« Exporter ou mourir », c’était,
on s’en souvient, un des fondements de la doctrine économique
du IIIe Reich. On sait où cela nous a conduits, mais cela n’empêche
pas nos dirigeants de reprendre cette rengaine à leur compte
(en supprimant toutefois l’alternative « mourir », rendons
- leur cette justice !). Et tous nos brillants économistes de
nous donner en exemple la République Fédérale Allemande
qui, il faut bien le reconnaître, a réussi à conquérir
de nombreux marchés extérieurs aux pays industrialisés
(pays pétroliers, pays en voie de développement, pays
de l’Est dont les besoins sont considérables).
Seulement, et c’est là que le bât blesse, ces besoins sont
peu solvables, et les clients de la R.F.A. ont un endettement de plus
de 80 milliards de deutschmarks dont plus de la moitié sont dûs
par des pays de l’Est qui demandent sans arrêt de nouveaux crédits.
On voit donc qu’on fait tourner la machine pour l’exportation uniquement
pour donner du travail aux ouvriers allemands, sans que cela rapporte
quelque argent à la R.F.A. On peut se demander d’ailleurs ce
qui se passera si un jour certains pays débiteurs décident
unilatéralement de renier leurs dettes ?
*
De substantiels gains de productivité ont été
obtenus à la S.N.C.F. entre 1955 et 1976 : durant cette période,
les effectifs en personnel ont diminué ; de 99 600, les horaires
de travail sont passés de 48 à 40 heures par semaine,
et le trafic a doublé. Autrement dit, la productivité
du personnel - mesurée en unité de trafic par heure de
travail - a augmenté de 170%.
La S.N.C.F. se propose de continuer son programme de développement
des dispositifs automatiques pour améliorer le débit des
lignes et diminuer les effectifs, tout en renforçant la sécurité.
On constate, bien entendu, le même phénomène dans
toutes les industries modernes et l’on ne peut que s’en réjouir...
A condition d’adapter notre système économique pour que
cet accroissement de productivité et cette sécurité
accrue apportent un mieux-être à tout le monde.
*
Grande-Bretagne : le Prince Philip s’en prend à
l’Etat Providence : « Si l’Etat Providence assure une protection
contre les échecs sociaux, il ne permet pas aux hommes entreprenants
et à ceux qui travaillent dur de réussir comme ils le
méritent ».
En Grande-Bretagne, en effet, les indemnités de chômage
et les prestations sociales, ont augmenté de 16 % alors que les
hausses de salaires ont été beaucoup plus limitées.
Le Prince soutient que l’innovation, le risque et l’esprit d’entreprise
sont incompatibles avec une stabilité et une sécurité
complètes.
A ma connaissance, le Prince bénéficie à la fois
de la stabilité et d’une confortable sécurité.
Que faut-il en conclure ?
Que ce qui est bon pour lui n’est pas bon pour les autres... ou alors,
qu’il ne fait preuve ni d’innovation ni d’esprit d’entreprise ?
*
L’abondance c’est encore et toujours l’ennemi numéro
un :
Alors que le taux de marche de la sidérurgie française
n’est que de 55 %, la Communauté Européenne Economique
a mis au point un plan « anti-crise »
dont le but avoué est d’aboutir à une réduction
ordonnée de la production lorsque la demande fléchit.
La C.E.E. va fixer pour chaque entreprise, ou groupe d’entreprises,
les programmes de production. Oui plus est, la Commission fixerait un
prix minimal au dessous duquel les industriels ne devraient pas descendre
sous peine de sanctions.
*
Notre gouvernement ne manque jamais une occasion d’exhorter
les industriels français à exporter davantage, mais les
gouvernements des pays industrialisés en font autant de sorte
que cela conduit immanquablement à des conflits. Le dernier exemple
en date est celui qui oppose le Japon aux pays occidentaux à
propos de la construction navale, domaine dans lequel le Japon est en
passe de s’assurer la totalité du Marché. C’est ce qui
a conduit M. Raymond Barre, notre Premier ministre, à déclarer
: « Il faut que la concurrence soit loyale et que les pays qui
disposent d’avantages particuliers ne les utilisent pas de façon
néfaste... J’espère que le japon qui exerce une pression
suffisamment forte pour mettre en péril des pans entiers de l’industrie
européenne, comprendra qu’il est de son intérêt
de tenir compte des problèmes des autres ».
Quelqu’un a dit que le libéralisme économique c’est à
peu près la loi qu’impose un renard dans un poulailler.
Mais que se passe-t-il quand il y a deux renards dans un même
poulailler ?
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Un des critères les plus sûrs pour évaluer
l’importance de l’innovation technologique sur l’économie est
la productivité on constate depuis la dernière guerre
mondiale que la productivité a toujours augmenté.
Faut-il donc s’étonner si, partout dans les pays industrialisés,
le chômage augmente ?