25 Mai : le coup d’envoi
par
Publication : juillet 1985
Mise en ligne : 13 mars 2009
Le colloque organisé le 25 mai à Paris
a réuni une cinquantaine de « fidèles de la Grande
Relève », venus souvent de loin, Toulouse par exemple.
Six camarades belges n’avaient pas hésité à faire
le voyage aller-retour dans la journée.
Les retrouvailles ont été chaleureuses : 30, 40 voire
50 ans de militantisme n’ont pas altéré la foi des lecteurs
de la G.R. dans l’économie distributive, seule solution à
la crise de l’économie capitaliste, l’économie de marché.
C’est ce que rappela Marie-Louise Duboin dans son allocution de bienvenue,
dont voici quelques points forts : « Pourquoi cette réunion
? C’est surtout une réunion de travail qu’on entreprend. Elle
a lieu parce qu’un très grand nombre de gens nous ont écrit
en disant : « on veut se rencontrer, on veut bien faire une action
dans notre coin, mais rien ne vaut le travail qu’on peut mettre sur
pied ensemble. On a envie de se voir ».
« Il y a d’autre part le fait que beaucoup de gens se rendent
compte que les choses sont beaucoup plus prêtes qu’elles ne l’étaient
il y a quelques années encore... Il n’y a que depuis 3 ou 4 ans
que les gens commencent à admettre que la crise décrite
par J. Duboin depuis 50 ans est une crise structurelle. Gauche ou droite,
personne ne trouve une solution, personne n’arrive à sortir du
système. C’est vraiment nous qui avons quelque chose à
proposer ; il faut donc le faire. C’est pour cela que vous êtes
là.
Je voudrais saluer tous les gens qui sont distributistes depuis de très
longues années et leur dire que cela prouve que le distributisme
conserve. Vous avez tous suivi l’exemple de J. Duboin qui jusqu’à
94 ans a continué à écrire. Je crois qu’il n’a
été battu que par Jules Leclerc qui, lui, a tenu jusqu’à
99 ans. Donc vous avez de la marge...
Et puis je constate qu’il y a la relève, il y a enfin des jeunes !
Vous allez donc aujourd’hui mettre sur pied une action ; vous êtes
venus pour cela. Mais je voudrais souligner qu’il n’y a pas d’action
sérieuse possible s’il n’y a pas, parallèlement, je dirais
en même temps, un travail de réflexion, une étude
constante de ce qui se passe, de ce qui se fait, de ce qui se dit.
... La partie réflexion, vous avez compris que c’est la Grande-Relève
qui est là pour ça, c’est son rôle. Je m’engage
à maintenir ce support solide qu’il faut à toute action.
Donc c’est vraiment sur le parallélisme entre votre action et
le travail de base que se propose de continuer la G.R., qu’il faut essayer
de tabler pour rendre efficaces les débats d aujourd’hui ».
***
André PRIME, après la mise au point
d’ordre pratique, rappelle l’ordre du jour : « Autour du thème
: comment, à la faveur de la deuxième grande crise du
capitalisme, faire connaître nos thèses et faire en sorte
qu’elle finissent par s’imposer comme la seule solution possible ?
Il s’agit d’examiner les objectifs et les moyens sur deux périodes,
le court terme - 1 an - et le moyen terme - 5 ans -, le long terme n’étant
pas à l’ordre du jour.
En outre - c’est une nécessité permanente - étudier
en détail la crise (dont l’aspect le plus marquant est le chômage)
et surtout, les modalités de passage à l’Economie Distributive.
Il est, en effet, déterminant que notre réflexion « creuse »
ce problème sur lequel, il faut bien le reconnaître, notre
argumentation achoppe le plus souvent lorsque nous voulons convaincre.
Pour répondre au découragement qui parfois se manifeste
après tant d’années d’attente et de lutte - même
si la foi dans les principes reste intacte - André PRIME insiste,
après M.L. DUBOIN, sur le fait que la période est propice
au développement de nos thèses, comme après les
années 30. Si les 30 glorieuses » ont un peu occulté
l’inéluctabilité d’une économie distributive pour
sortir du capitalisme, la crise qui dure maintenant depuis plus de 10
ans rend notre raisonnement plus crédible que jamais.
En effet, le chômage croit (+14% en 1984 en France) avec l’augmentation
de la production. Aucun gouvernement - de droite ou de gauche - ne peut
résoudre ce problème crucial dans le cadre de l’Economie
de Marché.
Et le mythe de la reprise américaine - « de la sortie de
la crise » - s’effondre au bout de 2 ans à peine. Les résultats
du premier trimestre 1985 confirmant magistralement nos analyses =+0,70
% seulement au lieu des 4% attendus (10% au premier trimestre 1984).
Et cela, avec un budget militaire considérable : 8,5% du P.N.B.
et quel P.N.B.! alors que les budgets militaires européens sont,
eux, de l’ordre de 4% du PNB. C’est pourquoi, il faut absolument se
préparer en un an à devenir un centre d’explication et
d’accueil pour tous les déçus de la gauche. Et en France,
ils seront légion, sûrement, en mars 86.
***
Les intervenants ont été nombreux et
le temps a manqué pour donner lecture des propositions de camarades
qui n’avaient pu venir. Qu’ils se rassurent : la richesse des exposés
et débats a permis de reprendre l’ensemble de leurs suggestions.
Les débats ont été très fournis et souvent
passionnés ; même s’ils s’écartaient parfois du
sujet exposé. Ce n’est pas grave : cela prouve la richesse de
la pensée des distributistes, leur besoin, à l’occasion
de ces retrouvailles, d’exprimer leur réflexion personnelle,
leur expérience.
La place et le temps ne nous permettent pas de reprendre ici les interventions
et débats. Ils se trouvent résumés dans la synthèse
qui suit et, comme nous avons tout enregistré sur magnétophone,
nous allons , pouvoir retranscrire - c’est un long travail - et nous
pourrons y revenir pour en développer les idées les plus
intéressantes.
En fin d’après-midi nous avons donc tenté une synthèse
des objectifs et moyens, en tenant compte raisonnablement de nos possibilités.
" L’objectif N° 1, à court terme,
c’est que chaque lecteur de la G.R. convainque au minimum une personne
- jeune de préférence car il faut impérativement
assurer la relève (La Grande Relève !). Mais c’est vraiment
le strict minimum. Les lecteurs actifs viseront un objectif plus élevé
: 3, 5, 10 personnes.
Parallèlement voir l’allocution de bienvenue de M. L. DUBOIN
- ces nouveaux « adeptes de l’E.D. s’abonneront à la G.R.,
et cela fera boule de neige : nouvel adepte - nouveau lecteur G.R. -
nouveau (x) adepte (s) - nouveau (x) lecteur (s) G.R. etc...
Les « cibles » : chômeurs, jeunes, socialistes, syndicalistes, verts etc... Un camarade a émis une idée d’un grand intérêt : « toucher » les entreprises où il est question de licenciements ou fermeture. Le même camarade, par contre, militant à la CFDT, nous a dit combien, même dans un tel syndicat, auprès des ouvriers, nos thèses rencontraient peu de compréhension, quand ce n’est pas une hostilité. Ce qui prouve que la tâche n’est pas facile ; il faut cependant persévérer.
" Les moyens retenus
- Les tracts existants à la G.R. D’autres tracts à concevoir,
ou simplement ponctuels (ainsi un tract à distribuer à
la manifestation du syndicat des chômeurs le 30 mai, ce qui a
été fait).
- La bande dessinée. La Grande Relève vient d’en éditer
une : ne tardez pas à la commander. M. L. DUBOIN la perfectionnera,
mais elle est très valable dans son premier jet.
N.B. nous avons expérimenté l’efficacité de la
B.D. en distribuant à la manifestation du Syndicat des Chômeurs,
un tract dont le verso était traité en B.D. : on se l’arrachait
!...
- Une brochure de grande diffusion de nos idées (30/40 pages)
comme il en existait au MFA après la guerre. Cette brochure s’appuierait
sur la situation aberrante actuelle et insisterait sur la monnaie, signe
essentiel de la faillite du capitalisme.
Elle doit être réalisée avant la fin de l’année
en principe, au plus tard en février/mars 1986.
- Une cassette magnétophone reprenant en gros le contenu de la
brochure : cela devrait faciliter de petites réunions à
3 - 5 - 10 personnes et permettre un débat.
Plus tard - mais sa confection n’est pas simple - une cassette vidéo,
formule plus vivante que la cassette magnétophone, est prévue.
- Diffusion des livres concernant l’E.D. et notamment :
- LES YEUX OUVERTS de J.DUBOIN
- LES AFFRANCHIS DE L’AN 2000 de M. L. DUBOIN
Chaque lecteur de la G.R. doit avoir à coeur
d’organiser des petites réunions, chez lui ou dans une petite
salle de café ; il faut, dans l’année qui vient, multiplier
cette excellente forme de propagande. Bien entendu, pour avoir un sens,
être efficaces, ces réunions doivent regrouper des non-convaincus.
- Les réunions de plus grande envergure - 20 - 30 - 50 personnes
ou plus ne sont pas interdites, bien sûr ! Au contraire, si un
camarade peut en organiser et a besoin d’un « coup de main »,
nous sommes prêts à aller l’aider.
- A la demande de certains camarades, nous examinerons la possibilité
de présenter des candidats aux élections législatives
de 86 ; non dans l’espoir qu’ils soient élus, mais pour qu’on
parle de nous, qu’on puisse bénéficier des possibilités
officielles des candidats sur le plan des médias : radios locales,
journaux, conférences de presse.
- Tout camarade qui pourra utiliser les radios locales devra le faire
ou nous avertir s’il veut de l’aide.
- Enfin, dans l’année qui vient, il faut « creuser »
l’étude des étapes intermédiaires, comment passer
du régime actuel à l’E.D. ou du moins à une «
amorce ». Faut-il viser l’Europe ? Demande est faite à
tous les gens qui ont assisté au colloque - mais également
à tous les lecteurs de la G.R. - de bien vouloir nous adresser
leurs idées, leurs suggestions.
Attention : il faut être réaliste, ne pas supposer le problème
résolu, ce qui est trop facile et que nous avons trop tendance
à faire.
Pour le moyen terme - 5 ans - il est apparu qu’il était prématuré
de rentrer dans les détails. Si, d’ici un an, nous avons réalisé
ce que nous nous sommes fixés - pour le court terme - une nouvelle
réunion permettra de faire le point et d’étudier de nouveaux
objectifs et moyens : « déçus du socialisme »
(députés non réélus compris) médias,
réunions importantes, élections européennes, etc.
A 5 ans, l’objectif est d’atteindre une audience comparable à
celle qu’ont pu avoir les JEUNES avant guerre (1), ou même le
MFA après la guerre ; pour fixer les idées, celle qu’ont
aujourd’hui les verts, le Cérès, le PSU (même diminué),
le MRG, le syndicat des chômeurs depuis peu.
En bref, que nous soyons connus, reconnus et entendus, sinon encore
écoutés-, comme le disait M. L. DUBOIN dans son allocution,
que nous puissions, la crise perdurant, le chômage s’aggravant,
apporter la seule solution possible à la crise du capitalisme.
A. PRIME
(1) 100.000 adhérents, des sections d’entreprises importantes (250 adhérents chez Renault), un journal hebdomadaire (Libération), des réunions publiques dans des salles comme la Mutualité (2.500 personnes) etc...