Arrivée en force du FMI en Europe
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Publication : juillet 2011
Mise en ligne : 5 janvier 2012
Après le Sud, voici venu le tour du Nord.
Depuis le début des années 1980, la politique imposée par le FMI et la Banque mondiale, celle dite des “ajustements structurels” a permis aux “investisseurs” d’exercer sur les pays du Sud une forme moderne de colonisation, réalisant ainsi un tour de force : s’approprier leurs richesses naturelles et les condamner en plus à leur verser des milliards et des milliards de dollars (les pouvoirs publics des pays du Sud ont dû verser, entre 1985 et 2010, 666 milliards de dollars de plus que les prêts qui leur ont été octroyés).
Le Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers-Monde (CADTM), en faisant appel à la compétence de juristes en Droit International, a très clairement expliqué le mécanisme de la Dette ; ce subtil mécanisme, qui permet aux très riches créanciers, c’est-à-dire aux grandes entreprises et autres promoteurs de la mondialisation libérale, de dominer les peuples, s’appuie en fait sur une dette soit “odieuse”, au sens juridique du terme, soit illégitime.
Pour trouver de nouvelles sources de gros profits, les institutions financières internationales (privées) ont développé d’autres moyens, tels que les marchés de produits dérivés, la titrisation des créances, les prêts à taux variables, etc. Les grandes banques, certaines qu’en cas de besoin les gouvernements voleraient à leur secours, en ont profité pour prendre beaucoup trop de risques. En conséquence, lorsqu’en juillet 2007 la bulle de l’immobilier a éclaté aux États-Unis, c’est tout le marché mondial du crédit qui est tombé en panne, entraînant partout une vaste récession, avec sa suite de faillites et de licenciements.
Au début de cette crise, les responsables politiques du Nord ont bien dénoncé à grands cris l’irresponsabilité des banques, certains sont même allés jusqu’à remettre en cause, à juste titre, la logique capitaliste ! Mais ce n’était que belles déclarations et “effets de manches” : les responsables des grandes banques sont toujours en place, aucune restriction à la spéculation n’a été seulement tentée, et la course folle au profit immédiat a repris de plus belle.
La réalité est que les gouvernements du G20, aux ordres de la finance mondiale, ont sauvé les grandes banques à l’aide de centaines de milliards de dollars et d’euros, qu’ils financent en appliquant aux pays du Nord, sous le terme d’austérité, l’équivalent des plans d’ajustement structurel exercés précédemment sur les seules populations du Sud.
Nous subissons donc, en Europe comme partout, la terrible généralisation d’une politique qui s’est pourtant déjà avérée désastreuse.
Ce sont ces choix politiques, imposés par le FMI et la Banque mondiale, qui sont très clairement expliqués par une douzaine d’auteurs, sous la direction de Damien Millet et Éric Toussaint, dans le dernier ouvrage en date publié par le CADTM : La dette ou la vie.
On y trouve une analyse très approfondie de la “politique du choc différé” expliquant l’histoire de la dette du Nord et du retour en force du FMI en Europe, et, plus en détails, l’évolution de la situation en Islande, en Grèce, en Irlande, en Pologne et en Europe de l’Est, et même la menace qui pèse sur la Belgique. Quelques “vérités qui dérangent” concernant la France, sont expliquées en se référant aux chiffres publiés par le ministère du Budget à propos de la dette de l’État : on découvre par exemple la façon dont la vérité du remboursement du capital est dissimulée dans la publication de la “charge de la dette”, il faut aller la chercher sous la rubrique “cadre budgétaire”, sous l’onglet “besoins et ressources de financement” du site internet de l’Agence France Trésor !!
Et cet excellent ouvrage va plus loin : il montre la possibilité de suspendre le paiement des dettes publiques sur une base légale, évoquant les textes juridiques appropriés.
On ne saurait trop recommander la lecture de La dette ou la vie, tant il est nécessaire de savoir décrypter la présentation de l’actualité telle qu’elle est faite par les grands médias à propos de l’évolution de la crise en Europe, et en particulier de la situation de la France. Or, en cette période préélectorale où nous sommes entrés, pendant laquelle de grands débats vont avoir lieu, et c’est une bonne chose, il importe, plus que jamais, de comprendre ce que cachent les beaux discours politiques sur l’endettement des États et sur la nécessité de comprimer leurs budgets sociaux.
Que les ressources de la planète imposent une certaine sobriété, surtout à ceux qui peuvent aujourd’hui dépenser sans compter, d’accord. Mais que la foule de ceux qui ne sont pour rien dans la crise financière se laissent imposer des sacrifices totalement injustifiés à seule fin d’enrichir encore plus les “créanciers” qui, de fait, font loi, non, pas d’accord.
Puisse ce choix judicieux de lecture éclairer vos vacances d’été !