Précisions sur l’inflation
Publication : février 1981
Mise en ligne : 15 octobre 2008
Le premier paragraphe du « Fil des Jours » du mois dernier (G.R. n° 785) m’a valu une longue lettre de notre camarade Maurice Laudrain dont je donne l’essentiel ci- dessous :
« A mon avis, ce qu’il faut reprocher à Barre, ce n’est
pas la phrase que vous citez mais tout ce qu’il ne dit pas. L’abondance
n’existe pas dans un pays qui exporte plus de 40 % de sa production
alors que sa croissance est autoritairement limitée.
Si Giscard et Barre organisent « l’austérité »
des masses populaires - et cela est indéniable - c’est pour permettre
aux entreprises exportatrices d’être en mesure d’exporter plus
de 40 % de la production nationale. D’ailleurs, ils :tee leur ménagent
pas l’aide financière de l’Etat, la nôtre. Etant donné
le taux actuel de la croissance économique qui ne dépasse
pas de beaucoup le 1 %, un tel taux d’exportation n’est possible que
si une grande partie des travailleurs ne disposent plus que de très
faibles revenus. Le gouvernement fait le nécessaire pour qu’il
en soit ainsi. Certains pensent que, cependant, il suffirait que l’Etat
ne limite plus, comme il le fait, les crédits bancaires pour
investissements, pour obtenir un taux de croissance permettant de solvabiliser
l’ensemble des travailleurs et les autres. Mais Barre sait que notre
système financier (il l’expose dans son traité d’économie
politique) engendre inévitablement l’inflation monétaire
par les crédits à long terme.
De plus, dans ce régime il y a encore inflation avec une croissance
zéro, c’est l’inflation par les profits. Le chou à la
crème du pâtissier, qui n’est qu’un petit profiteur, l’illustre
: il multiplie presque par quatre le prix de ce gâteau en le vendant
4 F. Ce coefficient était, en 1965, celui appliqué par
le cartel Saint Gobain-Boussois pour le prix de fabrique du verre à
vitre !
Dans sa brochure « Pourquoi manquons-nous de crédits ?
», Jacques Duboin écrit page 28
« Le danger ne consiste jamais à créer la monnaie
dont les échanges ont besoin dans une économie qui se
développe mais à en créer bien davantage. Si le
volume monétaire croît de 10 % pendant que la production
des biens de consommation demeure la même, il est sûr que
les clients se disputent les marchandises qui sont en quantité
insuffisante : leur prix hausse pour résorber l’argent excédentaire
» ... ». Et page 29 : « Le fonctionnement de notre
système financier provoque lui- même la hausse par l’étrange
manière dont la monnaie nouvelle entre en circulation... Aujourd’hui
toute monnaie nouvelle a son origine dans les écritures comptable
des banques qui accordent des crédits... ».
Ne laissons donc pas croire aux camarades qui nous lisent qu’il y a
actuellement abondance. Non, celle- ci part à l’étranger
et on fabrique la rareté pour conserver une société
capitaliste.
Mais, comme toujours, c’est le maintien d’un tel régime, si contraire
au bien public, qu’il faut dénoncer. Et là dessus, nous
sommes vous et moi bien d’accord. »
Afin de raffermir les connaissances économiques de nos lecteurs, nous leur conseillons vivement de se procurer l’ouvrage de Maurice Laudrain « Sortir de la Pagaille ». Ils y trouveront, entre autres choses, la description du mécanisme de l’inflation monétaire par les crédits à long terme. Le tableau de la page 35 permet notamment de constater une étonnante relation entre les crédits d’investissement et la hausse des prix.