Citations extraites de "Philosophie de la misère
ou système des contradictions économiques" publié
en 1846 par PierreJoseph Proudhon :
"L’économie politique est l’organisation de la misère
; et les apôtres du vol, les pourvoyeurs de la mort, ce sont les
économistes.
La misère n’est-elle pas le résultat d’une fausse manoeuvre
? Le travail ne manque pas puisque sur tous les points le besoin de
subsister, par conséquent de travailler, se fait sentir. Le subsistances
ne manquent pas non plus, puisque de toutes parts on se plaint de l’engorgement
des produits, qui s’avilissent faute de débouchés, faute
de gens qui les paient, faute de salaires.
Singulière économie que la nôtre, en vérité,
où le dénuement résulte continuellement de l’abondance.
Depuis 50 ans, observe E. Buret, la richesse nationale en France a quintuplé,
tandis que la population ne s’est pas accrue de moitié, d’où
vient qu’au lieu de se réduire proportionnellement, la misère
s’est accrue ?
Les économistes ont reconnu implicitement que la misère
avait d’autres causes que la surproduction des enfants (surpopulation).
Comment notre richesse ayant quintuplé, notre population ne s’étant
accrue que de 50 °/, y a-t-il encore parmi nous des pauvres ? Que
l’on me réponde, avant de chercher quel nombre d’habitants pourra
tenir le globe !
Economistes, vous osez nous parler de misère ! et quand on vous
démontre, à l’aide de vos propres théories, que
si la population se double, la production se quadruple en conséquence
le paupérisme ne peut venir que d’une perturbation de l’économie
sociale, au lieu de répondre, vous accusez, ce qu’il est absurde
d’appeler en cause l’excédent de population.
Quand nous développons en votre présence
le mécanisme de l’usurpation propriétaire, de la fiction
capitaliste et du vol mercantile, vous fermez vos yeux pour ne point
voir, vos oreilles pour ne point entendre, vos coeurs pour ne pas céder
à la conviction ; l’iniquité du siècle vous est
plus précieuse que le droit du pauvre, et vos intérêts
de coterie passent avant ceux de la science.
Nous avons démontré précisément ce que Malthus
ne soupçonnait pas, savoir que, dans une société
organisée, la production de la richesse et des subsistances est
en progression plus rapide que la population.
Economistes, vous n’êtes occupés que d’une conjoncture
tout à fait hypothétique où la population surabonderait
sur le globe, et vous détournez sans cesse les yeux du mal réel.
La misère a pour cause immédiate, non pas le surcroit
de population mais les prélèvements du monopole. La misère,
sous un régime comme le nôtre, ne manquera jamais de se
produire, soit que la population avance, soit qu’elle recule. La preuve
de cette assertion se trouve à chaque page de ce livre.
Que l’activité individuelle succombe sous l’autorité sociale,
l’organisation dégénère au communisme et aboutit
au néant. Si, au contraire, l’initiative individuelle manque
de contre-poids, la civilisation se traine sous un régime de
castes, d’iniquité et de misère."
(envoyées par Etiradilos)