Déjeuner gratuit et obligatoire


par  R. JACOBS
Publication : juillet 2007
Mise en ligne : 17 avril 2008

LE Ministère de la Qualité de la Vie (mais oui !) a décidé par l’intermédiaire de la télévision de nous apprendre à vivre... mieux. Et. il a commencé par le commencement de la journée : le petit déjeuner. Les Français ne savent pas déjeuner, c’est connu. Ils absorbent à la va-vite un liquide brûlant, parfois un sandwich, et les voilà parés pour la journée  ! Pas étonnant que nos rivaux anglais et allemands - pour ne parler que des européens - nous dament le pion sur le plan de la productivité. Le Français baîlle, le Français est victime du coup de barre de onze heures ! Etonnez- vous après cela que la balance des paiements soit déficitaire.
Donc la télévision nous enseigne ce que doit être un petit déjeuner véritablement reconstituant des gâteaux, des oeufs, voire de la viande, des tartines de beurre, confitures, fromage ou pâté. Bien entendu il faut se lever assez tôt pour préparer et déguster tranquillement ce vrai repas en famille.
Il n’y a qu’un seul ennui : ces messieurs ne nous disent pas comment des millions de Français réussiront à faire trois repas par jour alors qu’ils arrivent à peine à en payer deux ; et encore combien parmi eux se contentent à midi d’un repas sur le pouce avalé dans la poussière du chantier ou le vacarme d’une cantine ! On touche ici du doigt toute la duplicité de nos politiciens : de bonnes paroles tant que vous voudrez, mais quand il s’agit de passer aux actes, plus personne !
Eh bien, prenons-les au mot : c’est vrai que trop de travailleurs mangent mal, que trop d’entre eux partent au bureau ou à l’atelier le ventre creux. Or les fruits, les légumes, les céréales, la viande existent souvent en telle quantité qu’on cherché à l’écouler à l’étranger.
Tout beau, messieurs ! Je vous propose, moi, de les exporter A L’INTERIEUR  : que ce qui est produit par les Français serve d’abord à rassasier les Français. Puisqu’il est démontré par les sommités médicales que le déjeuner est indispensable à la santé de tous, rendons-le obligatoire  ; et comme tout ce qui est obligatoire doit être gratuit, instituons le déjeuner obligatoire et gratuit. Je gage que ni les salariés qui perdent leur emploi, ni lés vieux habitués à se serrer la ceinture ne se plaindront de cet accès de «  collectivisme » (comme dirait Chirac). Et les paysans auront enfin un débouché tout trouvé pour leurs excédents alimentaires. On pourra même acheter chez nos voisins espagnols et italiens. Car je vous le dis en confidence : vouloir vendre à l’étranger sans rien acheter, ce n’est pas seulement malhonnête, c’est tout simplement impossible.