Hilarius, une fois de plus, urbi et orbite (céleste)
prouve ce qu’il peut ! Hilarius vient d’être mis à la retraite
par une Administration consciente de ce qu’il a suffisamment parcouru
ses couloirs, sans buts précis ou avouables ; d’autant qu’il
ne sait pas même faire du tricot derrière sa Japy, comme
ses consoeurs. Bref, retraité, Hilarius a droit à une
carte de « Retraité ».
Une carte qui, certes, ne donne droit à rien du tout, mais lui
permettrait de se faire reconnaître par les nombreux nouveaux
collègues qui l’ont remplacé (cinq gaillards). Son chef
bien aimé aurait pu la lui remettre au cours de l’hilarante cérémonie
des adieux, où chacun a pu librement exprimer le contraire de
ce qu’il pensait.
Ou, encore, ce petit bristol aurait pu être joint automatiquement
à l’envoi du titre de pension. Et que non ! Hilarius a donc rédigé
une demande en triple exemplaire dans laquelle " il sollicite la
délivrance de sa cartoline". La demande, parcourant 25 km
en 5 mois, est parvenue au Préfet départemental, lequel,
15 jours après, a demandé, par le canal de la Direction
Régionale, au Commissariat du lieu, de convoquer l’individu afin
de lui demander s’il gagnait de l’argent... après sa radiation
des cadres. C’est l’élégante formule pour « mise
à la retraite ».
Hilarius, bête mais discipliné, a fait le trajet (8 km),
a répondu " non, des clous " Réponse enregistrée
par P.-V. en 7 exemplaires et retournée au Préfet.
Avec la sagesse socratique qui l’a caractérisé, durant
cette période, Hilarius attend la suite dont il vous fera part.
Il espère apercevoir son petit bout de carton avant que ne se
réalise la vente du premier Concorde à une Compagnie étrangère.
(C’est pas demain la veille !).
Affaire palpitante qui n’apparaît stupide qu’aux primesautiers,
car Hilarius , avec elle, que l’Administration qui, verbalement, ne
cesse de simplifier ses formalités, concrètement fait
lé contraire, en contribuant heureusement à la lutte contre
le chômage. -Suivez la carte et comptez : un fonctionnaire pour
prendre la requête, un autre pour !’enregistrer (2), un chef pour
vérifier (3), un préposé pour acheminer vers le
Préfet (4), un pour enregistrer le courrier à l’arrivée
(5), un pour voir de quoi il retourne (6), un pour prendre l’initiative
d’envoi au Service (7), même mécanisme (10) à ce
stade pour expédier au Commissariat. D’où se déroule,
maintenant en sens inverse, la même marche serpentaire. Total
une vingtaine d’inactifs fonctionnaires utilisés, très
intelligemment pour accoucher, non plus d’une cocotte en papier, mais
d’un rectangle de carton !
Comment oser dire que l’Administration ne serait pas intelligente après
une démonstration aussi magistrale ? D’autant que l’opération
se répète des milliers de fois, multipliant les emplois
ainsi rendus indispensables.
Vive l’Administration française intelligente, purée !
L’administration est-elle intelligente ? - Oui !
par
Publication : janvier 1980
Mise en ligne : 17 septembre 2008