Un grand vent du large
par
Publication : mai 1980
Mise en ligne : 30 septembre 2008
Nous en avions besoin depuis la tournure filandreuse prise par le débat
sur l’Egalité économique. Comme l’institution du profit
(loi de la jungle), est la nécessité structurelle du capitalisme,
l’égalité économique est la nécessité
structurelle de l’économie d’Abondance selon son concepteur Jacques
Duboin ; la remettre en cause est la ruine de la conception même
de l’Economie Distributive. Or c’est la remettre en cause que de proposer,
comme font certains physiocrates, la reconduction de la loi de la jungle
sous prétexte de tactique, par un éventail de revenus
d’émulation ou d’un « dynamisme possessif ». Restons
vigilants, car une fois les nouvelles couches de privilégiés
en selle, l’économie distributive retrouverait le visage de l’économie
du gain.
Un vent sain nous vient du Québec et de la forêt :
le fait que les auteurs cités soient étrangers à
nos thèses et que leurs observations soient faites en toute indépendance,
leur confère pleine valeur objective ; point n’est question d’exégèses
sophistico-physiocratiques, mais de réflexions sensées
exprimées clairement„ sans artifice de style, comme s’y
consacra sa vie durant Jacques Duboin.
Le premier en référence, le biologiste H. Laborit, déclare :
(1)« Les règles morales, les lois, le travail, la propriété
ne résultent que de l’inconscience de l’homme ayant abouti à
des structures économiques imparfaites, où les dominances
ont besoin de la police, de l’armée et de l’Etat pour se maintenir
en place. »
Non seulement il ne constate pas la loi naturelle du sentiment d’inégalité.
mais il démontre le besoin de coercition des hommes pour imposer
ladite loi naturelle... ». Dans le paragraphe suivant le savant
biologiste poursuit par un tracé de construction sociale :
« A partir du moment où l’évolution économique,
c’est-à-dire la façon dont la technique de l’homme, fruit
de son imagination et de son expérience, accumulée au
cours des générations, lui permet une utilisation extrêmement
efficace de la matière et de l’énergie, de telle façon
que les besoins fondamentaux de tous les hommes puissent être
assouvis, si la répartition en est correctement faite... tout
n’étant qu’apprentissage, il suffit donc d’apprendre autre chose.
» Répartition correcte et invitation à apprendre
autre chose se dressent à la fois contre la loi de la jungle
et son succédané le possessivisme, même loi naturelle,
chère au néo-physiocratisme.
Après les pertinentes observations du biologiste, vient la confortation
de l’ingénieur forestier Georges Plaisance. citée dans
l’article : « Forêt ma belle Amie » : (2)
« Il devient chaque jour plus évident :
- Que la dépersonnalisation est un des maux du siècle.
- Que notre économie productiviste conduit à un nouvel
esclavage,
- Qu’à la recherche croissante de l’avoir dans la société
de consommation, il faut substituer celle de l’épanouissement
de l’être. »
Substituer l’épanouissement de l’être à la recherchhe
de l’avoir est rationnel et social. Cela rejoint la proposition du Pr.
H. Laborit et nous éloigne nettement de la loi de la jungle dit
possessivisme accapareur.
Réjouissons-nous de cet apport extérieur. Il était
prévisible que, semant un grain de bon sens rationnel et sain,
nous en récoltions un produit de même aloi.
(1) « La Nouvelle Grille », Henri Laborit (Voir G.R. 776,
p. 8).
(2) « La Forêt Française », George Plaisance
(Voir G.R. 776, p. 3).