Au fil des jours
par
Publication : octobre 1980
Mise en ligne : 25 mars 2008
On continue à déplorer les méfaits de l’abondance.
Jugez vous même : Cacao, on a un surplus mondial de 150 000 tonnes
de fèves et les cours sont à leur plus bas niveau depuis
quatre ans.
Les cours du café ne cessent de baisser et retrouvent leur niveau
de 1976. L’organisation internationale du café envisage donc
de contingenter les exportations pour soutenir les cours.
Le prix du cuivre raffiné vient encore de baisser, les cours
du sucre s’effritent sur les diverses places commerciales.
En France, les cours du cuir brut ont diminué de plus de 50%...
mais le prix des chaussures a augmenté de 14,5 % pendant la même
période. Vive la liberté des prix !
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Dans les pays de la communauté économique européenne,
la production agricole progressera en volume d’environ 4,6% par rapport
à 1979 qui a été une très bonne année.
Cet accroissement de production est principalement dû aux céréales
qui augmentent de 7 % et aux oléagineux et protéagineux
qui croissent de 90 %.
Malgré cela le revenu des agriculteurs ne devrait pas beaucoup
progresser à cause du décalage entre les hausses des prix
agricoles (environ 10 % en moyenne) et ceux des produits nécessaires
aux agriculteurs (13 à 14 %). Cette abondance pose aussi des
problèmes de financement à la C.E.E. car une partie de
la production devra être exportée... et subventionnée
car les cours mondiaux des céréales sont inférieurs
de 25 à 30 % aux cours communautaires.
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La crise de la sidérurgie européenne s’aggrave : devant
la mévente qui s’accroît les autorités communautaires
ont demandé, dès la fin du mois de juillet dernier, une
réduction volontaire de la production de 11 % pour éviter
un effondrement des prix et une série de faillites. M. Davignon,
le technocrate ad hoc, a même laissé entendre qu’il pourrait
demander le 7 octobre prochain aux ministres des Neuf l’application
du contingentement autoritaire en invoquant l’état de «
crise manifeste » prévu à l’article 58 du traité
de Rome.
Même le pétrole est trop abondant ! Les stocks accumulés
dans les pays importateurs du monde occidental atteignent près
de 5 milliards de barils, soit à peu près une centaine
de jours de consommation.
Les prix, qui ont augmenté de 150 % entre mars 1979 et juillet
1980, ont tendance à se tasser.
(L’Indonésie, la Chine, l’Equateur et même Elf-Aquitaine
ont annoncé des baisses de 1,5 à 2 dollars par baril à
compter du 1er septembre).
Devant l’affaissement de la demande, un grand nombre de pays de l’O.P.E.P.
ont réduit considérablement leur production (jusqu’à
28 % pour le Koweit) . Si l’on en croit les experts américains,
il faudra un an, sinon cieux, pour résorber l’excédent
de production, même si l’Arabie Saoudite abaisse son niveau d’extraction
d’un million de barils par jour.
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Pendant ce temps, la misère ne cesse de s’aggraver en Afrique
Noire et les inégalités s’accroissent : selon une étude
du Bureau International du Travail, dans la plupart des pays d’Afrique
Noire, un cinquième de la population se partage les deux tiers
du revenu total. Plus de la moitié de la population parvient
péniblement à se nourrir. La production agricole stagne
ou recule, ce qui aggrave la malnutrition.
Et pourtant, selon les experts du B.I.T., le continent pourrait produire
plus qu’il n’a besoin pour se nourrir. Mais les rares investissements
qui sont effectués le sont au bénéfice de la grande
agriculture commerciale au détriment des petits cultivateurs.
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Dans l’Europe des Neuf, on comptait fin juillet près de six millions sept cent mille chômeurs, soit près de 6,1 % de la population active. C’est, selon l’Office Statistique des Communautés Européennes, le nombre le plus élevé depuis l’existence de la C.E.E. La hausse est de 13,1 % par rapport à juillet 1979.
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Selon les statistiques officielles l’industrie française n’utilise
efficacement que 20 % de l’énergie qu’elle consomme. Le reste,
c’est-à-dire 38 millions de tonnes d’équivalent pétrole,
soit environ 20 % de la consommation nationale est rejetée dans
l’atmosphère. Ainsi, une centrale thermique de l’E.D.F. brûle
3 thermies de fuel en moyenne pour produire l’équivalent de 1
thermie.
Selon le rapport publiant ces statistiques, l’E.D.F. aurait dispersé
dans la nature en 1978 19 millions de tonnes d’équivalent pétrole.
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Selon un sondage effectué par l’Office National d’immigration
« les Français répugnent encore à remplacer
les travailleurs étrangers aux tâches les plus pénibles
». L’enquête nous apprend que sur 2 329 emplois libérés
par des immigrés rentrés chez eux en bénéficiant
de l’aide au retour, un tiers ont été occupés par
des Français, un tiers par de nouveaux immigrés et un
tiers ont été supprimés.
Ça vous étonne, vous ?
Ces Français sont vraiment des nantis !