Banalisation de l’injustice

Lectures
par  C. ROBIN
Publication : octobre 1999
Mise en ligne : 3 décembre 2005

Comme le nazisme, notre système a su amener toute une population à trouver l’injustice si banale qu’elle ne la voit plus ! Christophe Dejours s’en révolte dans un livre que Claude Robin commente pour nous :

On le sait bien, l’information et son contrôle par la “nov langue” dominante, sont des armes essentielles de la machinerie de guerre économique qui permet d’obtenir le consentement des masses à cet “ordre”“ meurtrier.

Ce qui est nouveau à ce stade de notre histoire, note Christophe Dejours [1], ce n’est pas tant l’injustice et la souffrance imposées à autrui, via les rapports de domination en œuvre dans nos sociétés, c’est le fait que ce système puisse passer pour “raisonnable et justifié”, qu’il soit donné pour “réaliste et rationnel”, qu’il soit accepté, voire approuvé par une majorité de citoyens, qu’il soit enfin prôné ouvertement, aujourd’hui, comme LE modèle à suivre et dont toute entreprise et société devraient s’inspirer au nom du bien, du juste, du vrai...

Ce qui est nouveau en effet, c’est qu’un système, qui produit et aggrave constamment la souffrance, l’injustice et les inégalités, puisse faire admettre ces dernières pour bonnes et justes. Ce qui est nouveau, c’est la banalisation des conduites injustes qui en constituent la trame.

Comment une population, se demande Christophe Dejours, en est-elle réduite à tolérer, voire à collaborer activement au sort réservé aux chômeurs et aux “nouveaux pauvres” dans une société qui pourtant ne cesse de s’enrichir (cf., notamment, les rapports successifs du PNUD !) cela renvoie aussi à la problématique de Stanley Milgram [2], cette trop pesante “dialectique du maître et de l’esclave ”... « En ce sens, écrit Christophe Dejours, aucune différence ne peut être mise en évidence entre la banalisation du mal dans le système néo-libéral actuel et la banalisation du mal dans le système nazi : les objectifs et les moyens diffèrent, mais les processus sont identiques qui permettent d’entraîner, progressivement, la majorité des hommes d’une nation à infliger l’injustice, la souffrance et la violence à autrui et à se conduire, a minima ou ad libitum, comme Fichmann en faisant taire le sens moral et en offrant à nombre d’entre nous une rationalisation facile à sa propre démission, à son propre renoncement”. (Cette somme de petites lâchetés individuelles qui fait la force d’un système !).

Mieux comprendre comment ”l’Ordre des hommes” peut produire cet assujettissement reste une énigme. Dejours nous livre également quelques jalons pour organiser une contre-attaque, élaborer quelques antidotes à la fascination/fascisation libérale ambiante.

Antidote ?... La Grande Relève n’a peut-être pas trouvé “la molécule-miracle”, mais au moins, comme catalyseur, elle contribue à renforcer les germes de résistance. Comme fédératrice de réflexions, comme “lieu” de circulation d’idées et d’actions... elle contribue à rendre possible le souhaitable (et non à rendre souhaitable ce qu’on nous présente comme “seul possible”, “micro” ou “nécro psychie” à laquelle voudraient nous condamner les profiteurs de ce monde sanglant de la souffrance de tous nos semblables.


[1Dans Souffrance en France - la banalisation de l’injustice sociale Ed. Seuil janvier 1998. 120 F.

[2Dans Soumission à l’autorité Ed. Calmann Levy


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