France, ton économie se barre

Chronique de l’Elysée-Palace
par  E.R. BORREDON
Publication : décembre 1980
Mise en ligne : 8 octobre 2008

Confidences recueillies par Jacques VEAU (ex Bonhomme) Français Moyen et rapportées par E.R. BORREDON.

Mais y a-t-il encore une Economie ?
Quand une nation comme la nôtre demande au commerce des armes d’assurer l’équilibre financier de nos échanges internationaux et trouve un élément de satisfaction dans le fait qu’elle concurrence dans ce domaine les plus grandes puissances de notre temps, que penser d’une économie tributaire de ce triste privilège  ?
Peut-on encore, en l’occurence, se présenter comme un défenseur des Droits de l’Homme quand on favorise la destruction industrielle de l’Etre Humain ? Car les armes sont fabriquées pour tuer. Que devient le droit fondamental à la vie ?
En une autre matière, celle de la production agricole intérieure, est-il admissible de voir détruites ou jetées à la décharge et souvent spectaculairement comme cet été en Bretagne, des récoltes de légumes et de fruits, soi-disant excédentaires, dont tant de personnes manquent dans le monde et même chez nous ?
Est-ce cela, l’Economie ?
Dans les manuels de mon éminent Premier ministre, ces péripéties sont pudiquement ignorées. Il est beaucoup plus facile de raisonner en équilibres financiers dans un système de rareté et de profits et de préconiser pour résoudre le problème des échanges nationaux et internationaux une véritable foire d’empoigne camouflée sous le vocable de « libre concurrence  ».
Que devient la notion de liberté dans ce contexte ?
Liberté de détruire l’entreprise du voisin compatriote ou étranger, et de priver d’emploi ses salariés ! Liberté de pousser les producteurs de biens de consommation courante de base à détruire les fruits de leur activité !
Non, vraiment, depuis bientôt sept années que cela dure, il n’y a pas de quoi pavoiser.
Et la libre entreprise, si prônée par mon coadjuteur, que peut-elle dans ces conditions ?
Si on la conçoit comme application de la libre concurrence dans une société libérale avancée, elle pourrait se traduire par : « n’importe qui, n’importe où, n’importe quand, n’importe quoi et n’importe comment » !
Voyons, ce n’est pas sérieux.
Et il est bien évident qu’il n’est pas possible d’encourager et d’aider de telles pratiques autrement que par de beaux discours. Car elles ne peuvent que conduire à une désorganisation croissante des processus de production personnalisés et cela, au seul profit des grosses entreprises robotiques qui, non seulement, éliminent la maind’oeuvre humaine traditionnelle, mais détruisent en outre le véritable esprit artisanal d’entreprise qui a été pendant longtemps la manifestation- la plus enviée de l’Economie de notre pays.
Où en est-on maintenant ?
Un exemple, parmi d’autres, va vous le montrer. Dans fin département du Sud-Ouest, une menuiserie fondée il y a une cinquantaine d’années par le père est reprise en charge en 1975 par le fils qui exerce seul son activité dans un atelier spacieux, créé par ses soins, avec l’aide des machines et outils les plus perfectionnés dans le travail du bois - mais ce matériel ne se substitue en rien à l’initiative clé l’artisan qui continue à concevoir les formes et à les exprimer plus facilement et plus rapidement grâce à lui.
En un mot, le recours à la technicité n’affecte en rien la créativité qui demeure l’essentiel dans l’élaboration de la production constituée ainsi exclusivement par des articles d’une qualité que l’on ne peut trouver dans les grandes exploitations vouées au machinisme intégral. Mais, alors que l’importance des investissements immobilier et technique permettrait normalement à une dizaine de compagnons de travailler à plein temps, les contraintes financières résultant de l’application des lois sociales, certes justifiées en elles-mêmes, mais, en l’espèce, inadaptées, s’opposent irrémédiablement à un développement de cette entreprise qui serait bénéfique à tous égards.
Et c’est ainsi que des moyennes et petites entreprises de toute nature végètent, périclitent et disparaissent par milliers tous les ans dans notre pays alors qu’elles en représentent les valeurs les plus soi nés.
C’est en cela que le système est faussé et qu’une autre politique s’imposait depuis le début de mon septennat si l’on avait voulu réellement sauve garder l’essentiel des possibilités de redressement.
Et, en ce domaine, je ne peux qu’exprimer un sincère et profond « mea culpa, mea maxima culpa ». Aussi, j’envisage très sérieusement en ce qui me concerne, et pour faciliter votre bon choix, de ne pas me représenter à vos suffrages le 26 avril 1981.


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