Des faux problèmes et leur origine
par
Publication : novembre 1976
Mise en ligne : 12 mars 2008
« Faux problèmes » est une expression
qu’il faut éclairer d’une définition précise.
En matière économique et sociale, j’appelle « faux
problème » tous ceux dont les impératifs n’ont pour
justification que de se conformer aux structures en vigueur, alors que
le « vrai problème » consisterait à adapter
les structures aux besoins réels des hommes.
UN EXEMPLE : L’EMPLOI
Un cas de ce genre défraye actuellement la
chronique : celui de l’emploi.
L’emploi est une contrainte et celle-ci n’existe que par référence
aux mécanismes suscités par les structures du régime
actuel. On ne réclame pas l’emploi pour l’emploi, on ne le recherche
pas en fonction de son utilité ou pour le bien-être de
la communauté, on ne le demande même pas en fonction du
« sel » qu’il peut mettre dans l’existence (ce qui n’est
généralement pas le cas), on ne l’exige qu’à cause
de son pouvoir exclusif de distribuer des revenus.
On ne réclame pas un emploi mais un salaire, même s’il
s’agit du cas extrême d’un salaire pour ne rien faire (ce qui
arrive) ou pour effectuer des travaux indéniablement inutiles,
voire nuisibles aux besoins essentiels des hommes, y compris leur besoin
primordial de sécurité (et malheureusement de tels emplois
sont légion).
LA POMME ET LE POMMIER
Nous sommes assaillis de problèmes de ce genre,
de faux problèmes. La société dans laquelle nous
nous trouvons les fait pousser et murir comme le fait un pommier des
pommes. Il ne faut pas en accuser les pommes, mais le pommier.
Ils nous donnent une fausse idée des valeurs fondamentales comme
celle du travail, qui devrait être l’élément libérateur
de notre activité, mais qui est devenu l’expression du mépris
de l’homme, d’une fausse interprétation de son ouvrage, de ses
motivations, de sa nature et de son but.
Il faut désaliéner l’homme. On ne peut le faire qu’en
s’en prenant aux faux principes et à leur application aveugle.
Cela réhabiliterait le travail.
Ce n’est pas difficile à comprendre. Il suffit d’ouvrir les yeux,
de considérer les choses dans leur ensemble et de remonter aux
sources.
Aux sources d’une société qu’un long usage et un long
mépris de la dignité humaine ont pollué jusqu’à
n’en faire jaillir qu’un poison aux effets destructeurs. Aussi est-il
urgent d’en finir avec la société CONTRE l’homme et de
construire la société POUR l’homme.
Une société dans laquelle on ne « travaillera »
pas moins mais autrement.
Où l’on ne fera pas n’importe quoi, selon le bon plaisir de décideurs
irresponsables et incompétents.
Où la joie de la tâche accomplie sera l’un des composants
de la satisfaction de vivre au sein de la communauté.
Une communauté enfin avide de progrès réels ceux
qui ne se traduisent pas par l’aggravation des inégalités,
des injustices et des cruautés, mais par la conquête de
la sécurité, de la dignité et de la liberté.
Il ne s’agit plus là de vagues besoins mais des premiers de nos
droits.