La technologie n’est pas morte

Etranger
par  P. SIMON
Publication : juillet 1977
Mise en ligne : 17 avril 2008

LA technologie joue un rôle important dans la production puisqu’elle permet d’atteindre des rendements élevés. Grâce à elle, les biens sont produits en abondance, la pénurie disparaît, ou devrait disparaître si elle n’était pas entretenue artificiellement. Or, la technologie perd du terrain dans de nombreuses industries où les innovations véritables - au sens où la vapeur et l’acier furent des innovations véritables au dix-neuvième siècle - se font rares. Bon nombre des changements annoncés à grand renfort de publicité ne concernent en effet que des détails.
Pour cette raison, la production américaine, par exemple, croît moins vite actuellement qu’il y a vingt ans. Faut-il s’en inquiéter  ? Sans doute pas, car les usines ne tournent pas au maximum de leur capacité et, si on le voulait, on pourrait produire encore bien davantage qu’on ne le fait. Le déclin de l’innovation a plusieurs causes, parmi lesquelles on peut citer : la plus grande importance donnée au cadre de vie et à la qualité de la vie ; la résistance des syndicats au changement (par crainte du chômage) ; et l’importance croissante des services dans le produit national brut.
Malgré cela, une nouvelle révolution technologique se prépare et nous entrons dans l’ère de l’électronique.
Tout le monde a constaté la chute vertigineuse du prix des calculatrices de poche. Ce petit miracle est dû aux circuits intégrés que l’on sait désormais produire à bon compte. En effet, un circuit intégré contenant 15 000 transistors revient maintenant au fabricant à 50 cents, soit environ 2,50 francs, et se présente sous la forme d’une mince plaque carrée de quelques millimètres de côté. Ses applications sont très nombreuses (25 000 selon certains). Par exemple, il peut commander des machines, vous permettre d’allumer votre four à distance sur simple coup de téléphone, minimiser la consommation d’essence de votre voiture, débiter votre compte en banque et même jouer au poker ou aux échecs avec vous.
Grâce aux circuits intégrés, IBM a mis au point un téléphone qui prend les messages, communique des instructions, et classe des documents. Bientôt, on verra partout des terminaux d’ordinateur qui permettront, entre autres choses, d’accéder à des bibliothèques centrales d’information. On est en train d’apprendre à l’ordinateur comment reconnaître la parole humaine. Le dialogue n’en sera que plus facile. Au bureau, l’ordinateur hourra transmettre le courrier par câble, si on l’associe à une imprimante. On a déjà créé des centres de conférences où on échange, à distance, des points de vue avec plusieurs correspondants qui n’ont même plus, besoin de se déplacer.
Qui ne voit l’impact formidable que cette révolution va avoir, non pas dans le domaine du gadget de cuisine, mais dans le secteur tertiaire où de nombreux emplois de bureaux risquent fort de disparaître. Que faire d’une secrétaire et de plusieurs dactylos lorsqu’un ordinateur les remplace. parfois avantageusement ?
On peut prédire que les résistances,` bien compréhensibles, des syndicats à cette innovation seront considérables. Et pourtant, il ne s’agit que de libérer l’homme de tâches mécaniques ou répétitives et d’accroître ses possibilités d’action. Dans l’état actuel des systèmes économiques, les nations ne sont, pas prêtes à résoudre le problème. Elles n’y parviendront que lorsqu’elles auront renoncé à lier le salaire, ou droit de vivre à la possession d’un emploi devenu de plus en plus problématique. C’est-à-dire lorsqu’elles auront adopté l’économie distributive.