IL faut le reconnaître, la pollution existe
depuis bien longtemps, sans doute depuis que !a vie organisée
existe. Par ses activités quotidiennes naturelles l’homme rejette
des produits ou sousproduits, déchets alimentaires, ou autres.
Il en est de même des animaux. Mais on peut penser que le système
écologique s’en accommode plus ou moins. Les poissons, par exemple,
vivent dans un milieu qui leur est encore plus ou moins propre (sans
mauvais jeu de mots) et subsistent. Le mal est venu de l’accroissement
fantastique de la population humaine et animale (par l’intermédiaire
de l’élevage) et du danger que des milliards d’individus font
courir à un système qui n’a sans doute pas été
prévu pour résister au choc.
Le deuxième facteur de pollution est, bien sur, la production
industrielle et les quantités fabuleuses de produits toxiques
pour les hommes et pour la nature qu’elle met en circulation, soit pour
être utilisés et engendrer encore davantage de pollution,
soit sous forme de déchets. On a pu croire que le phénomène
avait des effets limités dans l’espace et que les émissions
dangereuses de telle ou telle usine ne faisaient sentir leurs effets
que dans un certain rayon autour de la source. Ainsi, on pouvait se
rassurer égoïstement, en pensant que le pollueur faisait
aussi sans doute son propre malheur si bien que les pays ou les régions
qui prenaient soin de s’entourer de précautions suffisantes pour
restreindre ou limiter la pollution sur leur territoire couraient un
moindre risque et n’en faisaient en tout cas pas courir aux autres.
Piètre consolation, sans doute, mais on ne peut résoudre
tous les problèmes au mieux. Des nouvelles plus inquiétantes,
malheureusement, nous parviennent. Elles montrent clairement, en effet,
que, comme tant d’autres produits de notre activité économique
et industrielle, la pollution s’exporte. Mais là, pas de bulletins
officiels triomphants, pas de graphiques flatteurs ni de statistiques
grisantes. Cette exportation se fait sournoisement, et si jamais l’importateur
la constate et se plaint, on se garde bien de revendiquer la paternité
de toutes ces cochonneries.
On sait, depuis longtemps, que les fleuves véhiculent des tonnes
de produits toxiques et de poissons morts. Les villes baignées
par le Rhin en aval de la Rhur en savent quelque chose. Or, voilà
qu’on parle à nouveau de la Rhur, mais cette fois, pas en Hollande.
Les inquiétudes viennent de beaucoup plus loin, très exactement
de l’Alaska. Du moins, ce sont les Américains qui le prétendent.
Ils ont trouvé, dans la brume qui, chaque printemps, recouvre
l’océan Arctique au nord de l’Alaska des particules comme on
en trouve dans un air urbain pollué ainsi que de faibles quantités
de métaux lourds provenant de la combustion de fuels industriels
lourds. Emportées par les vents, ces substances auraient donc
parcouru environ 10 000 kilomètres. On n’est donc en sécurité
nulle part. Qu’elles aient voyagé aussi loin n’est pas si surprenant
que cela puisque l’on a bien recueilli en Floride et au Mexique des
poussières fines de sable saharien soulevées par des tempêtes.
Pour réduire la pollution au sol, on e cru bien faire en construisant
des cheminées d’usine de plus en plus hautes. Certaines mesurent
plus de 250 mètres, ce qui n’est pas rien. Hélas, en agissant
ainsi on ne fait que déplacer le problème et permettre
aux Norvégiens, par exemple, de profiter de la pollution créée
par les industries anglaises. Même les filtres qu’on a installés
au sommet de telles cheminées ne font qu’aggraver le problème.
lis ne retiennent, en effet, que les particules les plus grosses et
laissent passer les plus fines, généralement acides, qui
sont en même temps les plus mobiles du fait de leur taille. C’est
ainsi que, en quelques années, le degré d’acidité
de la pluie dans certaines régions du Canada et de la Scandinavie,
a doublé.
D’autre part, les craintes soulevées par les effets possibles
des gaz qu’on utilise dans les « bombes » à insecticide,
à nettoyer les vitres, etc., sur les couches supérieures
de l’atmosphère font s’attendre à voir augmenter le nombre
des cancers de la peau. Or, si les « bombes » ne se vendent
que dans les pays industrialisés, leurs effets se feront sentir
partout.
Quand les pays industrialisés polluent, tout le monde trinque.
Or, malgré la crise économique qui entraîne un certain
ralentissement de l’activité industrielle ils continuent à
polluer, peut-être de plus en plus, et, tous les jours, de nouvelles
activités dangereuses pour l’humanité démarrent
dans un coin du globe. La course à la production et à
l’exportation, sans doute nécessaire pour survivre, ne peut qu’accélérer
le phénomène. Une seule solution, rationnaliser tout cela
pour réduire la pollution inévitable au strict minimum,
et ne pas nuire à soi-même ni à son voisin. Seule
l’Economie Distributive peut permettre ce progrès décisif.
Par delà les frontières
Étranger
par
Publication : janvier 1980
Mise en ligne : 17 septembre 2008
par
Publication : janvier 1980
Mise en ligne : 17 septembre 2008