La Révolution bourgeoise
Le "siècle des lumières" engendra
la Révolution ; la misère du peuple à la fin de
ce 18ème siècle déclencha l’accouchement.
Les idées des Encyclopédistes, dont aucun, hélas,
ne verra la Révolution, furent le bouillon de culture des aspirations
des classes exclues des privilèges réservés du
clergé et de la noblesse. Mais la composition même du tiers-état-bourgeois
et peuple du travail (artisans et paysans) fera vite apparaître
l’hostilité entre ses deux composantes dès lors que le
problème de la royauté, après bien des hésitations
et des compromissions, aura été réglé par
la décapitation de Louis XVI. La Convention, entrainée
de ce jour par les purs et durs, notamment Robespierre et Saint-Just,
tente de faire la Révolution du peuple pour le peuple. C’est
compter sans la bourgeoisie, car la Révolution de 1789 a été
faite pour elle : le IX Thermidor met fin à la tentative -idéologiquement
admirable, mais historiquement prématurée- d’élargissement
de la Révolution au peuple laborieux.
La bourgeoisie comprit vite le danger que faisait courir à sa
victoire la corruption de nombre de ses dirigeants d’après Thermidor
: les Barras, Tallion et leurs suppôts. Rapidement elle allait
se chercher un maitre pour faire régner le "nouvel ordre"
bourgeois et garantir son accession "aux affaires" : ce fut
le 18 Brumaire. Il fallait une "épée" sûre
elle aurait pu être celle de Moreau ; ce fut celle de Bonaparte.
On connait la suite : empire et noblesse d’empire, allers et retours
des rois, république éphémère, empire à
nouveau et Ille République.
En résumé, la Révolution de 1789 ne pouvait être
que celle de la bourgeoisie, détenant les moyens de production
et de création de richesses, face aux classes parasites qu’étaient
la noblesse et le clergé, et frustrée de n’avoir pas droit
au "pouvoir", tout simplement parce qu’elle n’était
pas "née". Les développements techniques balbutiaient
et l’heure n’était pas venue pour le peuple du travail - deuxième
volet du tiers-état - d’occuper le pouvoir ; il était
tout juste bon à fournir les bataillons de combat contre l’ennemi
intérieur ou extérieur de la Révolution. Seul Babeuf,
dit Gracchus, tenta encore ("conspiration des égaux")
de forcer l’histoire ; il fut arrêté et exécuté
sous le Directoire en 1797.
L’essor industriel
Le 19ème siècle bourgeois fut celui
de l’essor industriel et de la grande misère des ouvriers des
"fabriques" : emploi des enfants en bas âge, temps de
travail illimité, salaires de misère, chômage endémique,
etc... Parallèlement, cette situation inspira - comme un écho
aux penseurs du siècle des lumières - les grands penseurs
du socialisme au sens large, dénonçant les inégalités
et injustices sociales, s’efforçant d’en expliquer les causes,
et proposant des solutions : Sismondi en Suisse, SaintSimon, Fourrier,
Louis Blanc, Proudhon, en France ; Owen en Angleterre. La liste n’est
pas exhaustive. Quatre d’entre eux avaient connu la Révolution
et l’Empire.
Mais la pensée socialiste atteignit son point de rationalité
maximum avec Marx et Engels : Manifeste du parti communiste en 1848,
"le Capital" en 1867. Le marxisme deviendra dès lors
l’outil essentiel de la lutte des classes des travailleurs contre le
capitalisme la première Internationale fut fondée à
Londres en 1864, la deuxième à Paris en 1889.
La Révolution prolétarienne
Lénine fut le plus remarquable héritier
de la pensée de Marx. Toute sa vie, en Russie ou en exil, fut
consacrée à la deuxième grande révolution,
celle des ouvriers, des exploités. Sans entrer dans les détails,
sons que pour Marx, le socialisme devait historiquement - non sans lutter
certes - prendre le relais du capitalisme parvenu au stade où
il ne pouvait plus sortir de ses contradictions production-distribution.
Mais l’histoire allait s’écarter de la théorie. C’est
en Russie, où la pensée de Lénine - plus précisément
le marxisme-léninisme, sorte de synthèse adaptée
à la situation en Russie - a formé des militants organisés,
qu’éclate la révolution de 1917 (il est vrai au départ
bourgeoise - quelques mois - sous Kérenski). L’évolution
du capitalisme, et donc du prolétariat, étaient limités,
sans être inexistants, et l’agriculture quasi féodale.
Ce n’étaient pas les conditions idéales envisagées
par Marx et Engels pour le meilleur passage du capitalisme au socialisme
(l’expérience se répétera en Chine avec Mao Tse
Toung et dans divers pays moins importants).
Ces conditions par contre étaient réunies dans l’Allemagne
de 1918, où, à la fin de la guerre, se créent des
soviets sur les modèles russes. Un socialiste, Scheideman, proclame
la République le 9 novembre 1918. Et c’est la social-démocratie
qui sera au pouvoir pour réprimer et décapiter la révolution
populaire. Les Alliés, prudents, avaient renvoyé aux dirigeants
allemands l’ascenseur que Bismark avait envoyé à Thiers
en 1871. Les Allemands, vainqueurs, s’étaient alors retirés
aux portes de Paris et avaient laissé à Thiers, réfugié
à Versailles, une armée suffisante pour écraser
la Commune de Paris. Ce qui fut fait dans le bain. de sang et avec la
sauvagerie que l’on sait. Après l’armistice de 1918, les Alliés
laissèrent à l’Allemagne - à ce "boche"
pourtant tant honni et dont la France avait tant souffert - une "armée"
de 100.000 hommes, armée de police bien sûr, sans armes
lourdes, pour écraser la révolution menaçante.
Et de fait, lorsque le groupe Spartacus déclenche l’insurrection
le 5 janvier 1919, la répression est sans pitié : Karl
Liebnecht et Rosa Luxembourg seront assassinés le 15 janvier
sans que les auteurs soient poursuivis. Tenir l’Allemagne hors de la
révolution prolétarienne était l’objectif prioritaire
du capitalisme en 1918-1919. Sinon tout pouvait basculer : Allemagne,
France, Italie, Espagne, etc... Pour la plupart, ces pays avaient une
industrie suffisamment développée pour passer d’une production-distribution
capitaliste à une production-distribution socialiste, évidemment
radicalement différente. Les vrais socialistes de toute nuance
peuvent toujours rêver a posteriori sans ce cadeau de 100.000
soldatspoliciers à l’Allemagne vaincue de 1918, la face du monde
eût pu changer...
Hitler au service de la lutte antisocialiste
La menace allemande écartée, le capitalisme
poursuivit sa lutte anti-socialiste en envoyant de toutes parts des
armées susceptibles de détruire le jeune Etat socialiste
russe : il échoua, partie remise, on verrait plus tard...
Avec Hitler par exemple. En le laissant faire, en le finançant,
en ne réagissant pas à la réoccupation de la Sarre.
Dans "Mein Kampf" Hitler ne cache as son but : détruire
le communisme. t le soir de sa nomination comme Chancelier, le 30 devant
1933, il confirme sa mission devant témoins : « A l’étranger,
aujourd’hui, on m’a traité d’antéchrist, je suis seulement
un antiLénine ». Propos notés par Frank dans ses
mémoires qui précise qu’Hitler, ce soir- là, revenait
toujours sur le communisme dont la destruction était sa mission
historique.
Si Hitler ne s’était pas avéré être un fou
dangereux pour l’humanité tout entière, s’il avait été
un dirigeant "convenable et raisonnable", les pays capitalistes
l’auraient pudiquement laissé attaquer et vaincre si possible
"la patrie du socialisme" ; tout comme, dans des circonstances
comparables, ils avaient, quelques années auparavant, laissé
écraser la révolution populaire espagnole ; écrasement
qui permit à Hitler de commencer à réaliser sa
"mission historique" et de tester ses armes et ses méthodes
de guerre (exemple : Guernica en 1937).
Le demi-siècle qui suit nous amène en 1989. La période
est suffisamment connue et objet de nombreux articles dans la Grande
Relève pour arrêter là - provisoirement du moins
- cet aperçu de la longue marche du socialisme.