ILS nous en sortent de bonnes. Qui ?.. Les journaux. Au lendemain du
second tour des élections cantonales « Le Matin »,
encore mal remis du choc, essayait de remonter le moral de ses lecteurs
en titrant le plus sérieusement du monde : « Le gouvernement
devra tirer les leçons du recul de la gauche ». Et pour
bien se faire comprendre le rédacteur de corvée précisait
: « Meilleure explication de la politique gouvernementale, recherche
d’un nouveau mode de scrutin à la proportionnelle, telles sont
les deux priorités qui s’imposent au pouvoir après le
second tour qui a confirmé le recul de la gauche. »
Parce que, selon « Le Matin » personne ne s’était
encore avisé, à l’Elysée, à Matignon ou
dans les bureaux de vote, que la grogne des patrons, la rogne des cultivateurs,
le ras-le-bol des sans-emploi, la hausse du coût de la vie, la
croissance du chômage, le déficit budgétaire, la
dégringolade du franc, et j’en passe, pouvaient expliquer cette
vague de mécontentement qui venait de mettre fin prématurément
à l’état de grâce. Et que toutes les explications
plus ou moins embarrassées, sinon contradictoires, de nos ministres,
pas plus qu’un nouveau mode de scrutin, pourraient y changer quelque
chose et redresser la situation.
Qu’alors y faire ? comme disait l’autre. (Qu’on me pardonne ce mauvais
calembour mais il est bien à sa place dans cette histoire de
fous). « Le Matin » le sait, ce qu’il faut faire. Et c’est
dans les pages suivantes qu’il précise sa pensée : «
La confirmation du recul de la gauche va contraindre les socialistes
à un examen de conscience serré pour trouver le deuxième
souffle. »
Trouver le deuxième souffle, moi je veux bien, mais « Le
Matin » devenu prudent, ne nous dit pas comment. Je vais vous
le dire pour lui. Parce que j’ai ma petite idée à moi.
Il est peut-être un peu tard pour en parler aujourd’hui, mais
comme il n’est jamais trop tard pour bien faire, parlons en.
En même temps que se jouaient les élections et le sort
de la majorité, ce même 21 mars, un match de rugby se déroulait
au Parc-des Princes où nos rugbymen qui, eux, avaient trouvé
le deuxième souffle, butaient l’Irlande par 22 points à
9. Pour obtenir ce résultat inespéré il avait suffi
aux sélectionneurs de l’équipe de France de faire appel
à quelques champions laissés longtemps sur la touche,
Serge Blanco, Patrick Mesny et Gabernet, qui marquèrent brillamment
plusieurs essais et remportèrent le match.
Alors, ma petite idée, la voici ce n’est pas uniquement au jeu
de rugby que l’on peut voir des champions mis sur la touche, le temps,
pour eux, de retrouver le deuxième souffle. On le volt aussi
en politique.
Je suis convaincu que si on le leur demandait gentiment et pour sauver
le pays une fois de plus, M. Raymond Barre ne refuserait pas aux sélectionneurs
de remplacer Pierre Mauroy, M. Jacques Chirac, Gaston Defferre ou un
autre, M. Jean Lecanuet n’importe qui, et M. Giscard d’Estaing, François
Mitterrand.
Mais le mieux, et toute réflexion faite - et tant pis si cela
les vexe - ce ne serait pas de changer les hommes politiques, mais de
changer le système, un système qui, avec ses lois nous
conduit à l’Apocalypse, et de remplacer l’Economie de Marché
par l’Economie Distributive.
Mais cette solution, si nos -lecteurs la connaissent déjà,
les lecteurs du « Matin » l’ignorent encore.
Le deuxième souffle
par
Publication : juillet 1982
Mise en ligne : 26 janvier 2009