Où sont les verrous ?
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Publication : avril 2015
Mise en ligne : 13 juillet 2015
Quand il a écrit le long article qui précède, Michel Berger ignorait tout de l’économie distributive ! Et pourtant, que de similitudes : il commence par évoquer des mesures pour éliminer les activités spéculatives du système bancaire, il parle de l’émission d’une nouvelle monnaie pour redévelopper localement l’économie, il envisage même le retour au Plan pour coordonner les productions et il souligne les bienfaits à attendre du développement de coopératives ouvrières. Pour lui comme pour les fondateurs de La Grande Relève, il est évident que, dans ces conditions, de nouvelles technologies, au lieu d’être génératrices de chômage et de gâchis, permettraient au contraire de diminuer encore la durée légale du travail, et de mettre en place un revenu garanti, la production restant assurée sans que le travail soit le seul critère de répartition des richesses.
Comme il voit, lui aussi, quelles profondes mutations en résulteraient dans la vie sociale, cette rencontre renforce nos convictions et nos motivations. Nous envisageons même de le convaincre sur quelques points qu’il n’aborde pas, tel que la non-circulation d’une monnaie distributive, les possibilités qu’elle ouvrirait, entre autres rendre impossibles (et non interdire) spéculation financière et paradis fiscaux.
Il reste que cette convergence d’idées nous apporte un autre “plus”. Récemment, un ami nous disait : « c’est bien beau ce que vous proposez, mais vous n’indiquez jamais comment y aller, vous n’imaginez pas la transition ! ». Il est vrai que si beaucoup d’écrits en ce sens ont été publiés, surtout dans les années 1950, par des “distributistes”, comme on les appelait, il n’y en a eu que fort peu ensuite. Et c’est ce que Michel Berger vient de faire en décrivant les mesures que pourrait, dès maintenant, prendre un “bon” gouvernement. Il montre ainsi qu’il est possible d’assurer, sans heurts, le passage du capitalisme à une économie distributive, libératrice, démocratique… ! Il prouve qu’il n’y a pas de raison technique ou matérielle d’affirmer que notre utopie est impossible à réaliser. Qu’il n’y a d’obstacle… que politique, et de la part d’une infime minorité, ce “1%” qui profite encore, et toujours plus, du système en imposant sa volonté aux élus.
La montée du nombre d’électeurs qui s’abstiennent ou votent blanc ou nul, montre bien qu’ils ne croient plus aux programmes annoncés par les professionnels de la politique. Et comme l’immense majorité de la population de la planète (les “99%”) aspire évidemment à un monde plus juste, plus convivial, moins inégalitaire, plus respectueux de la nature et plus soucieux des générations à venir, c’est de partout que se développent des mouvements dont l’objectif n’est plus seulement de protester, mais aussi, et heureusement, d’avoir le courage d’imaginer “un autre monde possible”.