Lu, vu, entendu
Publication : juillet 1990
Mise en ligne : 16 mars 2009
L’argent, mauvais maître
H.M. de Guérande (L.A.) est exaspéré d’entendre
répéter qu’il n’existerait aucun projet de société
susceptible de se substituer aux modèles connus et pratiqués.
Pour lui, cette absence de pensée novatrice vient de l’importance
donnée à l’argent dans toutes nos institutions.
"La civilisation de l’argent est et reste une civilisation de loups
furieux cherchant par la concurrence, à s’entretuer, où
l’homme entre en conflit constant avec autrui. Tout individu, s’il veut
survivre, a l’obligation de tromper son partenaire, de ruser avec sa
bonne conscience, de se faire courtisan, de prostituer son talent au
service de la plus pernicieuse des causes : celle de l’accumulation
des profits dans l’investissement, au bénéfice principal
d’une oligarchie.
N’est-ce pas, en conséquence, aller se perdre dans les voeux
pieux que d’en appeler après les idéaux de justice et
de paix, que de bâtir des plans de développement généreusement
humains, que d’espérer lutter de façon efficace et durable
contre la misère et la faim dans le monde en escamotant la nécessité
d’une opération chirurgicale dans les usages monétaires
datant de Babylone ? C’est le cadre économique, avec ses règles
défiant le sens commun, qui porte la responsabilité de
cette décadence de notre civilisation sur le plan morall et humain.
Infantilisé par les propagandes, absorbé par ses soucis
quotidiens, livré à un travail souvent sans attrait, l’individu
finit par se déspiritualiser, perdant toute chance de reconquérir
sa dignité. La finalité du progrès ne saurait être
ni la prospérité du commerce bancaire, ni l’enrichissement
d’une oligarchie, moins encore le règne d’une ploutocratie. Elle
doit viser avant tout la sécurité d’un revenu pour tous,
l’élévation constante du niveau des approvisionnements
utiles, après suppression des gaspillages et intelligente planisation
de l’emploi qualifié rendu à des tâches socialement
utiles et moralement saines, l’enrichissement du loisir, l’expansion
des activités libres, là où l’homme retrouve un
peu de sa dignité et l’occasion d’être considéré.
Enfin, une économie humaine, cela signifie encore l’établissement
d’un ordre hiérarchique fondé sur d’autres critères
que le gain, un ordre de valeurs honorables où le profit n’exerce
plus son dictat pardessus le besoin humain, où l’homme cultivé
acquiert la primauté sur le marchand analphabète, sur
le fripon enrichi.
C’est une civilisation où l’homme s’accomplit totalement, à
la fois pour luimême et au service du bien commun. Nous en sommes
fort loin.
(Ouest-France, 3 mai)
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Redressement des grandes entreprises françaises
Les Grandes Entreprises auraient déniché la "recette
miracle" qui a permis une explosion de leurs bénéfices
depuis 1984. Pour l’essentiel, les mystérieux ingrédients
de cette panacée seraient : "Produire plus et gagner (beaucoup)
plus avec moins de salariés" ...
.. Conséquences : les bénéfices en 89 se chiffrent
à + 562 % (francs constants). La France est devenue troisième
investisseur mondial derrière la RFA. Le "Financial Times"
tresse une couronne de lauriers au président Mitterrand sacré
pour la circonstance "meilleur monétariste".(...) "Qui
a été le plus disposé à accepter un taux
de chômage élevé afin de débarrasser son
pays du fléau de l’inflation". (...) Entre 88 et 89 la masse
monétaire n’a augmenté que de + 53 % en France pour 142
% en GrandeBretagne. Le "Financial Times" souligne en outre
que : "Le gouvernement socialiste de Mitterrand n’a permis une
augmentation réelle des salaires que de moins de 6 %, pendant
la même période le gouvernement (ultra-libéraliste)
de Madame Thatcher aura concédé 20 %".
(Courrier Picard du 21 avril, transmis par J.M.N., Neuilly-sur-Seine)
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Partager le travail, solution au chômage
Etienne Vignon n’en doute pas. Les économies occidentales sont
dans un cycle durable de sous-emploi, du fait de l’amélioration
constante de la productivité et des rigidités du marché
de l’emploi, notamment sur le plan salarial."On produit de plus
en plus d’exclus quand la richesse s’accroit’ note-t-il avec un certain
pessimisme.
Présent à Angoulême, ce week-end pour une conférence
devant le mouvement des cadres chrétiens, l’ingénieur
en retraite a défendu le point numéro un de sa thèse
: c’est par le partage et l’aménagement du temps de travail que
le pays peut sortir de la spirale négative qui condamne plus
de deux millions de personnes à l’inactivité.
Partager le travail implique une réflexion sur le rôle
social de chacun et son utilité dans l’entreprise. Etienne Vignon
n’hésite pas à dire qu’on peut souvent se passer du plus
indispensable des salariés ou des employeurs. Si le partage du
temps de travail implique aussi un partage des revenus "cela peut
être compris
de chacun" le gisement d’emplois à exploiter se trouve aussi
dans les services marchands et non marchands, dans les "aides à
la personne", les activités d’accompagnement scolaire, etc...
Pour l’auteur de "Le travail demain, un privilège ? ",
les blocages sociaux qui paralysent ce type de réforme nécessitent
"un vrai changement de mentalité" et un "acheminement
différent des revenus". A noter que Georges Chavanes, ancien
collègue d’école préparatoire de Georges Vignon,
a préfacé son ouvrage.
(Charente Libre du 14 mai, transmis par M. D. Angoulême)
NDLR : Partager le travail ne suffit pas. II faut aussi solvabiliser les consommateurs et décourager la spéculation.
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Le Japon au secours du Baugeois
La signature en septembre dernier, dans la grande salle du château
de Baugé, de l’acte de vente, par la municipalité, de
200 hectares au groupe japonais Ogisaka, pour la réalisation
d’un golf, d’un plan d’eau et d’un complexe hôtelier, est lourde
de symboles et préfigure peut-être ce que nous réservent
les années à venir. Le Baugeois est le "pays"
de Maine-etLoire le plus menacé par la dépopulation et
la désertification. Région de tradition et d’élevage
extensif, son avenir agricole est condamné et la politique européenne
de `jachère" la menace particulièrement.
Par contre, géographiquement, le Baugeois a des atouts extraordinaires.
A mi-chemin entre la capitale et la côte atlantique, à
quelques lieues des châteaux de la Loire, il est traversé
par l’autoroute Océane, par le TGV qui s’arrête au Mans
et Angers, et, dans les années à venir, l’aéroport
de Seiches-Marcé sera à deux pas.
En achetant les 200 hectares des Bordes et du moulin de Fougère,
sur les communes de Baugé et Pontigné, au prix de 22.000
F. l’hectare, ce ne sont pas 60 hectares de terres agricoles et 140
de marais qui, au prix du marché, valaient beaucoup moins, que
le groupe Ogisaka a acquis, mais un espace dont la topographie convient
aux loisirs, et qui en même temps est magnifiquement desservi.
Nous sommes donc en présence d’un phénomène nouveau,
mais qui risque de se généraliser dans nos belles campagnes,
à savoir, le remplacement de l’espace agricole par des espaces
de loisirs. Et comme par hasard, c’est un groupe venu de la première
puissance financière du monde qui choisit de venir y investir.
Là où Angers vient d’échouer pour un projet industriel
(Subaru), Baugé réussit avec un projet de loisirs. Toute
une région applaudit.
(article de la revue trimestrielle l’Anjou, transmis par J. G. , Tours)