À côté de la plaque !
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Mise en ligne : 9 mars 2007
Tous les candidats à la Présidentielle, sans exception, font des promesses comme si, étant élus, ils auraient le pouvoir de les réaliser. C’est totalement irréaliste, ils rêvent. Ils sont à “côté de la plaque”, selon une expression triviale qui décrit bien le drame de la situation.
Cela fait environ un quart de siècle qu’en entérinant les dérégulations financières et libéralisant la circulation des capitaux, les gouvernements ont renoncé à tout pouvoir sur l’essentiel, c’est-à-dire sur les grandes décisions économiques et les conditions sociales qui en découlent. Au point que tous leurs chiffrages et tous les plans sur la comète qu’ils présentent ne sont en fait que promesses de cautères sur jambes de bois.
Et on s’affaire, on discute, on s’invective, on se défie, exactement comme si on était dans une démocratie et que l’élu, aidé par le parti qui le soutient, allait pouvoir exercer le mandat que ses électeurs pensent lui confier !
Tout le monde participe à cette mascarade, comme des marionnettes qui n’ont pas conscience des ficelles qui les agitent.
Et pendant qu’encouragées par ceux qui les applaudissent, ces marionnettes continuent imperturbablement depuis des décennies, à dire leurs textes en brassant l’air, la situation réelle sur la planète continue à se détériorer, depuis des décennies aussi. Non seulement l’atmosphère s’empoisonne, la biodiversité est compromise et les ressources non renouvelables s’épuisent, mais la misère physique et morale des humains, même dans les pays réputés riches, prospères, civilisés et évolués, ne cesse de s’aggraver dramatiquement.
La bonne formule pour décrire cet aveuglement, « alors que la maison brûle, tout le monde regarde ailleurs », a été trouvée pour attirer l’attention sur le problème écologique, et elle a mené à une certaine prise de conscience en ce domaine. Mais au-delà de l’écologie, c’est au sort des humains, et à celui des générations futures qu’il faut l’utiliser, au lieu de parier sur la croissance pour tout brûler, encore plus vite !
Si les candidats qui ont des chances de l’emporter attirent les votes en pariant sur le travail (qui, selon Sarko va créer des richesses), sur l’entreprise (qui, selon Bayrou, est créatrice d’innovation, donc de richesses et pour tous aussi, bien sûr) et sur la croissance (dont les bénéfices, selon Ségo, seront mieux partagés), c’est parce que la population ne sait à peu près rien [*] du fonctionnement réel de l’économie et des marchés financiers. C’est cette ignorance qui permet à ceux qui en profitent de lui faire croire n’importe quoi. Et d’autant plus facilement que les manuels consacrés à la finance et à l’économie sont rédigés sans le moindre esprit critique : il est exposé à leurs lecteurs que « c’est comme ça », donc que « ça ne peut pas être autrement », que le marché et « la concurrence “libre et non faussée” sont la panacée. Vouloir envisager autre chose c’est, a priori, soit l’utopie, soit l’horreur.
Ainsi prévenu, le citoyen n’a plus aucune perspective. Il n’a qu’à se plier à ces contraintes. Sa seule liberté est de choisir, en toute démocratie, entre capitalisme et capitalisme, sans être en mesure d’entrevoir où mène l’accumulation débridée des capitaux qui ont pris le pouvoir.
[*] Menez votre propre enquête
Posez autour de vous quelques questions essentielles. En voici trois, par exemple, mais on peut en trouver bien d’autres :
— Quand vous déposez vos
économies sur votre compte en banque,
est-ce que cet argent
•a) est toujours à vous ?
•b) appartient désormais à la banque ?
— Quand une banque ouvre un
crédit à un de ses clients, est-ce que
•a) elle lui prête l’argent économisé par un autre de ses clients ?
•b) elle crée de la monnaie nouvelle ?
— Vous savez qu’au-dessus d’une
certaine somme la loi interdit de payer
“en liquide”. Mais savez-vous
si la monnaie légale, celle qui est
garantie par l’État, est constituée
•a) de tout ce qui sert à payer dans
l’unité monétaire en usage du pays
(c’est-à-dire pour la France, l’euro),
donc les pièces, les billets de banque,
les chèques, les cartes de paiement ?
•b) ou de seulement les pièces et les billets (soit environ 15 % des moyens de
paiement) dans l’unité monétaire du pays,
donc chèques et cartes de paiement exclus ?
Si votre interlocuteur, à au moins l’une de ces trois questions, choisit la réponse a) vous pouvez l’avertir que ses convictions sont mal fondées… et lui suggérer de s’informer sérieusement pour découvrir ensuite le rôle joué par les marchés dérivés et les fonds de pension, jusqu’à comprendre que ce ne sont plus les responsables politiques qui détiennent le vrai pouvoir, celui de prendre les grandes décisions qui engagent notre avenir à tous !