Plus de frontières ???

Éditorial
par  M.-L. DUBOIN
Publication : juillet 2000
Mise en ligne : 29 mars 2009

Le grain de sable mis à Seattle dans les rouages de la libéralisation effrénée voulue au sein de l’OMC ne doit surtout pas faire illusion : la mise sous tutelle libérale de l’économie mondiale s’accélère, et, avec elle, la marchandisation du vivant, du patrimoine de l’humanité, la commercialisation des services publics rentables et la suppression des autres. Ceci s’effectue de deux façons parallèles, en douce mais en vitesse : d’une part à huis clos dans le cadre imposé de l’OMC, et d’autre part directement par ceux qui comptent en profiter et qui arrangent entre eux leurs affaires avec leur “modernité” pour prétexte. J. Auribault décrit plus loin le nouveau round à l’OMC [1] et J-P Mon a dénoncé les conséquences de la soumisssion des gouvernants au pouvoir financier en ce qui concerne les politiques de santé [2]. On pourrait de même montrer comment c’est l’étudiant qui est aujourd’hui transformé en client en commentant le premier “marché mondial de l’éducation” qui vient de se tenir à Vancouver : son objectif annoncé était « de favoriser le développement des transactions commerciales dans l’éducation ». Pourquoi cette marchandisation de la formation ? — Pour une seule raison, à savoir que le chiffre d’affaires de ce marché utilisant les nouvelles technologies s’annonce énorme, 90 milliards de dollars, son “retour sur investissement” étant prévu dans cinq ans.

Dans le système capitaliste, le débat sur la portée humaine de cette tranformation est exclus : à partir du moment où le marché a été « appréhendé de façon quasi industrielle par les Anglo-saxons », « nous sommes des truites d’eau douce face à des requins », selon les termes d’un directeur de grande école cité par Le Monde (26/05/00). Pour la culture, c’est fait, son marché est entre les mains de Big Brother depuis le 10 janvier [3]. Il restait un peu de formation, surtout au niveau supérieur, mais cela n’a pas duré. François Blamont, le directeur de l’Agence édufrance créée il y a deux ans par C. Allègre, a prévenu : « ses ennemis sont les profs qui estiment que l’enseignement doit être 100% public ». Le seul impératif est donc de ne pas « laisser passer le train » et de mettre le plus de savoir-faire “français” dans ce train en marche. Qu’importent uniformisation et marchandisation du savoir ! L’important est de piquer des parts “du marché mondial de l’étudiant mobile”, celui qui peut payer des frais de scolarité de 150.000 francs par an. Pour lui, plus de frontières !

Plus de frontières non plus pour l’argent sale et la spéculation financière, mais par contre, des frontières souvent mortelles (détroit de Gibraltar, Douvres, etc.) pour les pauvres du Sud ou de l’Est qui espérent trouver en occident les moyens de survivre un peu…


[1J. Bové et F.Dufour avaient annoncé en novembre dernier le lancement d’un observatoire de l’OMC destiné à exercer « un contrôle démocratique » sur cette organisation, un « Global Citizen’s Initiative », associant juristes, économistes et spécialistes de la finance pour surveiller ses travaux en matière agricole, sociale, environnementale et de consommation.

[2dans la chronique de la GR-ED N°1000, sous le titre “La santé n’est pas une marchandise”, il en montrait les conséquences dans deux pays choisis en exemples, la Hongrie et la France.

[3Voir notre éditorial de mars dernier, GR-ED N°997


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