Les appels à la solidarité
par
Publication : juillet 1988
Mise en ligne : 15 juillet 2009
C’est le maître-mot de toutes les doctrines dites
sociales. Celles-ci s’expriment dans une série de voeux dont
il reste à financer la réalisation. Et chacun de touiller
la même soupe. S’agit-il de l’Etat ? Les membres de la collectivité
concernés par le prélèvement fiscal participent
alors bon gré mal gré aux transferts décidés
à un niveau gouvernemental. S’agit-il d’organisations privées
? Les transferts sont ici plus sélectifs tant en raison du volontariat
auquel il est fait appel en matière de dons ou des prestations,
que parle libre choix des programmes d’aide ou celui des personnes assistées.
Il est clair toutefois que l’essentiel des fonds collectés provient
des milieux fortunés relevant des professions indépendantes,
libérales, industrielles ou commerciales. N’ayons pas la naïveté
d’imaginer que ces gens-là puissent se déssaisir durablement
d’une part de leur avoir en faveur des classes démunies, alors
que, maîtres de leurs prix, il leur est si facile de les majorer
reportant ainsi sur la clientèle le soin de pourvoir à
leurs libéralités. N’en va-t-il pas de même, en
effet, des "pots-de-vin" et autres commissions, dépenses
publicitaires, pareillement inclus dans les prix ? Origine analogue pour
l’argent que recueillent les Fondations associées aux grandes
firmes.-Ces transferts au nom de la solidarité s’alimentent,
en dernière analyse, sur les seuls consommateurs à revenus
fixes rançonnés au fil de leurs achats, tandis que les
privilégiés de l’autorémunération en réchappent.
En fait, les bonnes âmes qui vont prêchant la solidarité
écartent d’emblée l’hypothèse que la "règle
du jeu" puisse changer, que les revenus, cessant de se former au
hasard des impacts d’un flux monétaire, épousent tout
simplement la réalité d’une production dont le volume,
depuis un siècle, s’est vu multiplié par plus de 1.000
sans que pour autant la condition des plus pauvres ait été
notablement améliorée.
La solidarité n’est que caricature lorsque le cadre économique
dans lequel elle s’exerce impose la compétition sauvage, la mise
à mort du concurrent, la course à l’argent qui fait de
chacun le rival de l’autre dont il guigne le revenu pour former le sien.