Pourquoi ?


par  C. CHILARD
Publication : février 1985
Mise en ligne : 2 mars 2009

Pourquoi le « pouvoir d’achat » n’est-il « donné » qu’à ceux qui peuvent - encore - «  vendre leur travail ?... ou à ceux qui « spéculent  », grâce à un patrimoine plus ou moins héréditaire  ? Les paumés : chômeurs, invalides, préretraités et autres n’ont que de maigres « allocations » pour «  survivre »... ou mourir. Et cependant on accumule des montagnes de « produits consommables », et on pourrait en produire beaucoup d’autres. Pourquoi cette misère dans l’abondance rendue possible ?
Pourquoi ne pas songer à une vaste « mutation sociale » quand, se tournant vers le fossé (quelques fois dans notre propre vie) on remarque combien de « révolutions » ont secoué les civilisations, lointaines et proches ?... Cependant les «  lois économiques » sont restées immuables... C’est toujours le « marché », l’argent, la spéculation... et... la misère pour le plus grand nombre. Pourquoi cette «  imagination débordante et accélérée », d’un côté... et ce « refus » d’aller jusqu’au bout... de l’autre ?... Sans remonter à la « guerre du feu », ni même à « Jacquou le croquant », je peux parler, personnellement, de ce que j’ai vu, depuis 1914 : l’extension de la machine à vapeur, de l’électricité, de l’automobile, de l’avion, du confort de l’habitat (l’eau sur le lavabo, la salle de bains, les w.-c. dans l’appartement, le chauffage central, les armoires frigorifiques et congélateurs, le téléphone à domicile, les machines à laver, et tous les gadgets de la vie moderne), sans oublier les ordinateurs, les robots, les petites merveilles de l’électronique... et ce n’est pas fini... que sera la «  vie domestique » dans 20 ans, dans 100 ans et plus ?
Pourquoi les terres ne sont-elles exploitées qu’à 40 % environ ? 3 milliards d’hectares pourraient encore être cultivés (Science Advisory Committee).
Pourquoi les machines ne travaillent-elles pas 24 heures sur 24 ?
Pourquoi freine-t-on des inventions nouvelles et leurs applications, qui apporteraient encore de meilleures techniques et plus de «  produits abondants » à répartir entre les hommes  ».
Si 80 % de terriens ne mangent pas à leur faim (certains en meurent) pourquoi dépense-t-on gros pour aller chercher quelques cailloux sur la lune ? Rôder autour de la terre , de Vénus, de Mars, de Jupiter, etc. Construire des fusées qui pourraient détruire 10 fois notre planète. Nous, on veut bien privilégier les promenades dans le ciel ; mais ne peut-on pas, aussi, privilégier les... terriens ?
L’Etat subventionne les entreprises et l’agriculture, pour maintenir leurs activités et... leurs bénéfices. Pourquoi ne donnerait-il pas aux « consommateurs » les « moyens » d’absorber les produits et services rendus abondants, grâce au machinisme ?
La « guerre industrielle » amène les usines à se « moderniser » sans arrêt, c’est-à-dire à s’équiper de machines de plus en plus complexes et performantes, qui diminuent le travail des hommes. La production s’accroît, l’emploi, lui décroit. Les consommateurs n’ont plus assez «  d’argent » pour « vivre ». Il y a « récession  », « surproduction apparente », méventes, stockages et... « crise ». On ferme des usines. On « liquide  » de nouveaux travailleurs, consommateurs, d’où nouvelles « méventes », nouvelle récession, nouveau chômage, aggravation de la « crise »... ; de «  peau de chagrin » en peau de chagrin, ce pourrait être la fin d’une civilisation. Seule une petite « caste » s’en sort (et s’en sort bien) ; pour la masse... c’est la misère... alors que l’abondance pour tous est à la portée de la main. Quelle ironie !!!
Entre l’inflation et le... chômage, entre la « surproduction  » des marchandises « invendables »... et la famine dans le monde... pourquoi nos « économistes distingués  » et autres « experts reconnus » naviguent-ils de Charybot en Scylla, sans trouver les moyens de « distribuer »... ce qu’ils ne peuvent plus « vendre ».
Pourquoi ces millions de chômeurs ? Il faut donner une occupation « rémunérée » à chaque personne, une aide optimale aux jeunes et aux handicapés, une retraite convenable aux vieux.
Et pas 36 solutions : il faut partager l’emploi... Et ce n’est pas 35 heures par semaine qu’il faut retenir, mais pourquoi pas, tout de suite, 28 heures (plus tard 21 heures, voire 14 heures...) 28 heures ; c’est 3 jours et demi de 8 heures, d’où 2 équipes par semaine se relayant auprès des machines qui fonctionneront donc 7 jours (au lieu de 5) ce qui accentuera l’abondance à répartir... Et pourquoi ne pas maintenir, pour 28 heures de travail par semaine, une rémunération au moins égale ; mais sous deux formes. L’une thésaurisable, comme actuellement, l’autre «  fondante » disparaissant avec l’acquisition des denrées de première nécessité et biens de consommation courante, lesquels s’entassent actuellement, à grand frais (du contribuable) dans des entrepôts ?... Cette dernière «  monnaie fondante » de consommation ne serait plus basée sur des milligrammes d’or, ou sur le cours du dollar ou de l’écu  : mais pourquoi ne correspondrait-elle pas tout bonnement aux produits de base à répartir, ceci selon les critères du plan, après avis des Conseils économiques régionaux et mondial ?
Quand je me promène de la préhistoire à nos jours, je, ne vois que des progrès ! Quand je me promène dans Aujourd’hui, je ne vois que des... Contradictions... et je pense qu’il y a pourtant tant de progrès à réaliser encore. Pourquoi les freinerait-on ?
Pourquoi cette « ridicule » danse devant des buffets... pleins à craquer ?