Pouvoir d’achat sans travail

Réponses aux objections :
par  R. THUILLIER
Publication : avril 1978
Mise en ligne : 1er septembre 2008

Dans un article de La Grande Relève de novembre 1977, j’avais indiqué, en note, qu’il existerait, en France, près de 3 000 moyens suivant lesquels, par le truchement de secours, prestations et allocations diverses, du pouvoir d’achat est d’ores et déjà distribue sans une contre-partie de travail.
Des lecteurs - pour appuyer leurs arguments en faveur de la conception de base de l’Economie Distributive, « les Revenus dissociés du Travail » - nous demandent de leur fournir quelques précisions à ce sujet.
Nous y consacrerons bien volontiers le présent article.

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NOUS rappellerons, tout d’abord, que Jacques Duboin, à plusieurs reprises, avait signalé que, tout comme les faillites sont la « soupape de sûreté » de l’économie marchande échangiste, les distributions gratuites de pouvoir d’achat sous quelque forme qu’elles s’effectuent, constituent une amorce d’Economie Distributive dans le cadre du régime capitaliste.
Disons tout de suite que, pour énumérer le détail de ces moyens - relevés dans d’innombrables documents officiels - plusieurs fascicules de La Grande Relève ne suffiraient pas.
Nous nous contenterons donc de citer les principaux.

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NOUS nous limiterons, bien sûr, à ceux qui restent honnêtes et non en marge des lois ; tels les vols, hold-up, prise d’otages et autres bonneteaux ; qui rapportent cependant des fortunes à ceux, de plus en plus nombreux, qui les pratiquent... sans travailler. Glissons sur les souteneurs, les maîtres-chanteurs, les faux-monnayeurs, les abus de biens sociaux, etc...
Nous exclurons aussi les gains excessifs des P.-D.G. et cadres supérieurs, certains honoraires, commissions et pots de vin, cachets d’artistes qui, bien que souvent abusifs, reposent tout de même sur un travail effectif.

ABORDONS, tout d’abord, les moyens légaux.
Personne n’ignore que le plus sûr procédé pour gagner de l’argent est de faire fructifier un capital, si petit soit-il, pour en tirer du profit. Il travaille donc pour vous surtout lorsqu’on profite d’une rente de situation.
Dans cette première catégorie nous rangeons les multiples spéculations de toutes sortes : immobilières surtout, foncières, commerciales, locations excessives.
Ajoutons-y les jeux de hasard divers : loto, tiercé, et même les jeux de cartes valorisés au coup, et ceux qui se pratiquent dans les casinos et les cercles, clandestins ou non.
N’oublions pas les héritages substantiels, les usufruits, les assurance vie à capital, les donations, etc...
Que tout ceci soit légal, nous ne le contestons pas. Il. n’empêche que cela fournit du pouvoir d’achat sans travailler.

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ABORDONS, à présent, les pensions et retraites. Certes, elles sont toutes plus ou moins basées sur des cotisations personnelles, obligatoires ou non. Mais les diverses bonifications qui s’y ajoutent fournissent aux retraités, pour le restant de leur vie, un pouvoir d’achat bien supérieur à la valeur, même indexée, de leurs cotisations. Les taux des nombreuses caisses de retraites sont différents ainsi que leurs coefficients de validations antérieures.
Il existe, d’ailleurs, des prestations gratuites : allocations vieillesse minima, retraite du combattant, pensions de veuves de guerre et descendants, d’invalidité ; aides aux handicapés ; capital décès, etc...
Il est même annoncé - cela se pratique déjà dans certains pays - l’institution d’un Revenu Familial minimum. Jacques Duboin n’aurait pas manqué d’y consacrer un article triomphant lui qui, si nos souvenirs sont exacts, en avait déjà publié un, il y a une vingtaine d’années, sur la mise en disponibilité d’officiers avec solde garantie pendant plusieurs années.
Et ceci nous amène aux allocations de chômage, partiel ou total. Le salaire garanti à 90% pendant un an est, certes, une conquête des travailleurs mais le tout constitue également pour le régime capitaliste une « soupape de sureté  » contre les agitations sociales.
Citons aussi les vacances payées, les congés légaux payés pour événements familiaux, éducation, les stages divers de formation rémunérés, les indemnités de licenciement, les primes diverses d’entrée en classe. de vacances. Pour les paysans et surtout pour les gros agriculteurs, il y a chaque année des allocations pour intempéries ; excédent ou manque de récoltes, arrachage d’arbres fruitiers ; primes diverses viennent compenses un travail effectif mais qui devient dans beaucoup de cas, un Revenu Garanti dissocié du labeur.

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PASSONS maintenant aux aides sociales et aux prestations de la Sécurité Sociale. Cette institution étant perpétuellement en déficit, même s’il est du à des gaspillages et à des imputations abusives. c’est l’Etat qui le comble. Nous sommes donc tous des assistés car ce qui nous est remboursé est hors de proportion avec nos cotisations.
Énumérer ces prestations serait presque impossible. Il faudrait se référer aux codes de la Sécurité Sociale et aux multiples règlements annexes ou circulaires qui les régissent. Si le coeur vous en dit !
Citons quand même en vrac, les prestations familiales, l’aide aux jeunes ménages. allocations de salaire unique de mère au foyer, de maternité, aux vieux travailleurs salariés (ou non), à l’enfance, aux aveugles et infirmes, grands et petits. Allocations militaires, de loyer ; les retraites pour accidents de travail (ou de circulation), les régimes spéciaux agricoles et de professions libérales, artisanaux, l’Assistance publique avec ses aides en nature. ses bons de pain, de soupe, de charbon, etc...
Terminons, car cette liste non exhaustive devient fastidieuse, par les Prix de Vertu, ceux des Académies diverses, et autres prix Cognac !
Précisons, toutefois. que tous ces multiples droits à percevoir du pouvoir d’achat sans fournir un travail, sont affectés de coefficient, d’indices de zones, de majorations et de minorations multiples, de cas d’espèces, de dérogations, etc...
Leur total, ainsi cumulé, atteindra bien les 3 000 moyens auxquels ils sont estimés.

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QUANT à nous, contentons-nous de conclure avec Jacques Duboin, qu’il s’agit bien là d’amorces d’une Economie Distributive. Ne serait-il pas plus simple de fournir à chaque citoyen un Revenu Social de base garanti, et de rendre gratuits tous les services sociaux ?
Et à ceux qui nous objectent que seul le travail peut et doit fournir du pouvoir d’achat - on l’enseigne encore à l’école  ! - que faut-il donc encore pour les convaincre ?


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