le comte Ciano s’aperçut du danger et descendit plus bas, signalant aux autres avions de l’imiter. «  Notre expédition s’est très bien passée. Nous fûmes obligés de voler si bas que nous rasions véritablement le sol. »

Ça, au moins, c’est du beau sport ! Vive la civilisation occidentale !!!


[1Voir dans ce numéro notre article : « Les diplômes inutiles. »