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Réflexion
par  J. MÉNOCHET
Mise en ligne : 14 janvier 2007

Le programme antilibéral, pour moi, est un catalogue de mesures provisoires, qui ne peuvent que colmater quelques brèches dans l’économie capitaliste cautionnée par les partis libéraux, sans oser encore poser de perspective à plus long terme.

Qu’est-ce que l’économie capitaliste ? — C’est l’organisation d’échanges marchands dont la finalité est de faire du profit.

Qui bénéficie des profits engendrés ? — Ce ne sont plus de simples patrons entrepreneurs, ce sont des actionnaires, car la mondialisation rend beaucoup trop élevés pour un individu ou une famille les investissements et les risques liés.

L’autre finalité de l’économie capitaliste, dans la même logique, c’est de supprimer des emplois. La création d’emplois n’a jamais été le but de l’économie capitaliste ; en développant les techniques et en remodelant constamment l’organisation du travail, elle est arrivée à un taux de productivité tel que la production de richesses de plus en plus nombreuses va de pair avec une compression de plus en plus grande du personnel et des coûts salariaux. Donc il est malhonnête de cautionner cette économie capitaliste tout en prétendant lutter contre le chômage, comme le font les gouvernements libéraux.

Le seul moyen de s’en sortir est de faire pression, sans doute progressivement, pour découpler le travail du revenu. Dans les pays développés, il y a un surplus de richesses produites par rapport aux besoins. Il ne tient qu’à une volonté politique de prendre le problème à bras le corps pour distribuer à tous les citoyens un revenu issu de la capacité de valeur d’échange de ces produits ; ce revenu permettra aux citoyens de se fournir en produits nécessaires. Le revenu décent deviendra la norme, et non pas un plan d’assistance à des gens qu’on marginalise en les montrant du doigt.

Mais pour cela il faut … introduire la démocratie dans l’économie, donc décider collectivement des productions utiles, relocaliser les unités de production, etc…

Les politiques dites libérales ne font qu’accompagner et cautionner les économies capitalistes. Or une politique vraiment antilibérale doit stopper ce mouvement de fond, qui n’est pas inéluctable. Il serait déjà indispensable d’encourager et de soutenir des expérimentations sociales, sans doute d’abord au niveau local, puis communal, et régional. Pour cela, il convient de donner un autre sens à la monnaie ; de créer des monnaies de substitution, comme le font des associations comme les SEL, mais aussi d’autres initiatives plus larges, comme en Argentine après l’effondrement de l’économie de ce pays. En effet, la monnaie actuelle trouve son fondement dans une création anticipée qui permet aux banques d’encaisser des intérêts, et, à plus grande échelle, à des boursicoteurs de spéculer.

Introduire la possibilité d’expérimentations pourrait rendre visible le caractère conservateur et libéral de plusieurs fondements de la société capitaliste, à savoir par exemple, le travail salarié pour chacun, et la famille. La famille, défendue par tous les politiques (voir les discours de Sarkozy et de Royal), a toujours été pour les gouvernements un moyen de réguler les conflits sociaux, en rappelant aux parents salariés que leur but ultime est la bonne conduite de leur vie familiale, c’est-à-dire leur devoir d’éducation, d’accompagnement de leurs enfants vers une formation et une profession, leur responsabilité face aux charges du foyer (payer les impôts, payer tous les crédits qu’on les a encouragés à contracter, etc…). Et pour l’économie capitaliste, la famille (“le ménage”, disent-ils, c’est-à-dire l’occupant ou les occupants d’un logement) a toujours été l’unité de consommation, visée par les publicitaires.

Or, cette organisation n’a rien de démocratique. Elle est liée à l’économie capitaliste. Dans les lieux d’expérimentation sociale que je prône (que j’appellerais volontiers des “collectifs de vie”), l’adhésion au projet serait le fait de chaque individu, et non pas d’une famille. D’où une autre organisation du logement, déjà. Actuellement, le “marché” du logement est florissant, et c’est le premier poste de dépenses dans les budgets des familles. On ne favorise pas d’autres formules, qui devraient être prises en compte et même soutenues par une société antilibérale : possibilité pour des collectifs d’individus (où la pluralité serait encouragée : hommes, femmes, enfants, mélange des âges, etc…) d’acquérir ou de louer des logements contigus, avec des pièces communes, pour un partage de tâches et de matériels (comme machines à laver, TV, ordinateurs, etc…), et pour des loisirs communs, (en particulier une pièce qui servirait aussi aux discussions sur l’organisation interne, etc…), un jardin commun à des fins de potager commun, etc…

Cette organisation permettrait d’envisager, déjà à ce niveau basique, une autre façon d’avoir recours, si besoin, au travail salarié : quelques-uns, par roulement, s’y “coltineraient” tant qu’il y aurait des postes.

À une échelle plus large, il serait indispensable de privilégier les Scop, et autres formules d’organisation du travail, d’appropriation par les travailleurs de leurs moyens de production et de gestion de la production et de la distribution.

Car, même dans le cas d’une généralisation de la distribution des revenus, il resterait un minimum de postes à pourvoir pour la production des biens. L’utilité de cette production devrait être discutée et décidée démocratiquement. On introduirait ainsi de la démocratie à tous les niveaux de la production.

De même les tâches qui incombent à toute société (entretien des routes, soins aux malades, etc…je fais vite, chacun peut en faire une liste) seraient discutées et partagées par roulement. Mais il resterait du temps à chacun, et à chaque collectif, pour organiser sa vie personnelle, la créativité, la vie culturelle, etc…


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