Porto Alegre II !

ACTUALITE
Publication : mars 2002
Mise en ligne : 27 janvier 2007

Voici d’abord l’essentiel de l’appel, rassemblé en seize points, des mouvements sociaux réunis au second Forum Social mondial :

Résistance au néolibéralisme, à la guerre et au militarisme, pour la paix et la justice sociale.

1. Face à la détérioration croissante des conditions de vie des peuples, nous, mouvements sociaux du monde, nous sommes réunis à plusieurs dizaine de milliers au second Forum social de Porto Alegre. Nous sommes ici ensemble malgré les tentatives pour briser notre solidarité. Nous sommes revenus pour poursuivre nos luttes contre le néolibéralisme et la guerre, pour confirmer nos engagements de l’an passé et réaffirmer qu’un autre monde est possible.

2. Notre diversité est grande, femmes et hommes, jeunes et adultes, peuples indigènes, ruraux et urbains, travailleurs et chômeurs, sans abris, retraités, étudiants, immigrés, peuples de toutes croyances, couleurs et préférences sexuelles. Cette diversité fait notre force. Elle est la base de notre unité. Notre mouvement de solidarité est global, uni dans une même détermination contre la concentration de la richesse, l’extension de la pauvreté et des inégalités, contre la destruction de notre terre. Nous construisons des solutions alternatives, et nous les mettons en oeuvre de façon créative. Nos luttes et résistances sont le ciment d’une large alliance contre un système basé sur le sexisme, le racisme et la violence, un système qui privilégie systématiquement le capital et le patriarcat sur les besoins et les aspirations des peuples.

3. Ce système est dramatique. Chaque jour, des femmes, des enfants, des personnes âgées meurent de faim, ou faute d’accès aux soins médicaux. Des familles entières sont expulsées de leur foyer par faits de guerres, par des projets industriels pharaoniques, par le désaisissement de leurs terres, et par des désastres environnementaux. Des populations entières souffrent du chômage, des attaques contre les services publics et la solidarité.

4. Les événements du 11 septembre ont introduit une rupture dramatique. Après les attaques terroristes que nous condamnons sans réserve, de même que nous condamnons toute attaque contre des civils partout dans le monde, le gouvernement des Etats- Unis et ses alliés ont déclenché une riposte militaire massive. Au nom de "la guerre contre le terrorisme", des droits civiques et politiques sont remis en question partout dans le monde. [...] On assiste au début d’une guerre globale permanente qui vise à renforcer la domination du gouvernement des Etats-Unis et de ses alliés. Cette guerre révèle une autre face du néolibéralisme, brutale et inacceptable. L’islam est satanisé tandis que le racisme et la xénophobie sont délibérément exacerbés. Les médias prennent une part active dans cette campagne en divisant le monde entre "Bien et Mal". L’opposition à la guerre est constitutive de notre mouvement.

5. La déstabilisation du Moyen-Orient s’en est trouvée accrue, fournissant un prétexte à une répression redoublée contre le peuple palestinien. Nous considérons qu’il y a urgence à nous mobiliser en solidarité avec le peuple palestinien et son combat pour l’autodétermination alors qu’il subit une occupation brutale par l’Etat d’Israël. Cette question est vitale pour la sécurité collective de tous les peuples de la région.

6. L’actualité inscrit nos combats dans l’urgence. En Argentine, la crise financière causée par la politique d’ajustement structurel du FMI, et une dette sans fin, ont précipité la crise sociale et politique. Spontanément, les classes moyennes et les travailleurs se sont mobilisés, subissant une répression meurtrière et provoquant la chute de gouvernements. Les mobilisations populaires se sont développées autour de demandes élémentaires, nourriture, emploi et logement. Nous rejetons la criminalisation des mouvements sociaux en Argentine et condamnons les attaques contre les droits démocratiques et la liberté.[...]

7. L’effondrement de la multinationale Enron illustre la banqueroute de l’économie casino et la corruption d’hommes d’affaires et de politiciens qui ont délibérement sacrifié les salaires et les retraites des salariés. Dans les pays en voie de développement, cette multinationale menait des activités frauduleuses. Ses projets ont conduit à l’expulsion de populations entières de leur terre et à de fortes hausses du prix de l’eau et de l’électricité.

8. Le gouvernement des Etats-Unis, dans ses efforts pour protéger les intérêts des grandes entreprises, s’est refusé avec arrogance à respecter les accords de Kyoto sur le réchauffement de la planète, les traités antimissiles et antibalistiques, les conventions sur la biodiversité, la conférence de l’ONU contre le racisme et l’intolérance, les discussions sur les livraisons d’armes légères. C’est ainsi que l’unilatéralisme des Etats-Unis sape les tentatives de solutions multilatérales aux problèmes globaux.

9. A Gênes, le G8 a échoué dans la fonction de gouvernement global qu’il s’était attribuée. Confrontés à une mobilisation et à une résistance massives, les gouvernements du G8 ont répondu par la violence et la répression, traitant comme des criminels ceux qui avaient osé protester. Cette politique d’intimidation a échoué.

10. Tout ceci se déroule dans un contexte de récession mondiale. Le modèle économique néolibéral détruit les droits et les moyens d’existence des peuples. Ne reculant devant rien pour protéger leurs marges de profits, les multinationales licencient, réduisent les salaires et ferment les entreprises. Les gouvernements gèrent cette crise économique en privatisant, en effectuant des coupes claires dans les budgets sociaux, et en s’attaquant aux droits des travailleurs. Cette récession montre le caractère mensonger des promesses néolibérales de croissance et de prospérité.

11. Le mouvement global pour la justice sociale et la solidarité doit relever d’énormes défis : notre combat pour la paix et la sécurité collective implique de s’attaquer à la pauvreté, aux discriminations, aux dominations et de s’engager dans la construction d’une société durable et alternative. Les mouvements sociaux condamnent énergiquement la violence et le militarisme comme moyens de résolution des conflits [...], le commerce des armes et l’augmentation des dépenses militaires, le blocus économique contre les peuples, en particulier contre Cuba, contre l’Irak et d’autres pays. Ils condamnent l’escalade répressive contre les syndicats, les mouvement sociaux et les militants. Nous soutenons les luttes des syndicats et des salariés tant du secteur traditionnel que du secteur informel. Elles sont essentielles pour défendre les conditions de travail et de vie, le droit de s’organiser, de se mettre en grève, de négocier des accords collectifs à différents niveaux, et d’obtenir l’égalité des salaires et des conditions de travail entre femmes et hommes. Nous rejetons l’esclavage, l’exploitation des enfants. Nous soutenons les luttes des syndicats et des travailleurs contre la précarisation, la soustraitance du travail et les licenciements. Nous exigeons de nouveaux droits transnationaux pour les salariés des compagnies multinationales et de leurs filiales, en particulier dans le domaine de la syndicalisation et de la négociation collective.

12. Les politiques néolibérales génèrent misère et insécurité. Elles ont considérablement augmenté l’exploitation sexuelle et les trafics de femmes et d’enfants. Pauvreté et insécurité créent des millions de migrants qui se voient dénier leur dignité, leur liberté et leurs droits fondamentaux. Nous exigeons la liberté de circulation, le droit à l’intégrité physique et un statut légal pour tous les migrants. Nous défendons le droit des peuples indigènes et exigeons l’inclusion et l’application de l’article 169 de l’OIT dans les législations nationales.

13. La dette externe des pays du Sud a été remboursée plusieurs fois. Illégitime, injuste et frauduleuse, la dette fonctionne comme un instrument de domination, au seul service d’un système d’usure international. Les pays qui en exigent le paiement sont ceux là mêmes qui exploitent les ressources naturelles et les savoirs traditionnels du Sud. Nous demandons son annulation sans condition ainsi que la réparation pour les dettes historiques, sociales et écologiques.

14 L’eau, la terre, les aliments, les bois, les semences, les cultures et les identités des peuples sont le patrimoine de l’humanité pour les générations actuelles et futures. Il est fondamental de préserver la biodiversité. Les peuples ont droit à une nourriture saine, libre de tout organisme génétiquement modifié. L’autosuffisance alimentaire locale, régionale et nationale est un droit élémentaire ; les réformes agraires démocratiques et l’accès des paysans à la terre sont fondamentaux. Nous soutenons les mouvements paysans en lutte pour la préservation de leurs terres, de leurs forêts, de leur eau, et des conditions de vie correctes.

15 Le sommet de Doha a confirmé le caractère illégitime de l’OMC. Son "agenda de développement" ne défend que les intérêts des multinationales [...]. Pour nous, la nourriture, les services publics, l’agriculture, la santé et l’éducation ne sont pas à vendre. Nous rejetons le brevetage et le commerce du vivant. L’OMC relaie ce programme global par des traités régionaux de libre échange et des accords sur les investissements. En protestant et en se mobilisant massivement contre l’ALCA, les peuples expriment leur rejet de la nouvelle colonisation que constituent ces accords de destruction de droits et de valeurs fondamentales, sociales, économiques, culturelles et environnementales.

16. Nous renforcerons notre mouvement en menant des actions et des mobilisations communes pour la justice sociale, pour le respect des droits et des libertés, pour la qualité de la vie, l’ égalité, la dignité et la paix : En résumé, nous luttons :
- " pour le droit des peuples à connaître et critiquer les décisions de leur propre gouvernement, particulièrement en ce qui concerne leur politique au sein des institutions internationales. Alors que nous luttons pour l’établissement d’une démocratie électorale et participative dans le monde, nous insistons sur la nécessité de démocratiser les Etats et les sociétés, de lutter contre les dictatures.
- " pour l’abolition de la dette externe et les réparations,
- " pour contrer les activités spéculatives, par la création de taxes spécifiques telles que la taxe Tobin et l’abolition des paradis fiscaux,
- " pour le droit à l’information,
- " pour les droits des femmes contre la violence, la pauvreté et l’exploitation,
- " pour la paix, nous affirmons le droit de tous les peuples à la médiation internationale avec la participation d’acteurs de la société civile indépendants. Contre la guerre et le militarisme, contre les bases et les interventions militaires étrangères, et l’escalade systématique de la violence, nous privilégions le dialogue, la négociation et la résolution non violente des conflits.
- " pour le droit des jeunes à l’accès à une éducation publique gratuite, à l’autonomie sociale et pour l’abolition du caractère obligatoire du service militaire,
- " pour l’autodétermination de tous les peuples, en particulier des peuples indigènes.

Nous allons organiser des mobilisations collectives :
- 8 mars, journée internationale de la femme.
- 17 avril, journée internationale de la lutte paysanne.
- 1er mai, fête du travail.
- 7 octobre, journée mondiales des sans abri.
- 12 octobre, à l’appel des exclus(es).
- 16 octobre, journée mondiale de l’alimentation.

Rappel des mobilisations globales en 2002 :
- 15-16 mars à Barcelone, sommet des chefs d’Etats de l’U. E.
- 18-22 mars à Monterrey, le financement du développement.
- 1er mai, journée d’action sur le militarisme et pour la paix.
- 17-18 mai à Madrid, sommet Amérique latine et Caraïbes.
- Mai à Shangaï, banque asiatique de développement.
- Fin mai à Djakarta, préparation de Rio + 10.
- 8-13 juin à Rome, sommet mondial de la FAO.
- 21-22 juin à Séville, sommet des chefs d’Etat de l’U. E..
- Juillet à Toronto et Calgary, sommet du G8.
- 22 juillet : campagne américaine contre Coca Cola.
- Fin août à Johannesbourg, Rio + 10.
- Septembre à Copenhague, sommet Asie-Europe (ASEM).
- Octobre à Quito, forum "une nouvelle intégration est possible".
- Novembre à La Havane, rassemblement contre l’ALCA
- Novembre à Mexico, conférence ministérielle de l’OMC.
- Décembre à Copenhague, chefs d’Etats de l’U. E.


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