Tous les candidats à la Présidentielle, sans exception, font des promesses comme si, étant élus, ils auraient le pouvoir de les réaliser. C’est totalement irréaliste, ils rêvent. Ils sont à “côté de la plaque”, selon une expression triviale qui décrit bien le drame de la situation.
Cela fait environ un quart de siècle qu’en entérinant les dérégulations financières et libéralisant la circulation des capitaux, les gouvernements ont renoncé à tout pouvoir sur l’essentiel, c’est-à-dire sur les grandes décisions économiques et les conditions sociales qui en découlent. Au point que tous leurs chiffrages et tous les plans sur la comète qu’ils présentent ne sont en fait que promesses de cautères sur jambes de bois.
Et on s’affaire, on discute, on s’invective, on se défie, exactement comme si on était dans une démocratie et que l’élu, aidé par le parti qui le soutient, allait pouvoir exercer le mandat que ses électeurs pensent lui confier !
Tout le monde participe à cette mascarade, comme des marionnettes qui n’ont pas conscience des ficelles qui les agitent.
Et pendant qu’encouragées par ceux qui les applaudissent, ces marionnettes continuent imperturbablement depuis des décennies, à dire leurs textes en brassant l’air, la situation réelle sur la planète continue à se détériorer, depuis des décennies aussi. Non seulement l’atmosphère s’empoisonne, la biodiversité est compromise et les ressources non renouvelables s’épuisent, mais la misère physique et morale des humains, même dans les pays réputés riches, prospères, civilisés et évolués, ne cesse de s’aggraver dramatiquement.
La bonne formule pour décrire cet aveuglement, « alors que la maison brûle, tout le monde regarde ailleurs », a été trouvée pour attirer l’attention sur le problème écologique, et elle a mené à une certaine prise de conscience en ce domaine. Mais au-delà de l’écologie, c’est au sort des humains, et à celui des générations futures qu’il faut l’utiliser, au lieu de parier sur la croissance pour tout brûler, encore plus vite !
Si les candidats qui ont des chances de l’emporter attirent les votes en pariant sur le travail (qui, selon Sarko va créer des richesses), sur l’entreprise (qui, selon Bayrou, est créatrice d’innovation, donc de richesses et pour tous aussi, bien sûr) et sur la croissance (dont les bénéfices, selon Ségo, seront mieux partagés), c’est parce que la population ne sait à peu près rien [*] du fonctionnement réel de l’économie et des marchés financiers. C’est cette ignorance qui permet à ceux qui en profitent de lui faire croire n’importe quoi. Et d’autant plus facilement que les manuels consacrés à la finance et à l’économie sont rédigés sans le moindre esprit critique : il est exposé à leurs lecteurs que « c’est comme ça », donc que « ça ne peut pas être autrement », que le marché et « la concurrence “libre et non faussée” sont la panacée. Vouloir envisager autre chose c’est, a priori, soit l’utopie, soit l’horreur.
Ainsi prévenu, le citoyen n’a plus aucune perspective. Il n’a qu’à se plier à ces contraintes. Sa seule liberté est de choisir, en toute démocratie, entre capitalisme et capitalisme, sans être en mesure d’entrevoir où mène l’accumulation débridée des capitaux qui ont pris le pouvoir.

