"L’argent fou", d’Alain MINC
par
Publication : avril 1990
Mise en ligne : 24 mars 2009
Toujours dans le but de rendre la Grande Relève plus variée, plus attractive, plus vivante, nous aimerions que notre rubrique "LECTURES" consacrée à des livres qui nous intéressent - dans un sens positif ou négatif, peu importe - puisse être tenue le plus régulièrement possible grâce aux envois de nos lecteurs. Alors, tous au travail ! Ce mois-ci, c’est André Prime qui s’y est mis.
Alain Minc est ce jeune homme brillant qui a déjà
écrit sept livrres tout en dirigeant la holding CERUS du Groupe
Berlusconi. C’est dire que son salaire doit être confortable.
A-t-il jamais cotoyé la misère ? On peut en douter. Voici
ce qu’il écrit, cela se passe de commentaires
"Je crois à l’économie de marché. Il n’en
existe pas d’autre : après un siècle de tâtonnements
et d’échecs souvent dramatiques, l’évidence triomphe de
Budapest à Paris, de Varsovie à Tokyo, de Moscou à
NewYork...
J’aime le capitalisme et sa capacité infinie de mouvement et
de renouvellement. II rime avec la vie : le nier, c’est en économie
refuser le principe vital. J’en connais certes les rugosités
et les petitesses, mais elles demeurent dérisoires, comparées
à cette formidable puissance de création... J’en accepte
le prix : le poids de l’argent dans la société. Ce n’est
pas, à tout prendre, la valeur la plus dangereuse ...Mais aimer
le marché et le capitalisme, ce n’est pas accepter un culte délirant
dont les excès sont à la mesure des tabous d’autrefois...
(Sinon) un jour, la réaction sera d’une brutalité au diapason
de la naïveté d’aujourd’hui et le débat reprendra,
absurde à nouveau, sur la légitimité du capitalisme.
Le devancer, chercher les contre-feux, anticiper l’affrontement, c’est
aujourd’hui un devoir... II n’existe donc qu’une réponse : la
vertu, encore la vertu, toujours la vertu. Mot dévalué,
suranné peut-être, sur lequel le XXIe siècle risque
néanmoins de buter. Comment trouver les chemins de la vertu ?
Etrange question, au fumet réactionnaire ; c’est pourtant l’enjeu
le plus neuf, voire le seul révolutionnaire, dès lors
que la gauche a remballé ses fantasmes et ses rêves aux
lois du réel. Réinventer la vertu : aspiration inattendue,
ambition dérisoire ? En existe-t-il d’autres, lorsque l’argent
est devenu fou ?"
Pour Alain Minc, il n’y a donc que le capitalisme, sauf à le
moraliser : "La vertu, encore la vertu, toujours la vertu".
II y aurait de quoi sourire, ou même éclater de rire, si
la situation n’était pas si grave. Nous sommes loin de l’Economie
Distributive.
Alain Minc est de ceux qui pensent qu’avec le triomphe
actuel du capitalisme, le monde est "fini", a atteint son
but, tout comme l’annonçait cet Américain Francis Fukuyama,
dans un article qui fit grand bruit, il y a quelques mois, dans "National
Interest" : "Ce que nous sommes en train de voir, c’est la
fin de l’Histoire ellemême ; c’est-à-dire la fin de l’évolution
idéologique de l’homme et l’universalisation de la démocratie
libérale occidentale comme forme finale du gouvernement des hommes
.... (ce qui peut être) aussi perçu dans l’inéluctable
généralisation de la culture occidentale de consommation...
Pour nos intérêts, il importe vraiment peu que d’étranges
pensées viennent aux habitants du Burkina-Faso ou de l’Albanie...
Le tiers monde est encore embourbé dans l’histoire. "
Alain Minc rejoint donc cette "caste" qui représente
l’idéologie dominante, celle des "élites mondiales".
(1) chez Grasset