À travers le monde


Publication : 1er décembre 1935
Mise en ligne : 5 octobre 2006

 ETATS-UNIS
(Suite et fin)

M. Thomas R. Amlie démontre dans la suite de son exposé qu’il est indéniable que la N.R.A. ait réussi à réduire la production et à maintenir les prix, et qu’elle a ainsi accru le chômage.

Passant en revue les différentes lois qui constituent le New Deal, il montre :

Que les caisses de secours ne sont qu’une mesure de charité capitaliste qui ne donne à l’ouvrier qu’une seule sécurité celle de la pauvreté ;

Que 3.000.000 de fermiers ont reçu 777.000.000 de dollars en 1934 pour soustraire à la production 18 millions d’hectares ;

Que toute l’amélioration commerciale depuis trois ans est due aux prêts gouvernementaux qui se sont élevés à 10.230 millions de dollars

Que les camps de travail où 600.000 jeunes gens reçoivent cinq dollars par mois ressemblent singulièrement aux camps hitlériens ;

Qu’alors que le gouvernement dépense 163.000.000 par mois pour les grands travaux, il pourrait, en ne dépensant que 63 millions, faire tourner par les chômeurs, et pour leurs propres besoins, les usines arrêtées ;

Que les salaires payés pour ces grands travaux sont inférieurs de 50 % aux salaires normaux.

Bref, que le gouvernement poursuit des plans sans un plan central, puisqu’au moment où il distribue des millions aux agriculteurs pour laisser en friche 18 millions d’hectares, il dépense 400 millions pour le barrage du Grand Coulee destiné à rendre 500.000 hectares propres à la culture.

Pourquoi dépenser des milliards pour donner des diplômes à des jeunes gens qui, sortis de l’école, ne trouveront aucun débouché ? Pourquoi donner une instruction professionnelle à des manuels que la machine remplace et dépossède de leur travail.

Rien, dit-il, ne peut être basé sur la rareté, but unique du plan Roosevelt.

Il montre alors l’énorme inégalité dans la distribution des richesses. En 1929, année de prospérité :

144.000 personnes avaient un revenu de 10 milliards, soit 70.000 dollars par tête ;

47.000.000 de personnes avaient le même revenu total de 10 milliards, soit 213 dollars par tête.

Enfin, situation sans issue même si toutes les usines remarchaient à plein du fait des progrès techniques, il resterait encore 8 à 10 millions de chômeurs !

Puis il signale la situation de 11 à 16.000.000 de jeunes auxquels la société actuelle déclare :

Le monde n’a pas besoin de vous.

Celle des fermiers dont les revenus par famille sont tombés de 1.022 dollars en 1925 à 244 dollars en 1932.

Et il déclare que les difficultés présentes sont dues à l’effondrement du système capitaliste.

En 1929, l’American Historical Association fit sur la crise une enquête qui dura 5 ans ; son rapport débute ainsi

« Il est certain qu’aux Etats-Unis, ainsi que dans les autres pays, le règne de l’individualisme et du laissez-faire en matière économique et en matière de gouvernement est terminé. Un nouvel âge commence, c’est le collectivisme. La période que nous vivons ne peut être comparée qu’à celle qu’a connu l’Europe il y a 150 ans quand au régime féodal a succédé le capitalisme. »

L’orateur montre ensuite la prodigieuse puissance de production des Etats-Unis qui dispose de 45 % de toutes les matières premières du monde, et il expose les résultats des travaux de Harold Loeb, dont nous avons parié précédemment et qui trouve que chaque famille américaine peut disposer d’un revenu d’environ 5.000 dollars.

Et il poursuit :

« Comment obtenir l’abondance ? Au fur et à mesure que la crise allait empirant, démontrant l’inefficacité du New Deal pour stabiliser le régime de la rareté, se faisaient jour dans la confusion des lignes générales du régime nouveau qui remplacera le régime capitaliste. »

200 trusts possèdent plus de 50 % de toute la richesse du pays ; leur capital est de 81.074 millions de dollars ; ils ont crû deux fois et demi plus vite que les 300.000 autres sociétés en 20 ans ; ce n’est plus qu’une question de temps pour qu’ils aient englobé toute la production du pays.

Et voici la conclusion de l’orateur :

« Eh bien ! en Amérique les exploitations sont restées individuelles jusqu’à ce que leur importance sociale ait obligé la nation à les exploiter elle-même.

« 1° Au début de l’indépendance du pays, la défense du territoire fut confiée à des bandes et à des mercenaires. Quand l’armée fut devenue forte, elle devint nationale ;

« 2° Les routes ont été primitivement confiées à des entreprises privées ; maintenant elles sont nationales ;

« 3° Le service des postes fut d’abord privé ; il est maintenant propriété nationale ;

« 4° L’éducation, le service des pompiers, service de l’eau, de la voierie, etc., furent d’abord entreprises privées. Elles sont devenues nationales.

Depuis six ans, l’industrie privée nous montre son incapacité de produire plus que la moitié de ce qu’elle pourrait produire.

Le bien-être de chaque citoyen de notre pays étant fonction de la production, le temps est venu maintenant d’appliquer la bonne vieille solution américaine : La production doit devenir une entreprise nationale.

 Méthodes de transitions

« Si la majorité de la population peut être convaincue de l’excellence de cette solution, il n’y a aucun doute :

Cette transition se fera pacifiquement.

« Avec une majorité aux deux assemblées, le premier pas consistera en l’amendement de la constitution, de façon à donner aux Assemblées plein pouvoir pour promulguer une législation nécessaire.

« Ensuite, sera créée, soit une « Société nationale », soit un « service central du plan » avec un pouvoir de contrôle sur toute l’industrie.

« Ainsi sera réalisée la production maxima, suivant un plan d’utilisation de toutes les ressources du pays. »

 Contrôle technique et non politique

« Il est évident que ce « Bureau central » ne se trouvera pas sous un contrôle politique.

Les congrès ne seront plus que des assemblées de représentants des consommateurs, à l’instar des actionnaires d’une société.

« Le contrôle de la production sera assuré par des personnalités, capables de gérer cette production, et entraînées à cela.

 Le besoin d’un nouveau parti se fait sentir

« Il est nécessaire qu’un nouveau parti inscrive à son programme ces solutions.

« Si la transition du régime de la rareté à celui de l’abondance s’effectue pacifiquement et légaIement, ce ne sera qu’après la conquête du pouvoir législatif et exécutif.

« Ce pouvoir politique ne sera pas conquis par un des vieux partis, et ne sera acquis qu’à la suite d’un mouvement de masse bâti sur l’enthousiasme, la conviction, et la volonté.

« Une récente expérience politique aux Etats-Unis a démontré que, grâce à la T.S.F. et à I’intérêt grandissant que suscitent les affaires nationales, les idées agissent vite.

« Le succès sera acquis plus rapidement grâce à un nouveau parti plus indépendant, plutôt que dans la pénétration dans un vieux parti.

« La population est propre à comprendre aujourd’hui les discussions nettes et franches sur les problèmes économiques.

« Le peuple se rend compte que notre système se désagrège, que quelque chose d’autre doit se substituer à lui ; et il demande un système qui offre une solution aux difficultés présentes.

« Le vieil ordre est en décadence, et doit être remplacé par un système économique neuf, qui substituera un plan au désordre, le service au profit, l’abondance à la misère. »

M. T. R. Amlie explique pour terminer que passant à l’action « l’American Commonwealth Political Federation » avait été créé à l’issue d’un congrès tenu à Chicago les 5 et 6 juillet 1935. Suivi par 250 personnes, représentant en majorité des organisations de travail, il s’était clos sur la motion suivante adoptée à l’unanimité :

« 1° Le vieil ordre des choses chancelle et doit faire place à un système économique remplaçant le chaos par un plan, le profit par le service, la misère par l’abondance

« 2° Les chefs des deux grands partis en présence, n’inspirent aucune confiance au peuple des Etats-Unis ;

« 3° L’union de toutes les forces travaillant à instaurer un système économique et politique démocratique, est urgente et nécessaire ;

« 4° Que toute action doit être basée sur la destruction du système du profit. »

Tout commentaire serait superflu.

Mais une question se pose pour nous : Quel est le parlementaire français qui aurait pu prononcer un tel discours ?

Aurait-il eu à changer ses conclusions ?

Ed. CHARPENTIER

 
DANEMARK

La lutte contre le chômage. — Parmi les grands travaux entrepris pour lutter contre le chômage, on prévoit la construction d’un canal de la Baltique à la mer du nord ; il rendrait presque inutile le canal de Kiel. Il partirait de la baie de Flensbourg et atteindrait la mer du Nord à Hoyer, n’ayant que 50 kilomètres de longueur, alors que le canal de Kiel a 90 kilomètres.

Et ceux qui vivent du canal de Kiel, que deviendront-ils ?


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