Une réforme fiscale qui s’impose
par
Publication : octobre 1980
Mise en ligne : 25 mars 2008
Confidences recueillies par Jacques VEAU (ex Bonhomme) Français Moyen et rapportées par E.R. BORREDON.
Revenons sur les anomalies (bien camouflées volontairement par
des textes d’application touffus et complexes à souhait) des
modalités d’assiette de l’I.R.P.P,
Et tout d’abord le calcul par part. Le calcul de base de l’impôt
est celui qui correspond à une part et aux tranches dit barème
correspondant aux fractions de revenus taxables aux taux progressifs
de 5 à 60 %.
La part concerne le contribuable célibataire sans charges qui
représente ainsi le contribuable. unité. Le montant de
son impôt s’élèvera par exemple en 1980, (salaires
de 1979) pour un salaire brut de 36 000 frs à 8,5 % de ce salaire,
pour un salaire brut de 60 000 frs à 14,7 % de ce salaire et
pour un salaire brut annuel de 100 000 frs à 20,7 % de ce salaire.
Alors que pour un ménage sans charges et dans les mêmes
conditions de salaire les pourcentages impôt-salaires bruts seront
respectivement de 2,8 %, 6,7 % et 12.2 %. Ces disparités constituent
indiscutablement pour les célibataires une véritable pénalisation
sociale de fait qui frappe essentiellement ceux qui débutent.
Vous me direz qu’ils n’ont qu’à se marier et procréer.
Bien sûr. Mais que devient alors la liberté de l’être
humain ? Quelle pérennité pourrait-on espérer d’un
foyer fondé dans de telles conditions
Mais il y a mieux en ce qui concerne ce calcul par part quand on considère
les avantages qu’il procure aux ménages ayant (les enfants à
charge. Comparons des ménages sans enfant (2 parts) aux ménages
ayant 2 enfants à charge (3 parts) et disposant de salaires bruts
annuels de 36 000, 60 000, 100 000 et 150 000 francs.
Les premiers auront à verser au percepteur respectivement 1018,
4 060, 12 205 et 26 398 frs d’impôt. L’ardoise fiscale des seconds
s’élèvera respectivement à néant 2 179,
7 789 et 18 308 frs. Autrement dit l’avantage d’avoir deux enfants à
charge par rapport à l’absence d’enfant procure aux intéressés
des abattements proportionnels à l’importance des salaires. Je
n’ai pas besoin d’en dire plus. Vous m’avez compris.
L’iniquité du système en vigueur est flagrante. Je le
reconnais bien volontiers. Mais nous avons voulu réduire par
cet artifice l’impact des taux élevés (40 à 60%)
appliqués aux gros revenus. C’est ainsi, par exemple, qu’un contribuable
disposant d’un salaire brut annuel de 600 000 frs, passible du taux
de 60 % pour la tranche supérieure imposable, ne payera, s’il
a cinq enfants à charge, que 31,5 % de son salaire brut. Alors,
par ailleurs, que les salariés de cette catégorie perçoivent
en général, en plus de leurs salaires officiels, des indemnités
de fonctions appréciables. Et le plus souvent ils jouissent en
outre d’avantages en nature divers (logement, voitures...).
Les constatations qui précèdent condamnent à elles
seules le système en vigueur. Elles justifient et imposent une
réforme radicale des modalités actuelles d’assiette de
l’I.R.P.P.
Deux modifications essentielles devraient en être à la
base, à savoir : d’une part l’abandon pur et simple du calcul
par part, d’autre part la reconnaissance de la situation et des charges
de famille par des abattements uniformes de l’impôt indépendants
du montant des revenus taxés. Le barème ne comporterait
plus que la seule colonne correspondant à une part. Quant aux
tranches, il conviendrait de les uniformiser, en relevant la tranche
de base au niveau du S.M.I.G. récemment porté à
3 000 frs mensuels et en égalisant à cette dernière
les tranches suivantes. ce qui supprimerait les tranches « bidon
» taxées à 5 et 10%.
Et les revenus autres que les salaires ? me direz-vous ; rassurez-vous.
Quelles que soient les modalités d’assiette et de taxation, leurs
bénéficiaires sauront toujours se débrouiller.
Ils en ont les moyens.