La fricothérapie
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Publication : novembre 2004
Mise en ligne : 4 novembre 2006
Ne cherchez pas ce terme dans le dictionnaire : il n’y paraît pas. Du moins… pas encore, bien que ce néologisme colle parfaitement à notre actualité qui est conditionnée par un diktat financier aussi démentiel que suicidaire. Pas besoin d’être grand clerc pour comprendre que, sous cette loi d’airain l’humanité tourne le dos à “l’âge d’or” dont rêvaient nos ancêtres, persuadés qu’un progrès conscient et partagé permettrait d’y accéder.
Le social est dans le rouge !
Retraites, santé, sécu, éducation nationale, de dettes sociales en déficits, on ne cesse de nous rabâcher les formules de remèdes abracadabrantesques dont la plupart n’ont rien à voir avec le mal et n’en suppriment pas les causes. Des cautères sur jambe de bois. On dépense trop : « Serrons-nous la ceinture ! Ça ira mieux demain ! » Déclarations appuyées par des chiffres de pertes déclarées « abyssales », bien que mesurées en valeur reposant sur du vent, en monnaie créee ex nihilo, totalement déconnectée du monde réel et des besoins indispensables à tout un chacun. Mais « Qui n’a pas été payé ? Qui est le généreux mécène ? » Questions rarement posées. Comment des nations, des gouvernements, des peuples peuvent-ils se laisser berner par un canular aussi énorme que la rareté présumée d’une monnaie de plus en plus virtuelle, et qui est faite, en majeure partie, de chiffres et de signes inépuisables ?
Hier, avec la crise des années 30, c’était l’effondrement de Wall-Street. Alors il fallait jeter le lait aux égoûts et avoir une politique de “grands chantiers”. Au Brésil, le café servait de combustible pour alimenter les locomotives, et en France, on dénaturait le blé pour le rendre non-panifiable, pendant que des milliers de gens crevaient de faim. Partout, dans le monde, alors que surgissait cette damnée abondance de productions qui résulte des avancées du progrès technologique, mais qui tue les marges de bénéfice, la guerre économique conduisait au conflit armé mondial qui allait ramener pour quelques années, la bienfaisante rareté, synonyme de profits.
Aujourd’hui, des milliards de crève-la-faim constituent le Tiers et le Quart monde. En pleine moisson ! Le sort de l’Argentine devrait pourtant dessiller les yeux. Comment un pays évidemment capable de produire, en qualité comme en quantité, ce que sa population réclame, peut-il être submergé et dépouillé par un raz-de-marée de dettes virtuelles, réclamées par des marchands de chiffres-bidons mais producteurs d’intérêts qui se multiplient à l’infini ?
Mêmes causes, mêmes effets !
Comment ne pas rapprocher ce fait de la situation de dépendance dans laquelle se trouve un pays comme la France qui a abandonné aux banques privées son “droit régalien ” de battre monnaie ? Avec toutes les conséquences néfastes que cet abandon entraîne sur l’aggravation sans fin de la dette publique et sur la politique socioéconomique qui en découle. Pourtant, ce fait historique essentiel semble ne pas concerner le domaine politique.
À l’occasion de la commémoration du débarquement du 6 Juin 1944, a-t-on relié la dernière guerre à la situation économico-financière qui l’a impulsée ? Non ! Pas plus qu’on ne parle de nos jours de ces mêmes causes qui perpétuent le massacre sous une forme apparemment plus policée. Les effets parlent d’eux-mêmes. La révolution technologique sous-tend une révolution sociale équivalente, subordonnée à un changement des structures économiques et à la maîtrise d’une monnaie “génétiquement modifiée”. Ce n’est pas en occultant des mécanismes monétaires dévoyés que les politiques redoreront leur blason !
Un trait sur les dettes sociales : La guerre de 39-45 aurait coûté 45 milliards de francs de l’époque à ses protagonistes. Qui a payé pareille somme ? Pas les 60 millions de morts du conflit. Pas plus que les survivants. Cette dette fut tout simplement effacée. Qui empêche d’employer le même procédé pour les dettes antisociales ? Compte tenu de la courbe ascendante des besoins sociaux, de l’impossibilité structurelle de rembourser les producteurs de chiffres exponentiels déclarés “dette”, et de l’état réel de notre véritable richesse économique, il importe de tirer un trait sur ces sommes et de fabriquer une monnaie intérieure de consommation, indexée sur la production de biens socialement utiles, et de l’attribuer à chaque citoyen, en tant que revenu social inaliénable, et qui lui garantit son droit à la vie en toutes circonstances.
Quant aux réformes et remèdes prescrits actuellement, ils rejoindront la pharmacopée des placebos d’une “fricothérapie” diamétralement opposée à une solidarité universelle tant déclamée.