La peur est mauvaise conseillère
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Publication : septembre 2018
Mise en ligne : 14 janvier 2019
Comment a-t-on pu croire qu’un ministre de l’écologie, aussi sincère, aussi bien intentionné, aussi populaire qu’il puisse être, aurait pu faire prendre par un gouvernement les mesures qui s’imposent ?
Ces mesures radicales, que ce soit pour freiner les rejets de gaz carbonique dans l’atmosphère dont on ne peut plus douter qu’ils soient la cause des dérèglements climatiques constatés, que ce soit pour cesser d’exploiter les sols au point de les épuiser, d’empoisonner l’air, les rivières et les océans, de bétonner les côtes, de dévaster les forêts, de condamner la biodiversité en massacrant les animaux, etc. s’opposent de façon évidente aux principes qui fondent le système capitaliste. Il y a incompatibilité totale entre ces mesures urgentes qui impliquent une sobriété raisonnée, et le maintien d’un système pour qui la croissance de la consommation est au contraire une nécessité absolue, la recherche d’un profit financier devant, a priori, y éclipser tout autre considération.
Comment peut-on encore croire qu’il est possible de réduire la production de gaz à effet de serre alors que les ventes de Mirages sont présentées comme une magnifique réussite ? Prenons l’exemple du glyphosate. Pourquoi l’interdiction de son utilisation est-elle sans cesse repoussée alors que sa nocivité est reconnue ? — Il est flagrant que cette interdiction entraînerait une forte baisse de ressources pour les exploitants de l’agriculture industrielle : on retrouve, dans cette reculade face aux mesures nécessaires, l’intervention de lobbyistes, comme il y en a des milliers, défendant des intérêts privés. Et ils sont souvent bien mieux équipés et rémunérés que les élus qui ont pourtant la responsabilité des décisions légales à prendre.
C’est ainsi que les intérêts des grosses entreprises détruisent toute démocratie.
Depuis la révolution libérale des années 1980, nos gouvernements, qu’ils soient ouvertement “de droite” ou qu’ils se prétendent “de gauche” prouvent bien qu’ils ne sont que des exécutants de ce système : ils gèrent les pays comme une entreprise pour qui toute préoccupation sociale est une charge !
Comment ne pas voir que cette exploitation des êtres humains et la croissance odieuse des inégalités sont le résultat fatal de cette soumission à une idéologie que rien ne justifie ?
Allons plus loin. Par quel moyen cette idéologie se maintient-elle encore ? N’est-ce pas par la peur ? La peur de l’inconnu, et le salaire étant toujours considéré comme la seule source de revenus qui soit imaginable, cette peur est souvent celle de voir encore diminuer le nombre d’emplois.
Quand on prend conscience que la fuite en avant est devenue si dangereuse, il est temps de surmonter cette peur d’un changement qui nous obligerait à revoir nos habitudes.
Ce n’est pas un ministre, ni plusieurs, qu’il faut changer. C’est le système capitaliste.
Mais sans se tromper. Or la politique dite “libérale” menée partout depuis plusieurs décennies a tellement déçu les électeurs qu’un vaste mouvement de réaction se manifeste maintenant vers les partis de l’extrême-droite. C’est ne pas voir que, malgré souvent de belles paroles, ces partis politiques sont loin d’être anticapitalistes. Ils sont au contraire bien décidés à défendre par tous les moyens, même violents, les privilèges d’une classe xénophobe, au mépris de toute démocratie. Cette confusion dans beaucoup d’esprits va sans doute être entretenue à l’occasion des prochaines élections européennes, les réflexions telles que celles d’André Bellon que nous reproduisons ci-dessous devraient aider à les éviter. En France, les électeurs qui ont cru aux promesses de Macron sont en train de comprendre leur illusion. Comment vont-ils réagir ?
Il ne s’agit plus de critiquer les effets du capitalisme, ni de croire qu’il est possible de les réduire ou de les surmonter. Il s’agit de chercher par quoi le remplacer.
Et heureusement, il est réconfortant de constater que de plus en plus de réflexions et de propositions convergent vers celles que nous défendons depuis si longtemps… trop souvent qualifiées d’illusoires. J’en veux pour exemple celles que vient de publier Benoît Borrits, brièvement présentées ci-dessous.