Les pierres du paléolithique ne barreront pas la route à Toyota.


Publication : janvier 1999
Mise en ligne : 2 avril 2006

La sauvegarde du patrimoine est-elle un service public ? A priori, oui. Quand des intérêts privés entrent en conflit avec cette sauvegarde, qui doit l’emporter ? La culture, d’intérêt public, ou le profit financier de sociétés privées ?

L’actualité récente nous offre l’exemple des sites historiques dont l’étude aurait pu retarder l’implantation de l’usine japonaise Toyota dans le Nord. Le quotidien Le Monde apportait l’information suivante, le 29 août dernier :

Fin août dernier, le préfet du Nord a décidé d’arrêter les fouilles archéologiques sur le site d’Onnaing où doit s’implanter l’usine Toyota.

La loi impose que des sondages et des fouilles soient entrepris avant toute construction d’envergure pour éviter que des trésors archéologiques ou historiques soient définitivement perdus. à On-naing, pour s’y conformer, mais de façon à faire le plus vite possible, des moyens exceptionnels (12 millions et 70 archéologues) y ont d’abord été consacrés. Les résultats ont été surprenants : non seulement ont été mis au jour 22 sites datant de l’âge du bronze, ce qui correspond à quinze siècles d’occupation continue, mais aussi on a découvert deux sites paléolithiques essentiels parce qu’ils touchent des époques, 100.000 et 35.000 ans avant J-C, qu’on ne pouvait étudier jusqu’alors que sur deux sites minuscules alors que ceux-ci s’étendent sur six hectares. Bref, des découvertes passionnantes...et impossibles à faire puisque le chantier de Toyota va détruire ces sites avant que les archéologues aient pu les étudier.

Apprenant cette décision, les archéologues ont eu beau protester, dans un communiqué, que « l’état viole sa propre législation [...]. Enjeu scientifique considérable, le chantier de Toyota illustre le mépris des pouvoirs publics pour la protection du patrimoine archéologique en France : pressions politiques, financement à la charge exclusive du contribuable, refus d’assumer la communication des découvertes vers le public, inadéquation entre le budget et les besoins réels...et finalement abandon pur et simple du patrimoine. » Puis, un expert indépendant ayant été désigné, le calme est revenu en attendant son rapport. L’expert, un universitaire bordelais, a constaté quand il est venu visiter les lieux, que les sondages avaient été rebouchés et qu’il ne pouvait donc pas examiner les stratigraphies signalées.

Il conclut pourtant « ...des indices peuvent justifier une fouille exhaustive nécessitant des travaux importants », ce que le préfet a interprété en mettant son veto à la poursuite des fouilles, et Toyota a pris possession des sites le 1er septembre.

L’animateur du collectif des archéologues scandalisés par cette décision, a proposé l’intégration de deux équipes de surveillance au chantier, comme cela se fait à Marseille et pour les travaux autoroutiers, en notant : « On nous fait valoir les 2.000 emplois de Toyota. Mais on oublie qu’il y a 2.000 archéologues en France. Nous nous trouvons devant une logique incohérente. C’est toute la politique de l’archéologie qui est remise en cause parce que nous nous trouvons devant un aménageur privé. Une façon de remettre en cause notre travail qui est insupportable. Nous allons tout faire pour fouiller ce site et mener une étude complète, qui peut apporter un progrès considérable.

C’est une affaire de science, pas une affaire de sous. »


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