OMC
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Publication : octobre 1999
Mise en ligne : 3 décembre 2005
On s’est étonné, à la rédaction, de trouver dans la montagne de courrier qui nous attendait début septembre, si peu de réactions au sujet de ce qui se trame à Seattle. Il s’agit pourtant de promouvoir les options du néo-libéralisme au rang de lois universelles, c’est-à-dire de soumettre tous les gouvernements du monde à l’obligation de faire passer le droit pour quelques géants, tels McDo, Monsanto, Hollywood ou Microsoft, de gagner toujours plus d’argent, avant celui des citoyens de choisir de consommer une nourriture saine, de disposer d’un système de sécurité sociale et de législation du travail, ou de protéger leur environnement et leur culture. Pour y parvenir, toute une armée “d’experts”, payés par ces firmes, a entrepris de piéger, lors des prochaines négociations de l’OMC [1] les représentants élus des gouvernements en leur ôtant définitivement tout droit de suivre la volonté des peuples, en particulier d’empêcher éventuellement ceux-ci de vouloir remplacer le capitalisme par un système économique plus humain. On s’attend à ce que les distributistes soient tous aux premiers rangs des manifestations qui s’organisent contre ce retour de l’AMI [2] et contre lequel ils ont été très nombreux à se battre.
Mais, heureusement, nous venons de participer, ce 16 septembre, au meeting organisé à la Bourse du Travail par l’association ATTAC. Les arguments puissants exposés par Susan George [3], Bernard Maris [4] et étienne Vernet [5], le bon sens de François Dufour [6] et la détermination de Vincent Espagne [7] nous ont regonflé le moral. Des informations reçues et des documents accumulés, il ressort que le danger est immense, d’autant que la plupart des élus, même ceux des gouvernements qui se veulent “démocratiques”, n’ont toujours pas pris la mesure du pouvoir auquel ils sont en train de renoncer. Il est évident que la grande majorité de l’opinion, dans le monde entier, qui est façonnée par une presse payée pour la rendre crédule et docile, ne voit pas le danger [8]. Tandis que les moyens réunis, les procédés employés et les coups fourrés préparés par les tenants de l’idéologie totalitaire du marché sont énormes.
C’est parce que nous sommes convaincus que seule l’union des citoyens sur un objectif précis peut faire stopper ces entreprises de l’idéologie totalitaire du veau d’or contre les droits des peuples, que nous avons participé l’an dernier à la campagne contre l’AMI. L’arrêt obtenu des négociations au sein de l’OCDE a fait la preuve de l’efficacité d’une telle mobilisation. Mais si celle-ci a surpris les politiques et les négociateurs, ces derniers sont maintenant en alerte. Et les négociations dites du “millenarium round”, qui doivent durer trois ans, commencent dès le 30 novembre prochain. Il est donc temps d’abord de s’informer sur ce que des observateurs comme Susan George peuvent apprendre, ensuite de comprendre et d’expliquer les implications des accords en projet (alors que tant de médias, s’ils en parlent, les présentent soit comme sans danger, soit comme bien combattus par nos représentants), et enfin de parvenir à une mobilisation soutenue de tous ceux qui entendent avoir un droit de regard sur des décisions qui déterminent irrémédiablement leur avenir. C’est dans cet esprit que nous ouvrons ci-dessous un dossier spécial sur les négociations de l’OMC, pour contribuer à une autre OMC l’Organisation Mondiale des Citoyens.
[1] OMC = Organisation Mondiale du Commerce.
[2] AMI = Accord Multilatéral sur les Investissements. Voir GR-ED 975 de mars 1998.
[3] Présidente de l’Observatoire de la Mondialisation.
[4] Prof. d’économie à l’université de Toulouse et journaliste.
[5] au nom d’écoropa.
[6] porte-parole de la Confédération paysanne.
[7] de l’association Droits devant !
[8] Nous avons même eu la surprise de trouver dans le courrier reçu de nos abonnés qu’il en est un, sans doute le seul, qui croit encore que le marché est le plus impartial des juges, et si infaillible qu’il faut lui remettre le soin de décider seul de la répartition des richesses du monde !