Les textes de la Convention

ACTUALITÉ : LE PROJET DE CONSTITUTION
par  G. RACHMUHL
Publication : février 2005
Mise en ligne : 4 novembre 2006

Lire le projet de traité constitutif, qui sera soumis à référendum, n’est déjà pas une tâche facile. Mais dans son préambule, il est dit que « la Charte sera interprétée par les juridictions de l’Union et des Etats-membres en prenant dûment en considération les explications établies sous l’autorité du præsidium de la Convention européenne ». Avant de répondre, il est donc essentiel de savoir où se trouvent ces explications de la Convention et ce qu’elles annoncent. Il n’est pas facile de les trouver sur internet (adresse peu évidente : http://www.europarl.eu.int/charter/pdf/04473_fr.pdf). GILBERT RACHMUHL a pourtant eu la curiosité et le courage d’en lire les 51 pages, ce qui lui a permis de découvrir que la plupart des explications du praesidium de la Convention giscardienne, qui a établi le projet, consistent à amoindrir les libertés annoncées. Voici ses commentaires, fondés sur des citations :

Quand on les cherche sur Internet, on est effrayé par la quantité de documents, protocoles et annexes au fameux projet de traité pour une constitution européenne. Ce qui explique qu’après avoir, si l’on est courageux, lu dans son entier le projet soumis à référendum, on ne prend pas connaissance des autres documents. Et c’est dommage, car ils ne peuvent que renforcer notre décision de dire NON. Les militants socialistes qui ont voté pour le OUI ont pu ainsi se laisser abuser par le discours des éléphants de ce parti qui se gobergeaient de toutes les avancées de la “charte des droits fondamentaux”. Mais cette charte, qui constitue la partie II du traité, appliquée à la lettre, n’est déjà pas à la hauteur, sur bien des points, de notre constitution actuelle (que ce soit celle de la Quatrième ou celle de la Cinquième République), même si elle peut apporter des bénéfices à certains pays qui ont des institutions plus autoritaires.

Ainsi sur des points philosophiquement importants comme la peine de mort. Elle est abolie selon la charte, oui, mais selon les explications « qui seront prises en considération », il est dit qu’on « peut prévoir la peine de mort pour des actes commis en temps de guerre ou de danger imminent de guerre ». Par exemple, pour les 17 états de l’Union qui ont approuvé la guerre en Irak, cette peine de mort est applicable depuis plus d’un an. De plus, puisque les guerres ne sont pas interdites, au contraire, par la Constitution, on peut toujours estimer qu’on est en danger imminent de guerre.

Considérons le droit à la liberté et à la sûreté. La charte dit que toute personne a droit à la liberté et à la sûreté, mais les explications giscardiennes préviennent qu’on peut priver de liberté ceux qui sont « susceptibles de propager une maladie contagieuse, un aliéné, un alcoolique, un toxicomane ou un vagabond, s’il s’agit de la détention régulière d’une personne pour l’empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire… »

S’agissant de la liberté de réunion pacifique et d’association à tous les niveaux, notamment dans les domaines politique, syndical et civique cette liberté est assortie de limites à ne pas dépasser, les « restrictions nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre, à la protection de la santé et de la morale… ». De quelle morale s’agit-il ? D’envoyer les CRS contre des grévistes ? Ce n’est pas dit, toutes les interprétations supplémentaires sont donc possibles.

Le droit à l’éducation comporte la faculté de suivre gratuitement l’enseignement obligatoire, mais selon les explications du præsidium cela « n’interdit pas que certaines formes spécifiques d’enseignement puissent être payantes, dès lors que l’État prend des mesures destinées à octroyer une compensation financière ». Rien n’empêche donc ni de rendre payantes les études au delà de l’enseignement obligatoire (16 ans actuellement), ni de rendre payant l’enseignement obligatoire dès que l’État décide de compenser financièrement. Adieu l’enseignement secondaire et supérieur gratuits, livrons-le au privé…. Quant au droit de négociations et d’actions collectives, il est certes reconnu dans la charte que les travailleurs et les employeurs ont le droit de « recourir, en cas de conflits d’intérêts, à des actions collectives pour la défense de leurs intérêts, y compris la grève ». Mais les explications de Giscard ajoutent que : « les modalités et limites des actions collectives, parmi lesquelles la grève, relèvent des législations et pratiques nationales, y compris la question de savoir si elles peuvent être menées de façon parallèle dans plusieurs états-membres ». L’Europe unie s’arrête donc, là, à l’entrée de l’entreprise.

On voit que certaines de ces explications conduisent à une perversion de l’esprit de la charte, tout ayant été prévu pour limiter sa portée éventuelle. Cette partie II de la Constitution projetée est faite pour mieux en digérer la partie III, qui est un véritable credo ultra-libéral. Avec toutes les restrictions apportées par les “explications” du præsidium, elle devient pour l’essentiel de la poudre aux yeux.


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