Innover en Europe
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Publication : juillet 1989
Mise en ligne : 12 mai 2009
L’Europe qui nous est de toutes parts proposée, repose sur les bases mêmes qui font qu’elle est en état de crise économique perpétuelle, de guerre économique déclarée, de guerre militaire latente. Les rénovateurs arrivent trop tard : on ne rénove pas ce qui s’effondre. On reconstruit. On ne fera pas une Europe saine avec des pays malades. Pour en finir avec la crise, d’abord chez nous, il est urgent d’innover.
Innover, c’est constater que l’état de crise est le résultat d’une utopie tenace et criminelle : la plupart des pays d’Europe, d’Amérique, certains d’Asie, possèdent ou ont créé une abondance de tous les biens qui en fait des pays "riches", mais ils astreignent la distribution de ces richesses à un système économique et financier qui les oblige, sinon à une existence de pays "pauvres", du moins à un régime d’austérité. Parce qu’il est fondé sur la valeur "marchande" de tous les biens récoltés, péchés, produits ou transformés, ce système impose leur rareté pour conserver ou accroitre cette valeur : l’abondance est réduite par la destruction et le vain stockage de nombreux produits alimentaires, par le sabotage de produits industriels afin de réduire leur durée d’usage,
par un protectionnisme grandissant contre les produits "concurrents".
La concurrence est nécessaire dès lors que le but de toute activité est de "vendre", donc d’offrir au meilleur prix une qualité au moins égale pour réaliser un "profit". Si le but des activités humaines n’était plus de réaliser un profit, mais de satisfaire les besoins, la concurrence se réduirait à une meilleure qualité pour un volume à l’échelle des besoins. Serait supprimée cette obligation de la "croissance", imposée par le souci d’assurer "l’emploi", et démentie par les destructions décrites ci-dessus.
Innover n’est pas "répartir le chômage" (comme ne pourra faire une Europe cultivant le mythe du "plein emploi"), c’est le supprimer en assurant à chacun un temps de travail qui, réduit, sera dissocié du revenu. Cette suppression du salariat conduit à la distribution à chacun d’une part du PNB, assurant l’existence de la naissance à la mort, sans taxes ni impôts : le "revenu social".
Innover, c’est mettre fin à l’aberration du marché des changes, qui fait de l’étalon de valeur, qu’est la monnaie, un "étalon variable". Devenue marchandise, cette monnaie met la sécurité et l’indépendance du pays à la merci des spéculateurs étrangers. Le franc inconvertible, c’est-àdire retiré des cotations boursières, sera réservé à la consommation intérieure, les échanges extérieurs étant assurés par la compensation, comme celà se fait déjà avec des pays aux monnaies inconvertibles.
Innover sera d’offrir aux "Verts" la possibilité de réaliser leurs justes voeux, jusqu’à présent bridés par l’argent, nécessaire aux industriels pour combattre leurs pollutions, aux producteurs agro-alimentaires pour assurer le volume désiré sans nuire à la qualité, aux ennemis de la nature en vue d’un bénéfice devenu inutile.
Innover, c’est constater que les cent prétextes de conflit avec l’URSS n’ont pas, depuis 45 ans, déclenché la guerre directe, que l’armement et l’armée sont nuisibles à l’Union Soviétique qui a mieux à faire pour s’élever à un niveau économique acceptable, qu’elle est nourrie du blé de son ennemi potentiel, qu’il est fou de discuter sur quelques ogives, quelques chars et sur l’amélioration d’armes déjà totalement destructrices !
Innover par notre exemple, c’est donner aux conférences sur le désarmement, qui se suivent depuis 45 ans, la certitude d’aboutir enfin positivement : la satisfaction des besoins ayant pris le pas sur celle des profits, la rentabilité et même l’existence des fabrications d’armes disparaissent, l’équilibre de la balance extérieure n’étant plus assurée par les ventes d’armes, la démobilisation ne constituant plus un risque pour l’emploi, la fin des armes et des armées devient possible.
Une nouvelle culture économique permettra le développement de toutes les cultures, à l’échelle des nations et du monde, par une abondance sans restriction, des loisirs plus étendus et mieux remplis grâce à une éducation qui ne sera plus axée sur le "rendement" et la "rentabilité" des efforts des hommes.
La France a exporté les conquêtes de sa première révolution : à elle d’assurer la seconde qui aidera l’Europe à se faire jusqu’à Vladivostok à l’est, autour de la Méditerranée au sud -avec l’Afrique comme partenaire-, dans l’Océan Indien vers l’Asie, puis le Pacifique.