Au fil des jours
Publication : octobre 2018
Mise en ligne : 1er février 2019
L’échec des politiques sociales en France
Selon le rapport que vient de publier l’Observatoire des inégalités, le nombre de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté en France augmente depuis dix ans, et cette aggravation est l’un des phénomènes les plus marquants parmi les évolutions analysées par cet observatoire :
En considérant une définition restrictive, c’est-à-dire le seuil de pauvreté situé à la moitié du revenu médian (855 euros par mois), le nombre de personnes pauvres est passé de 4,4 millions en 2006 à 5 millions en 2016.
Et si l’on se réfère au seuil de pauvreté le plus souvent utilisé dans le débat public, à 60 % du niveau de vie médian (1.026 euros par mois), ce chiffre a augmenté de 820.000 au cours des dix dernières années, et c’est près de 9 millions de personnes pauvres qu’il faut compter en France.
La décennie 2000, et plus encore la crise déclenchée en 2008, ont marqué un retournement historique de la tendance : la pauvreté ne diminue plus en France, où le taux de pauvreté est passé de 7,3% à 8 % de l’ensemble de la population.
Ce rapport n’évoque pas une explosion de la misère : « Notre modèle social a pour partie amorti le choc, bien mieux que dans les pays anglo-saxons ou, plus récemment, qu’en Allemagne. La France est le grand pays d’Europe où le taux de pauvreté et la persistance de celle-ci sont les plus faibles. Pour autant, le retournement est significatif, car il s’inscrit dans une histoire longue de diminution du taux de pauvreté, particulièrement marquée dans les années 1970 et 1980 ».
« Il faut bien comprendre ce dont nous parlons », poursuit le rapport. « Le seuil de pauvreté est déterminé en fonction du niveau de vie médian. La mesure de la pauvreté en Europe n’est pas absolue, mais relative. Le seuil de pauvreté à 50 % du niveau de vie médian d’aujourd’hui est deux fois plus élevé, après inflation, que dans les années 1970.
Une augmentation de la pauvreté traduit un écart croissant entre le bas et le milieu de la hiérarchie des revenus, c’est une sorte d’indicateur des inégalités de revenu “par en bas”… Ce qui se passe aujourd’hui dans les sociétés occidentales n’est pas un appauvrissement massif des plus pauvres, mais une augmentation du nombre de personnes qui décrochent du niveau de vie des classes moyennes.
Ces milieux les plus modestes accèdent de moins en moins aux standards de vie, et en particulier de consommation, qui sont les plus courants… Cet écart est d’autant plus pesant que la valeur d’égalité constitue l’un des piliers de notre République d’un côté, et que la pression à consommer est énorme, de l’autre ».
Le rapport poursuit : « Entre 2013 et 2016, le taux de pauvreté s’est stabilisé… Allons-nous vers une stabilisation de la pauvreté ? Cet optimisme doit être mesuré : ainsi, en 2017, la diminution du nombre d’allocataires du revenu de solidarité active (RSA), que nous avions constatée depuis fin 2015, s’est arrêtée. Un mauvais signe… Si la pauvreté se stabilise, c’est en partie lié au fait que les revenus des classes moyennes stagnent… Nous entrons dans une phase d’incertitude dont on peut sortir par le haut à deux conditions : que l’activité et l’emploi redémarrent mais surtout que cette croissance soit mieux partagée, qu’il s’agisse des salaires comme des normes d’emploi. Pour éviter que les tensions s’accroissent encore plus entre les milieux sociaux, les politiques publiques doivent être garantes de ce partage… La France compte 7% d’illettrés parmi les 18-65 ans : ils ne maitrisent pas suffisamment l’écriture, la lecture ou le calcul pour être autonomes dans la vie courante. Près d’une personne sur quatre subit le mal-emploi. »
Le sens des devoirs
Le texte suivant : « Les progressistes n’abordent, le plus souvent, qu’un seul versant du contrat social : celui des droits. Ils glissent sur la question des devoirs correspondants à ces droits. La cité idéale, à leurs yeux, permet d’être ce que l’on est, de faire ce qu’on souhaite, de vivre comme on l’entend. C’est joli, mais il manque un horizon de sens commun à ces droits et ces libertés. Sans cet horizon, le revenu universel n’est qu’une version socialement acceptable de la logique individualiste. Je le conçois, a contrario, comme le prélude au retour de la politique dans nos vies. Il n’est pas une fin en soi, mais un point de départ… Voila pourquoi le revenu universel sera couplé avec un service civique universel. Universel ce qui signifie obligatoire. Pour que chaque individu réapprenne qu’il appartient à une cité qui n’est pas un distributeur de cash ou une entreprise de maintien de l’ordre, ladite cité doit le contraindre à consacrer du temps et de l’énergie au bien commun. À un moment donné de notre existence, nous devons être appelés à nous effacer en tant que personnes privées, à faire non plus ce que nous souhaitons, mais ce que la république souhaite ce que nous fassions. » pourrait être extrait d’une Grande Relève ou d’un livre de Duboin !
Et non, il est plus récent, il est de Raphael Glucksman, dans Enfants du vide, aux éditions Allary !
Serait-ce que nos idées progressent ?