Vauban, reviens-nous vite !
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Publication : avril 2019
Mise en ligne : 2 juillet 2019
Certes, l’Histoire ne se répète pas, mais le passé peut aider à comprendre le présent. S’intéressant à Vauban, Michel Berger a été frappé par l’actualité de ce que cet architecte renommé, ne se limitant pas à sa spécialité, a observé, dénoncé et proposé. Ce qui fait apparaître, au-delà des siècles, une étonnante similitude entre le gouvernement actuel et … celui du Roi-Soleil !
Les citations en italiques sont tirées d’une des premières éditions de la dîme royale, imprimée dans la clandestinité après son interdiction. Le style, la grammaire et l’orthographe y sont respectés.
Dans un précédent article, j’avais reproché à Emmanuel Macron son manque de vision d’avenir et critiqué la gestion trop quotidienne de sa politique : je n’y voyais que de petites interventions parfois contradictoires, souvent de natures purement fiscales et très marginales en regard des mutations politique, écologique, économique qui nous attendent.
Il se trouve que je me suis intéressé, un peu par hasard, à Vauban, en partie par curiosité professionnelle pour le symbole qu’il représente à mes yeux de “l’honnête homme” du XVIIème siècle : on pouvait être, à cette époque, ingénieur, architecte, urbaniste tout en étant ouvert à l’économie. L’étendue des connaissances dans chacun de ces domaines était suffisamment limitée pour qu’un seul homme puisse les embrasser à peu près toutes.
Aujourd’hui, on ne peut être que spécialiste. Toute tentative d’universalité se traduit chez une seule personne par une accumulation d’incompétences. Et cependant, je reste persuadé que l’avenir de notre monde, où tout est étroitement imbriqué, n’aura pas de solutions partielles. À défaut d’un savoir universel, la curiosité peut être vaste.
Est-ce le cas chez ceux qui nous gouvernent ?
Vauban m’intéresse aussi car la France du XVIIème siècle, soumise au pouvoir absolu du roi, ne m’a pas semblé si éloignée de la nôtre.
On retrouve dans ces deux époques un pouvoir en apparence peu soucieux de comprendre la France. Une France où toutes les décisions sont centralisées, prises par une petite coterie dévouée au pouvoir. La France qui n’est rien, accablée de contraintes, de taxes, d’impôts, de sujétions imposées. Celle que les services publics abandonnent, qui s’oppose aux « premiers de cordées » objets de toute l’attention du pouvoir : comme s’ils étaient les seuls susceptibles d’entraîner le peuple vers le progrès, la croissance et des mondes prétendus meilleurs !
Que vient faire Vauban dans ce contexte, mise à part sa qualité d’honnête homme ? On le connaît surtout pour ses innombrables interventions sur les fortifications du royaume. Mais en quoi la poliorcétique pourrait-elle nous être utile ? Les conflits modernes font appel à des armes inconnues à cette époque et ils se résolvent moins souvent par des sièges de cités.… Encore qu’au moment où j’écris ces lignes, le siège de Baghouz conduise aux mêmes horreurs : écrasement de populations civiles devenues faméliques, destruction des sites et des patrimoines, mises à mort des derniers défenseurs.
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Mais Vauban est moins connu comme auteur de La Dîme royale, texte qui se révèle pourtant d’une brûlante actualité. Auteur aussi des oisivetés, écrites sur de multiples sujets à ses moments de liberté ou pendant ses voyages qui lui prenait beaucoup de temps.
En avançant de 20 km par jour, on avait le temps de réfléchir et d’observer les Français.
Vauban économiste est donc moins connu que Vauban ingénieur militaire, et pourtant, outre sa connaissance approfondie de l’état du pays, il appartenait à la mouvance humaniste initiée déjà depuis près de deux siècles.
Vauban connaissait mieux que personne la population française de l’époque. Ses déplacements d’une place forte à l’autre le menaient sur les chemins du royaume. Ils occupaient une bonne partie de son temps. On estime qu’il voyageait en moyenne cent cinquante jours par an et n’était chez lui qu’à peine plus de trente jours. Il avait équipé une chaise à porteur, emmenée par deux mules, d’un bureau partagé avec un secrétaire, bureau sur lequel il écrivit de nombreux rapports consacrés aux places fortes qu’il inspectait. Et peut être aussi des passages de La Dîme royale et les textes rassemblés sous le titre oisivetés.
Il avait donc tout loisir de prendre connaissance des paysages, des modes de culture et des façons de vivre des habitants.
Connaissance que l’on retrouve en particulier dans la préface de La Dîme royale : « Il interrogea, dit Fontenelle, les hommes de tous les rangs, de toutes les professions, de toutes les classes, sur la valeur et le rapport des terres, sur les divers modes de culture, sur le taux des salaires, sur la nature des subsistances servant à l’alimentation des paysans ».
La description par Vauban de l’état de la France du XVIIème siècle présente d’étranges résonances avec ce que nous vivons : « Par toutes les recherches que j’ai pu faire, depuis plusieurs années que je m’y applique, j’ai fort bien remarqué que dans ces derniers temps, près de la dixième partie du peuple est réduite à la mendicité, et mendie effectivement ; que des neuf autres parties, il y en a cinq qui ne sont pas en état de faire l’aumône à celle là, parce qu’eux-mêmes sont réduits, à très peu de choses près, à cette malheureuse condition ; que des quatre autres parties qui restent, les trois sont fort malaisées et embarrassées de dettes et de procès ; et que, dans la dixième, où je mets tous les gens d’épée, de robe, ecclésiastiques et laïques, toute la noblesse haute, la noblesse distinguée et les gens en charge militaire ou civile, les bons marchands, les bourgeois rentiez et les plus accomodez, on ne peut pas compter sur cent mille familles, et je ne croirais pas mentir quand je dirois qu’il qu’il n’y en a pas dix mille, petites ou grandes qu’on puisse dire être fort à leur aise… »
Cette répartition de la population n’est pas très éloignée de celle que nous constatons. Elle se retrouve très voisine chez Thomas Piketty, trois siècles après, malgré plusieurs révolutions, cinq républiques successives, deux guerres mondiales. Le monde, et en particulier la France, demeure toujours aussi inégalitaire.
Le constat fait par Vauban est aussi pertinent de nos jours : complexité du système fiscal et ambiguïté sur ses finalités. Doit-il avoir pour objet de financer les dépenses de l’État, ou celui d’intervenir sur l’économie pour servir des objectifs politiques ?
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Le premier impôt dénoncé par Vauban fut la taille, sorte d’impôt sur la fortune destiné au départ à financer les armées du roi. Sa justification était d’assurer la protection du peuple, il était donc payé seulement par le tiers-état, les aristocrates, étant censés se protéger par eux-mêmes, en étaient dispensés.
Le calcul était parfaitement arbitraire, déterminé par « les sergents du roi » ou par les assemblées provinciales dans les régions qui avaient une certaine autonomie.
Du temps de Vauban, les guerres étaient constantes, coûteuses et la taille de plus en plus lourde pour les plus pauvres. C’était comme si, de nos jours, les forces de l’ordre devaient être financées par les gilets jaunes. Cette idée remporterait de toute évidence un franc succès. On en était à peu près là. D’autant qu’à la taille s’ajoutait la dîme du clergé, payée en nature à raison du dixième des récoltes, la gabelle imposée sur le sel. Et puis les droits de douane au franchissement des frontières régionales, des droits de péage sur certains ponts. Bref, tout un arsenal qui ne faisait qu’augmenter en pesant toujours sur les mêmes, avec des dérogations croissantes au seul bénéfice des plus puissants.
À ce système complexe et injuste, dont la perception était coûteuse et le rapport financier assez limité en raison des multiples dérogations dont il était l’objet, Vauban opposa la perception d’un impôt très simplifié pesant sur le revenu de tous les habitants, les plus pauvres comme les plus aisés. Impôt progressif alourdi sur les hauts revenus.
Son taux était, dans l’esprit de Vauban, fixé au vingtième pour les plus pauvres et au dixième pour les plus riches. Il s’agissait d’une progressivité réelle, même si elle n’était pas considérable. Cet impôt n’était pas confiscatoire, relativement facile à percevoir et Vauban assurait, selon ses propres calculs, qu’il rapporterait plus à l’État que le système coutumier, très complexe.
Toutes ces suggestions pertinentes furent donc exposées à Louis XIV… qui les reçut avec le même désintérêt qu’Emmanuel Macron pour le rapport Borloo.
En pire même, puisque tous les exemplaires imprimés de la dîme royale ont été détruits et la réimpression interdite. Elle avait bien sûr le grand tort de faire peser la charge fiscale un peu plus sur les riches et un peu moins sur les pauvres, ce qui ne plut pas beaucoup aux oligarques du moment, et la cour du Roi Soleil en était pleine.
Qu’aurait pensé Vauban de notre système fiscal ? Et, en premier lieu, de la TVA, devenu le prélèvement fiscal le plus rentable pour les finances de l’État ? La TVA est particulièrement inégalitaire. C’est une évidence bien connue : pour celui qui dépense la totalité de ses revenus et dont les capacités d’épargne sont nulles ou trop faibles, la TVA lui en ponctionne 20%. À l’inverse, pour celui qui n’en dépense que la moitié, la TVA ne lui en retranche que 10%. C’est donc un impôt dégressif alors que pour être juste il devrait être progressif.
Vauban avait bien décelé l’incidence négative d’une imposition excessive sur la production de richesses. À l’époque, elles étaient en grande partie de source agricole et Vauban s’étonnait qu’entre plusieurs de ses passages successifs, à quelques années d’écart, les productions agricoles aient diminué : « L’autre cause de cette diminution est le défaut de consommation, qui provient principalement de deux autres, dont une est la hauteur et la multiplicité des droits des aydes, et des doüanes provinciales, qui emportent souvent le prix et la valeur des denrées, soit vin, bière et cidre ; ce qui a fait qu’on a arraché tant de vignes, et qui par les suites fera arracher les pommiers en Normandie, où il y en a trop par rapport à la consommation présente de chaque païs, laquelle diminuë tous les jours… »
- Les taxes payées en fonction du revenu, en France, en 2018.
- La dégressivité de l’impôt concernant les 10% les plus riches apparaît d’autant mieux sur ce schéma que ce qui les concerne a été largement détaillé, s’étalant sur les 5 dernières colonnes et non sur une seule comme c’est le cas pour les autres 90% de la population.
La fiscalité selon Vauban
Pour rester dans le domaine de la fiscalité exploré en détail par Vauban, trois sortes d’assiette sur lesquelles déterminer le montant des prélèvements demeurent encore valides de nos jours : les revenus, la consommation et le capital. Pour Vauban, l’impôt sur le revenu était représenté par la dîme, dont la dîme ecclésiastique au bénéfice de l’Église. Celui sur la consommation, par la gabelle, impôt sur le sel, consommé en abondance car c’était à l’époque le seul moyen d’assurer la conservation des aliments périssables. Enfin l’impôt sur le capital était essentiellement la taille, indexée sur la valeur théorique du capital foncier et immobilier.
• L’impôt sur le revenu avait, de loin, la préférence de Vauban, d’où la proposition de la dîme royale allant de 5 % des revenus pour les plus pauvres à 10 % pour les plus aisés. Le montant en était donc fonction des revenus et relativement progressif. Un taux maximum de 10 % nous laisse rêveurs, mais il devait selon les prévisions de Vauban assurer les besoins collectifs, à l’époque surtout ceux de la guerre.
Vauban n’était pas ignorant des conséquences de ce type d’impôt : en particulier une réduction volontaire de la production de richesses.
On peut supposer que la corruption et les multiples exemptions dont bénéficiaient les plus riches auraient dû être en grandes parties éradiquées. C’était inscrit en filigrane dans les propositions de Vauban, d’où leur refus par les aristocrates et les courtisans, refus entériné par le roi et qui valut au Maréchal la disgrâce dont il souffrit beaucoup dans sa dernière année.
• L’impôt sur la consommation, tel que nous le connaissons à travers la TVA, n’existait pas sous la même forme. Il se portait essentiellement sur le sel, qui jouait un rôle particulier dans la vie domestique de l’époque, avec de multiples variantes selon les provinces que Vauban visitait. Il était facile à mesurer car, l’extraction du sel étant déjà de caractère industriel, il était distribué par un nombre relativement restreint de producteurs. Cette situation engendrait des monopoles qui conduisirent Vauban à proposer la création d’une entreprise publique, seule capable de réguler la distribution du sel : « la seconde chose à faire est que le roi achète et s’approprie les fonds de toutes les salines du royaume. Après quoi, il les faudrait réduire à la quantité nécessaire la plus précise qu’il serait possible, eu égard aux consommations des peuples et à ce qu’on peut débiter de sel aux étrangers, et supprimer les autres… »
• Enfin le principal impôt sur le capital se résumait à la taille, honnie par Vauban, il en avait décelé l’injustice et la perversité : « en un mot, (les charges) en sont devenues arbitraires, n’y ayant point de proportion du bien du particulier à la taille dont on le charge. Elles sont de plus exigées avec une extrême rigueur, et de si grands frais, qu’il est certain qu’ils vont au moins à un quart du montant de la taille. Il est même assez ordinaire de pousser les exécutions jusqu’à dépendre les portes des maisons, aprés avoir vendu ce qui étoit dedans ; et on en a vû démolir, pour en tirer les poutres, les solives et les planches qui ont été venduës cinq ou six fois moins qu’elles ne valoient, en déduction de la taille ».
Vauban s’insurgeait surtout sur les conditions brutales de recouvrement de l’impôt. Mais il avait bien perçu aussi la difficulté d’estimer la valeur du capital, mobilier et immobilier. Car le capital est par essence spéculatif, même si au départ il correspond à la création d’outils de production. Ce qui signifie que sa valeur se modifie en fonction des charges qui lui sont imposées. Augmenter l’impôt en diminue la valeur et il y a une certaine incongruité à réduire l’assiette d’un impôt quand on augmente son taux de prélèvement.
Qu’aurait dit Vauban de notre système économique ?
Il se serait d’abord insurgé contre la complexité des taxes, impôts et contributions diverses qui nous assaillent. Certes, une contribution n’est pas une taxe, ni un impôt, ce qui permet à nos ministres des finances d’annoncer fièrement un gel des impôts tout en augmentant en sous-main quelques taxes ou contributions.
Le bon peuple peut en être dupe un certain temps, mais il est vite sensible à la réduction de son pouvoir d’achat.
Vauban aurait aussi critiqué les innombrables exemptions catégorielles ou les compensations multiples dans lesquelles personne ne se reconnaît, avec les innombrables effets de seuil qui incitent à la dissimulation.
Qu’aurait-il dit enfin de l’instabilité des lois et règlements qui font perdre tout crédit aux promesses de l’État ? Il se plaignait déjà de l’insupportable complexité des circuits administratifs : « Car il faut parler à tant de bureaux pour transporter les denrées, non seulement d’une province ou d’un païs à un autre, par exemple de Bretagne en Normandie, ce qui rend les François étrangers aux François mêmes, contre les principes de la vraye politique, qui conspire toûjours à conserver une certaine uniformité entre les sujets qui les attache plus fortement au prince ».
Il aurait probablement réagi aussi contre les privatisations annoncées d’Aéroport de Paris et de la Française des Jeux ! Tout a été dit sur le sujet et la justification avancée : permettre à l’État de réduire sa dette et d’investir dans la transition écologique, ne tient pas. Mis à part le souci louable de réduire la dette publique et de satisfaire aux critères de Maastricht, dans une situation où le taux d’emprunt est à peu près nul alors que l’on prive l’État de ressources. Le vieil adage : « au privé ce qui rapporte, et au public ce qui coûte » apparaît ici pleinement de circonstance. Vauban s’en serait certainement indigné.
Aurait-il été acteur du mouvement écologique ? — Difficile à dire, la nature était encore la plus forte et la vraie difficulté consistait surtout à mettre en valeur les terres pour leur permettre d’assurer la subsistance du peuple. Les famines n’étaient pas exceptionnelles malgré une population qui ne dépassait pas quinze ou vingt millions d’habitants, au dire de Vauban. On peut penser que ses préoccupations sociales, sa volonté de mise en valeur du territoire et son souci de résorber les inégalités font partie de l’écologie moderne.
Sa volonté d’assurer la sauvegarde du “pré carré” du roi de France, en confortant toutes les fortifications en limite du royaume, pourrait le situer dans la mouvance populiste. Mais la France du XVII ème siècle avait beaucoup de points communs avec notre Europe, elle était composée d’une multitude d’entités de statuts différents : duchés, comtés, évêchés, chacune d’entre elles ayant des langues, parfois des armées, des ressources fiscales, voire des monnaies différentes. Elles étaient toutes soumises à une charte définissant leur rapport de vassalité avec le roi. Charte qui pourrait ressembler de nos jours avec ce qui nous lie à la Communauté Européenne. Charte parfois contestée, avec des épisodes sanglants comme le fut la Fronde, non sans parenté avec le Brexit.
Vauban a toujours agi avec le souci d’aider Louis XIV à unifier le royaume et de réduire les inégalités et les antagonismes internes. À ce titre on peut supposer qu’il aurait été foncièrement européen. S’il avait eu un rôle, il aurait tenté de mettre en place une réforme fiscale, en premier lieu en France, mais aussi en Europe. Réforme fiscale accompagnée très vite d’une réforme sociale, unifiant les régimes de retraites et d’assurance santé dans les pays européens.
À ces actions devrait être associée une véritable politique unifiée dans le traitement des ressources énergétiques. L’urgence dans ce domaine est grande et l’Europe n’a que peu de temps pour sortir des énergies carbonées. S’affranchir enfin du faux discours sur le nucléaire, dont on proclame l’abandon depuis des années, en reportant de jours en jours de s’y soumettre, sauf en Allemagne ce qui valut à ce pays de devenir, pendant un temps, le plus gros pollueur européen en émission de CO2.
Mais il aurait probablement été plus loin. Car si, dans sa vie, Vauban a tout fait pour prémunir le royaume contre les envahisseurs étrangers, il aurait certainement perçu que, de nos jours, l’ennemi n’est plus à nos portes mais dans nos murs : ce sont les grandes entreprises, les multinationales qui détruisent nos villes, à coup de centres commerciaux pléthoriques, d’infrastructures routières ou aéroportuaires dévorantes, de friches industrielles abandonnées. Celles aussi qui abîment nos paysages en supprimant nos bosquets, nos haies, nos prairies, au profit d’usines à viandes, de champs épuisés par une agriculture intensive, abreuvés d’engrais et de pesticides. Celles enfin qui nous vendent très cher le vent alimentant nos champs d’éoliennes.
Toutes ces pratiques appartiennent à un monde périmé, celui de la concurrence effrénée, du « que le meilleur gagne ! ». Vauban aurait compris, à fréquenter nos territoires, que l’avenir (si l’humanité doit en avoir un) appartiendra à une société du partage, celle en train d’éclore dans de multiples associations locales. Elles se développeraient plus vite si les pouvoirs en place voulaient bien les prendre en considération. Mais c’est une vision idyllique que Vauban aurait eue autant de mal à défendre qu’en son temps la Dîme Royale.
Ce qui devrait faire réfléchir, car c’est moins d’un siècle après son interdiction que la révolution de 1789 entraîna la France dans un épisode brutal qui mit fin à la monarchie. Or le temps s’accélère et il en faudra peut-être moins pour que les classes dirigeantes payent le prix de leur inconscience, de leur frilosité et de leur soumission à l’argent.
Le grand débat en train de s’achever aura-t-il plus d’efficacité que les cahiers de doléances soumis au roi en 1789 ?
On peut s’en inquiéter.