Réflexions sur la liberté


par  J. LEBLAN
Publication : juillet 1977
Mise en ligne : 17 avril 2008

On ne peut pratiquer la vertu sans un minimum de bien-être.
St Thomas d’Aquin

LORSQU’ON parle de liberté, on ne se préoccupe guère de la définir. Celle-ci est comprise souvent et surtout comme la faculté de pouvoir exprimer ses opinions dans tous les domaines sans risquer de subir des représailles quelconques, de pouvoir choisir au moyen d’élections des délégués, des représentants à tous les niveaux, de pouvoir faire grève éventuellement au cours de luttes revendicatives...
La liberté sous-entend que les besoins vitaux soient satisfaits, cela est évident et ne demande pas de commentaires.
Mais cette condition primordiale étant supposée réalisée, un autre aspect de la liberté, pourtant fondamental, est généralement laissé dans l’ombre. même par les grands syndicats qui réclament lamentablement la création d’emplois et par conséquent la « croissance » ou « expansion  » qui est un cancer qui empoisonne la Terre !!
Pourtant, LA LIBERTE, C’EST D’ABORD LES LOISIRS !!
C’est pendant les loisirs que l’on peut généralement CHOISIR des activités capables de favoriser au mieux l’épanouissement de notre personnalité. Mis à part une petite fraction d’emplois où le travail est une activité créatrice et agréable (art sincère, recherche scientifique, organisation...) ou une activité qui peut satisfaire des volontés de puissance (pouvoir des chefs), le travail salarié de routine, plus ou moins répétitif et monotone, ce travail là n’est pas autre chose que de l’esclavage, donc à l’opposé de la liberté.
...Avec les enfants et les jeunes (de 7 à 77 ans), pas de problème  : la société de surconsommation imposée n’a pas encore mutilé leur personnalité et ils sont généralement capables de se trouver eux-mêmes, LIBREMENT, des activités qui les prémunissent de l’ennui.
Cela ne manque pas : culture philosophique, scientifique, littéraire et artistique, diffusion d’idées favorisant la justice et le sauvetage de l’espèce humaine en péril, lecture de détente, sports divers et jeux, notamment le jeu d’échecs qui est un art et un sport cérébral, bricolage et jardinage, spectacles divers, etc., etc...
Remarquons en passant que même une vulgaire partie de belote demande plus d’initiative à l’individu que bien des emplois !
Mais il arrive que des années de travail obligatoire accumulées émoussent cette faculté de pouvoir se choisir soi-même des activités non-imposées et, lorsqu’on est arrivé à cette triste condition d’amoindrissement mental, alors les loisirs peuvent devenir de l’ennui.
Toute société devrait donner à chacun de ses membres la possibilité de construire son bonheur - la liberté des uns étant limitée par la liberté des autres - compte tenu des différences qui existent entre les personnalités.
Ce n’est pas le cas dans notre monde prétendu libre. en ce qui concerne ce qui nous prend l’essentiel du temps de notre vie : le TRAVAIL.
Si un salarié a fait des économies pour pouvoir partir avant l’âge fixé pour la retraite, l’inflation a grignoté son avoir en monnaie de singe et s’il se risque à cesser le travail, il ne bénéficie plus de la sécurité sociale à moins de verser une cotisation exorbitante. Ce serait trop simple et trop humain de pouvoir continuer à verser la même contribution.
Et pourquoi imposer le même âge pour la retraite à tout le monde ?
S’il y a des personnes valides qui désirent des prolongations pour gagner plus, eh bien ! cela ne devrait-il pas permettre à une minorité de sages de se libérer avant ?.. retraite au choix à partir de 50 ans...
Dans notre société de surconsommation imposée sans discernement à tout le monde, l’individu ne compte pas ; c’est un numéro matricule noyé dans la masse, c’est la loi du nombre, de la médiocrité conditionnée.
Métro-boulot-dodo... « liberté » d’entendre à longueur d’année des discours, politiques et syndicaux où l’on parle de tout sauf de l’essentiel et, après avoir été si merveilleusement informés, les moutons passent au vote dans une foire électorale où ils ont la consolante liberté de pouvoir crier « Vive Machin... à bas Truc »...
Pour avoir la liberté de penser, il faut en avoir le temps et la force.