Au fil des jours

Chronique
par  J.-P. MON
Publication : octobre 2019
Mise en ligne : 20 janvier 2020

Les banques européennes font pleuvoir les annonces de suppressions d’emploi :

En avril dernier, la Société Générale avait annoncé la suppressions d’environ 1.600 emplois dans le monde, dont 750 en France. Elle vient de présenter un second plan de réduction de ses effectifs, au cours des deux ou trois ans à venir, en dévoilant un projet de restructuration qui entraînera la suppressions de 530 postes dans ses banques de détail en France, dont 170 dans son Siège, place de la Défense et 360 dans ses centres administratifs.

En Allemagne, la Deutsche Bank avait annoncé, en juillet dernier, « le plus grand plan de restructuration de son histoire » qui doit entraîner la suppression de 18.000 emplois , soit 20% de ses effectifs. Et comme sa fusion avec la banque du Commerce (Commerz Bank) a échoué, cette dernière est en crise et annonce la suppression de 2.300 emplois, soit une réduction de 10 % de ses effectifs.

En Grande-Bretagne, HSBC, le « géant bancaire », qui a supprimé presque 4.000 postes en août dernier, vient d’annoncer qu’il envi­sage de supprimer son réseau en France, connu sous le nom de Crédit Commercial de France (CCF). Tant pis pour les quelque 3.000 salariés qui travaillent dans ces 264 agences, ce qui compte c’est la rentabilité et HSBC France a enregistré une perte de 17 millions d’euros l’an dernier.

En Italie, la banque Unicredit pourrait, elle aussi, supprimer jusqu’à 10.000 emplois, là encore près de 10% de ses effectifs.

En Belgique, la bancassurance KCB annonce 1.400 suppressions d’emplois.

Or, bien que les intérêts restent bas, que la clientèle fréquente moins leurs agences, dont les métiers s’automatisent, et que les banques américaines de financement et d’investissement leur opposent une concurrence musclée, la plupart des banques européennes continuent pourtant à affi­cher de confortables bénéfices.

Alors pourquoi ces suppressions d’emploi ? Le directeur général délégué de la SG répond : « Depuis la fin du printemps nous avons compris que la Banque Centrale ne remonterait pas les taux d’intérêt fin 2019-début 2020 comme nous nous y attendions ».

Ces taux ne permettent pas aux banques, quand elles ouvrent des crédits aux ménages et aux entreprises, de dégager des marges aussi avantageuses que dans le passé.

Mais pourquoi les gouvernements laissent-ils à des banques privées le privilège d’ouvrir ces crédits afin d’en tirer des intérêts, pour elles et leurs actionnaires  ? N’est-ce pas à l’état de remplir ce rôle et dans l’intérêt de tous ?

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L’Argentine pose de gros problèmes au Fonds Monétaire International (FMI) : cela fait 21 fois que cette république l’appelle à l’aide pour faire face à sa dette qui devient “hors de contrôle”.

Le FMI avait fait confiance au Président Macri, élu en 2015, parce qu’il avait promis d’appliquer ses recettes libérales : supprimer le contrôle des capitaux, mettre fin aux subventions publiques pour l’eau, l’énergie et les transports (dans ce pays où le tiers de la popu­lation vit dans la pauvreté) et, pour faire face à son déficit, emprunter dorénavant sur les marchés internationaux afin de ne plus faire appel au FMI, qui lui a donc accordé en juin l’an dernier un crédit de 50 milliards de dollars, porté à 57 milliards trois mois plus tard.

L’Argentine a obéi en suivant ces directives dites du “consensus de Washington” …

Qui se sont révélées désastreuses, car les capi­taux, préférant se placer aux états-Unis, ont fui massivement l’Argentine.

Cet échec a entraîné au moins deux commentaires. Celui du directeur des études économiques de l’Ieseg School of Management : « Le FMI n’a toujours pas tiré les leçons d’autres épisodes du passé »… Et celui de Stéphane Lauer dans sa chronique économique du Monde (10/9/19) : « La foi que place le FMI dans le pouvoir régulateur des marchés n’a-t-elle pas tenu à nouveau plus de la religion que de la théorie économique ? »

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Cette même édition du quotidien Le Monde signalait un record historique : les entre­prises états-uniennes (dont Apple, qui détient pourtant la bagatelle de 200 milliards de dollars) ont émis en une seule semaine (la première de septembre) près de 74 milliards de dollars d’obligations. Et comme ce phénomène s’est propagé dans le monde entier, et sur toutes les classes de dettes, le montant de ce record a atteint 150 milliards de dollars. « Du jamais vu ! », commentait Philippe Escande, en rappelant que le stock de dette des entreprises états-uniennes a doublé depuis août 2008, dont la moitié sont estimées à peine plus fiables que les obligations à fort risques dénommés “junk bonds”. C’est donc encore une grosse bulle qui s’est formée. Et qui va éclater…