L’agriculture biologique (suite)

QUESTIONS AGRICOLES
par  J. MESTRALLET
Publication : février 1978
Mise en ligne : 23 mai 2008

 ARBORICULTURE ET VITICULTURE : PROBLÈMES ÉCONOMIQUES

Au sujet de l’arboriculture biologique, les opinions divergent. Les uns estiment ne pas pouvoir se passer totalement de la chimie, qu’ils limitent au minimum (cuivre, souffre, associés aux insecticides végétaux). Le cuivre à faibles doses aurait même une action, bénéfique ; il agirait en renforçant l’arbre (voir plus haut) et pas seulement comme anticryptogamique direct, comme poison. Le souffre aussi.

Nous pensons qu’il serait tout de même souhaitable de les faire absorber par voie organique. Y parviendra-t-on un jour ? Tel est le problème.

Certains aussi paraissent confirmer ce point de vue. Alwin Seifert mentionne le cas d’un verger anglais où l’on emploie les badigeonnages d’argile sur les arbres, l’herbe coupée au pied, avec un peu de fumier de volailles et de boue de ruisseau. Il cite également des expériences italiennes et la sienne propre.

Les constatations nous paraissent imposer les directives suivantes :

— s’efforcer malgré tout d’éliminer les pesticides ;

— protéger rigoureusement les oiseaux ;

— épandre régulièrement du compost (bien mûr dans ce cas) ;

— ne jamais planter un verger n’importe où, surtout dans un lieu mal exposé et humide, choisir de préférence une orientation Levant-Midi ;

— ne pas planter des variétés mal adaptées à la région et par là même trop fragiles ;

— éviter les plantations trop serrées et la monoculture.

Au lieu de sélectionner des variétés uniquement par la couleur et le calibre, il vaut mieux les choisir pour leur résistance aux parasites et aux maladies. Peut-être trouvera-t-on ensuite qu’elles sont particulièrement riches en vitamines et en oligo-éléments. Voilà encore une piste de recherches. On a déjà effectivement créé des variétés de pommes et de poires résistantes à la tavelure. Nous-mêmes avons commencé des expériences avec le compostage de végétaux divers (ronces, orties, prêles, « mauvaises herbes » en général). Attendons la suite. Il faudra plusieurs années.

D’après nos renseignements, la viticulture serait plus facile à mener, certains vignerons parvenant même à se passer de cuivre. Les cultures intercalaires de légumineuses semblent leur apporter une aide appréciable.

Nous pouvons affirmer, en tous cas, avoir rencontré des personnes qui ne supportent pas le vin du commerce. Or, les mêmes personnes boivent sans inconvénients des vins qui ne sont pas spécialement faits selon les normes de la viticulture biologique mais peu traités et provenant de raisins qui ne le sont pas davantage. Il suffit donc d’éviter les excès pour obtenir un vin de bonne qualité. Ceci dit, nous avons entendu plusieurs fois vanter la qualité des vins « biologiques » par des acheteurs.

Nous voulons bien proposer quelques mesures d’ensemble concernant le problème viticole du Midi, selon le vœu de Jean Mateu. L’adoption des méthodes biologiques résoudrait sans doute en partie le problème car le vin de qualité et le rendement sont incompatibles. Peut-on employer de telles méthodes avec les mélanges ? Nous ne pouvons répondre à la question. D’ailleurs, cela suffirait-il à assurer un écoulement régulier du vin ? Nous pencherions plus volontiers en faveur d’une reconversion dans le raisin de table et la production du jus.

Il faut savoir en effet que le raisin dépourvu de produits chimiques est un aliment de qualité exceptionnelle, un véritable aliment-remède capable de guérir le cancer si l’on en croit la doctoresse Johanna Brandt (« La cure de raisins », Ed. Dunant à Genève). Nous nous gardons d’affirmer qu’il s’agit d’un remède absolu, ce cas étant le seul que nous connaissions à côté d’autres guérisons par les aliments crus ou par le jeûne.

Mais les thérapeutiques officielles, que nous ne rejetons pas pour autant, peuvent-elles se vanter d’un haut pourcentage de réussite ? Les malades ont le droit de savoir et de choisir. Du reste, une telle alimentation peut fort bien accompagner une thérapeutique classique ou luis succéder. On est en droit de supposer qu’un aliment possédant un tel pouvoir curatif préviendra efficacement le mal par une consommation régulière.

Nous voyons une fois de plus le véritable attentat contre la santé humaine par l’agrochimie et par le profit ! Cela n’étonnera pas nos lecteurs. L’écoulement du raisin et du jus sera-t-il garanti dans notre beau régime ?

Rien n’est moins sûr. On risque de voir un jour ou l’autre les raisins, biologiques ou non, encombrer les décharges à l’issue d’une année favorable. Cela nous permet d’aborder le problème de fond.

 AGRICULTURE BIOLOGIQUE ET ÉCONOMIE

Trop d’agriculteurs biologiques et surtout de responsables des mouvements en faveur de l’agriculture biologique s’imaginent résoudre en même temps le problème économique. De deux choses l’une, ou bien l’agriculture biologique est capable de produire une nourriture à la fois abondante et de qualité ou non. Si elle en est capable, au bout de quelques années du moins, les problèmes d’excédents se poseront à nouveau. Et les rendements des meilleures exploitations le prouvent (la viticulture étant, nous l’avons vu, un cas à part, ainsi que l’arboriculture pour des raisons un peu différentes), pour les productions fondamentales.

Tant qu’il y aura dans notre pays des millions « d’économiquement faibles », les agriculteurs ne peuvent espérer une solution à leurs difficultés. Qu’ils réclament donc, avec nous, l’augmentation massive des plus bas revenus.

En attendant, l’agriculture biologique peut-être une solution sur le plan individuel. Nous ne saurions trop conseiller aux agriculteurs de se dépêcher car nous nous demandons comment ils vendront, dans quelques années, des produits bourrés de pesticides. Aux consommateurs de les épauler et d’exiger des garanties ! Il faudrait des conseillers agricoles plus nombreux pour que les agrobiologistes se sentent mieux soutenus. À nous de réclamer aussi l’enseignement officiel de l’agrobiologie dans les écoles.

Nous reviendrons, dans un prochain article sur les questions posées par une émission d’Anne Gaillard de « France-Inter ».


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