OVNI soit... qui mal y pense

Soit dit en passant
par  G. LAFONT
Publication : février 1982
Mise en ligne : 22 décembre 2008

UN lecteur de « La Grande Relève », M. Clause, ayant pris connaissance d’un de mes récents articles dans lequel il est question des extra-terrestes, ces objets volants plus ou moins identifiés, et qui n’a pas pris la chose à la rigolade, m’écrit pour me révéler que les extra-terrestres, quoiqu’en pensent les incrédules, existent, et qu’eux seuls détiennent la solution de tous les problèmes posés par les foudroyants progrès des sciences et des techniques à notre monde en pleine mutation. Problèmes sur lesquels les grosses têtes qui nous gouvernent passent d’interminables nuits blanches.
J’avoue que pour n’en avoir jamais vu ni de près, ni de loin, sinon au cinéma, je n’y croyais guère jusqu’à ce jour, à ces êtres fabuleux dont tout le monde parle sans savoir, pas plus qu’à Croque-mitaine, au Père Noël, à la mère Michel, au serpent de mer, au monstre du Loch-Ness, et autres êtres imaginaires qui ont bercé nos rêves d’enfants.
A la réflexion, pourtant, quand on regarde le ciel nocturne - mais qui regarde le ciel aujourd’hui ? - avec ses milliards de milliards d’étoiles qui illuminent nos nuits, ses milliards de milliards de planètes faisant comme la nôtre leur éternelle ronde autour de leur soleil, on se demande si la vie n’existe pas ailleurs, dans l’un de ces mondes lointains qui gardent pour nous tout leur mystère.
Il est peu croyable, en effet, que la planète Terre soit la seule dans tout l’univers sur laquelle la vie est apparue un jour, et qu’il n’existe pas dans l’infini de l’espace d’autres planètes, à des milliards d’années lumière de la Tour Eiffel, habitées par des êtres vivants, apparus avant nous, plus intelligents peutêtre - même si ça vous défrise et que l’envie démange de venir voir ce qui se passe sur cette petite boule ronde qui les intrigue.
A cette pensée je me sentais tout disposé, si par hasard l’un d’entre eux venait atterrir chez moi dans mon jardin de banlieue, à le recevoir en ami et, histoire de faire connaissance, à déboucher la dernière bouteille de Château- Lafitte (exonérée de l’impôt sur la fortune) que je garde dans ma cave.
Restait qu’à savoir la gueule qu’ils ont, ces mecs, et s’il est possible de discuter avec eux. Eh bien, ça va peut-être vous épater, mais le Château-Lafitte n’y est pour rien, j’en ai rencontré un, d’extraterrestre, venu passer ses vacances sur notre terre dont il rêvait depuis longtemps et qui, après l’avoir visitée en faisant de l’auto- stop, attendait, place de la Concorde, la fusée aérospatiale qui devait le ramener sur sa planète d’origine, avec, dans ses bagages, de quoi épater les copains à son retour.
Plutôt sympa, ce garçon. Et bien qu’il s’exprime dans un mélange d’espéranto, de bas breton et de volapuk, on arrivait à se comprendre. Mais il était déçu.
- C’est à ne pas y croire, me dit-il. Vous avez d’admirables savants qui, grâce aux fantastiques progrès des sciences et des techniques, ont su réaliser ce miracle créer des machines capables de produire de mieux en mieux et de plus en plus, avec le minimum de main d’oeuvre, tout ce dont les hommes ont besoin pour vivre heureux. Mais vous avez, hélas, des politiciens attardés et des économistes poussiéreux qui, n’ayant rien compris, s’obstinent à vouloir réaliser cet autre miracle : résorber par tous les moyens, même aux frais du contribuable, une production devenue excédentaire parce qu’on n’arrive plus à la vendre, et à créer des emplois pour les travailleurs réduits au chômage par la machine.
- Tout d’abord, reprit l’extraterrestre, après un moment de silence, je croyais rêver. Mais j’ai vu par la suite, à travers les campagnes florissantes que je parcourais, des cultivateurs en colère barrer les carrefours et déverser sur les routes des tonnes de choux- fleurs, de betteraves ou de melons « excédentaires  » qui auraient pu sauver des milliers d’enfants sous- alimentés du Tiers-monde. Non, je ne rêvais pas. Mais je suis d’un naturel optimiste et j’ai assisté par la suite à deux manifestations de de genre qui m’ont donné de bonnes raisons d’espérer. La première, le jour où, visitant l’Algérie, alors Française, le Premier ministre de l’époque était reçu avec tous les honneurs dûs à son rang, sous un bombardement de tomates, bien entendu excédentaires, mais qui ne firent d’autre victime que lui-même. Et la seconde, le jour plus récent où Giscard, encore président de la République, mais pas pour longtemps, venu haranguer les normands à Valognes (Manche) recevait le même genre d’accueil, mais avec des pommes, cette fois.
C’est-il pas mieux, quand on veut se débarrasser des excédents, d’en faire profiter les amis ? On était sur la bonne voie. Ce problème réglé il ne restait plus que celui du chômage.
Hélas, c’était trop beau. Sous le nouveau septennat ce genre d’accueil semble abandonné.
Mais tous les espoirs sont encore permis.
Adieu. Je reviendrai.


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