Le jeu des “pourquoi ?”


par  R. POQUET
Mise en ligne : 31 mai 2010

« À condition que les citoyens prennent leur place… » conclut Guy Evrard. Et les députés ? Quel rôle jouent-ils aujourd’hui au sein d’une Assemblée Nationale qui ne semble qu’entériner les décisions d’un Président en état permanent d’ébullition ?

Roland Poquet vous suggère, non sans humour, d’essayer de vous en faire une idée en leur posant quelques questions choisies :

Les soubresauts qui agitent nos économies occidentales font naître chez nos concitoyens de nombreuses interrogations, tant les données économiques, financières et sociales sont multiples, complexes et, il faut bien le dire, embrouillées.

Par bonheur, chacun d’entre nous peut demander audience à son député qui se fera un plaisir de répondre aux questions posées : éclairer ses électeurs fait partie de ses missions. Afin de le détendre à l’issue d’une lourde journée de travail, occupée à distribuer des tracts sur les marchés ou à inaugurer la foire aux artichauts d’un hameau de sa circonscription, vous pouvez lui présenter ces questions sous forme d’un jeu : le jeu des « Pourquoi ? ». Rien de plus simple : il suffit à votre député de répondre à dix questions que vous aurez soigneusement choisies parmi toutes celles que tout un chacun se pose quotidiennement. Ce sera pour lui un jeu d’enfant auquel il se pliera avec bonhomie.

•1. Pourquoi, dans une nation aussi riche que la nôtre, y a-t-il autant de pauvres ?

•2. Pourquoi ne pas reconnaître que les avancées technologiqes et la concurrence internationale pèsent sur l’emploi au point de rendre illusoire le retour au plein emploi ?

•3. Pourquoi nos économies savent-elles produire des biens en quantité quasi illimitée mais ne savent pas les distribuer, en dépit de la qualité des services créés à cet effet ?

•4. Pourquoi s’obstiner à multiplier les sessions de formation alors que les emplois correspondants sont déjà largement pourvus ?

•5. Pourquoi ne pas admettre qu’en raison de l’extension de la précarité et du chômage le travail humain ne sert déjà plus de support à la création de tous les revenus ?

•6. Pourquoi ne parle-t-on jamais de ces innombrables revenus distribués sans contrepartie d’un travail fourni et de l’incroyable bureaucratie qui en découle ?

•7. Pourquoi ne pas évoquer également, au-delà de ce gaspillage d’heures de bureau, la dépense considérable en énergies, matières premières et travail humain provoquée par la réduction des durées d’usage de la plupart des produits industriels ?

•8. Pourquoi, dès lors que l’emploi nécessaire à la formation des revenus se réduit, ou se précarise de plus en plus, ne pas mettre en place une politique d’attribution de revenus qui ne dépendraient pas uniquement des emplois existants ?

•9. Pourquoi, dans le même ordre d’idées, ne pas faire en sorte que les retraites bénéficient de l’apport d’une partie de la richesse nationale, ce qui éviterait d’augmenter les cotisations ouvrières et patronales ?

•10. Pourquoi, en conséquence, ne pas envisager de maintenir les retraites à 60 ans -ou moins si pénibilité - afin de faire entrer davantage de jeunes dans la sphère du travail ?

Ces questions une fois posées, regardez attentivement votre député :

• Ou bien sa dure journée de labeur lui a été fatale et il s’est endormi ; en ce cas, quittez-le sur la pointe des pieds, il ne saura jamais que vous ne voterez plus pour lui.

• Ou bien votre député n’a pris aucune note ; remerciez-le poliment de l’attention toute particulière qu’il a accordée à vos questions, mais ne lui dites pas que vous ne voterez plus pour lui, il ne comprendrait pas.

• Ou bien votre député, dans un accès de franchise, vous dira que s’il tenait de tels propos à l’Assemblée Nationale personne ne l’écouterait ; demandez-lui alors quelle utilité il y aurait à voter pour lui, puisqu’à l’évidence il n’a aucun pouvoir.

Moralité : évitez de jouer avec un député, il préfère répondre à des questions “sérieuses”…