Pour une adaptation de nos thèses

TRIBUNE LIBRE
par  L. GILOT
Publication : novembre 1985
Mise en ligne : 16 mars 2009

Lorsqu’on se penche sur l’oeuvre de Jacques DUBOIN, et qu’on connait les nombreux. efforts accomplis par lui, ses successeurs et ses adeptes, on peut s’étonner que des constatations et conclusions aussi lumineuses sur le système financier capitaliste, n’aient pas fait progresser davantage l’idée de la nécessité d’une économie distributive.
Plus de 50 ans après le début du combat pour les thèses abondancistes, peut-être est-il nécessaire d’actualiser notre propagande, de la rendre plus compréhensible, de mettre en place une sorte de marketing de l’économie distributive, car les leaders politiques ont eux- mêmes recours maintenant à des spécialistes de la communication.
Il faut tenir compte de la faculté de compréhension de lecteurs qui n’ont jamais entendu parler d’économie politique et des mécanismes du système bancaire et financier. Il faut être très clair et concis, être des vulgarisateurs pour rendre simple ce qui peut apparaitre compliqué. Les gens détestent qu’on bouscule profondément leurs habitudes, leurs conceptions de la vie, et ne s’adaptent qu’aux évolutions lentes et progressives. Faire bouger les mentalités est la chose la plus difficile.
Alors que faire ? Les textes les plus courts sont les meilleurs car ce qui est long et aride rebute les lecteurs, et a peu de chance de vaincre la paresse naturelle de beaucoup. Les données de l’actualité ajoutées aux nombreux ouvrages de Jacques DUBOIN et de ses disciples nous fournissent la matière pour établir un nouveau condensé de nos thèses.
Il est nécessaire bien sûr de rappeler d’abord les contradictions du système capitaliste, mais aussi du système socialiste totalitaire des pays de l’Est, pour bien nous démarquer de ceux-ci.
Ensuite nous devons affiner, perfectionner l’exposé des postulats de l’économie distributive afin de les rendre plus assimilables, plus crédibles pour les néophytes. Dire, par exemple, que le salariat sera aboli, qu’un revenu social sera versé à chacun, que tout individu sera tenu de participer à un service social ne peut donner qu’une vision déformée de ce que serait une économie distributive, en laissant craindre l’instauration d’une société communiste autoritaire, et le nivellement par le bas.
Nous savons bien nous, militants convaincus, que ce ne serait pas le cas, encore que les sociétés n’évoluent pas toujours dans le sens rêvé par les novateurs et les pionniers originels. Mais nous devons nous mettre à la place de ceux qui entendent parler d’économie distributive pour la 1ere fois.
Soyons donc réalistes et efficaces. Admettons que partant de la situation actuelle le salariat ne pourra être aboli rapidement, et qu’il sera donc maintenu jusqu’à ce que les esprits aient suffisamment évolué pour admettre sa disparition.
Justifions le principe d’un revenu social de base en rappelant que les progrès techniques éliminent et élimineront de plus en plus de travailleurs, et qu’il faut donc solvabiliser les consommateurs sans emploi, ni ressources, c’està-dire leur distribuer du pouvoir d’achat. Indiquons que le financement du revenu social ne peut se faire que dans une économie distributive utilisant une monnaie de consommation gagée sur la production et progressant avec celleci, alors que dans le système actuel il faut prendre aux uns pour donner aux autres. La crise est uniquement financière.
Evitons aussi de parler d’un service social pour tous qui est vite assimilé par nos détracteurs à une sorte de service militaire obligatoire. Parlons de partage du travail, de la diminution de la durée hebdomadaire, et de l’augmentation et de l’utilisation des loisirs. Le service social pourrait être préconisé au début pour les tâches rebutantes, dédaignées, qui pourraient être assumées par les jeunes ou des volontaires plus âgés dans une sorte de service civil. Ce serait là l’embryon du futur service social.
L’ignorance, même de leaders politiques, sur le fonctionnement des mécanismes bancaires et financiers étant effarante, il serait souhaitable de consacrer un chapitre sur ce sujet qui pourrait être un résumé des idées principales contenues dans les livres « Les yeux ouverts » ou « Pourquoi manquons-nous de crédits ? » de Jacques DUBOIN.
Car la méfiance la plus difficile à vaincre concerne la possibilité de verser des revenus sans les prélever sur d’autres, c’est-à-dire de financer l’économie distributive. Il faut donc expliquer très clairement la méthode qui serait utilisée.
Pour mettre au point ce condensé de nos thèses il serait souhaitable de former un comité ou une commission qui ferait la synthèse des divers apports et avis exprimés.

Et puis enfin, notre combat pour l’économie distributive devrait être inséparable de celui pour la paix et un désarmement général progressif. Car si l’on réduisait ou supprimait les productions d’armements, en plus du côté humain de la disparition des guerres et tueries collectives, nous provoquerions dans les divers pays des reconversions indispensables qui conduiraient inévitablement à l’économie distributive.
Sans une adaptation indispensable de nos thèses à l’actualité d’aujourd’hui, nous risquerions de continuer à être considérés comme d’aimables et sympathiques utopistes. Il est urgent d’y remédier.


RÉPONSE à L. GILOT

Nous nous sommes demandé, en lisant le papier de Léon Gilot, ce que ce camarade entend par une économie distributive qui n’abolirait pas le salariat ? Le fondement même de nos thèses consiste à faire comprendre que depuis que tant de machines travaillent à la place des hommes, c’est-àdire depuis que la production croît en même temps que le, chômage, les salaires ne peuvent plus distribuer le pouvoir d’achat nécessaire à écouler toute la production...! On ne peut plus mesurer le pouvoir d’achat par la durée du travail, sous peine d’une crise économique insurmontable, les robots n’achetant pas ce qu’ils fabriquent. Puisque la production augmente, grâce à eux, il faut que les revenus des hommes augmentent, alors que diminue leur temps de travail.
Cette rupture du lien entre revenus et durée du travail, n’est-ce pas justement l’abolition du salariat ? Cette transformation radicale de notre société, sous la pression des’ faits, nécessite une transformation tout aussi radicale de la monnaie, comme l’exprime L. Gilot, et nous sommes bien d’accord avec lui pour admettre que faire comprendre ceci n’est pas une tâche facile. Mais ce ne serait ni réaliste, ni efficace, de dire que le salariat peut ne pas être aboli. Il faut, au contraire, être très clair sur ce point.
Que ceux qui ne voient pas les réalités auxquelles notre époque est confrontée nous traitent d’aimables utopistes, qu’importe ? Mais, de grâce, ne nous dites pas qu’il est urgent de remédier au fait que nos thèses ne s’adaptent pas à l’actualité d’aujourd’hui !

M-L. D.


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