I. La collectivisation de 1936 en Espagne

Réflexion
par  F. CHATEL
Publication : décembre 2018
Mise en ligne : 7 mars 2019

- Partie I. La collectivisation de 1936 en Espagne - GR 1203
- Partie II. La Makhnovtchina - GR 1204
- Partie III. L’expérience zapatiste - 1ère partie - GR 1206
- Partie IV. L’expérience zapatiste - 2e partie - GR 1207
- Conclusion. Les communs - GR 1209

Le projet de changement de système économique amène à réfléchir notamment sur la question de la propriété des moyens de production. Si nous connaissons la position de K. Marx sur la question (favorable à l’acquisition collective de ces moyens sous le chapeautage de l’État, au moins dans un premier temps, transition qui peut durer très longtemps lorsque le pouvoir étatique est en place), si nous connaissons celle des libéraux (prônant la propriété privée pour soi-disant des considérations de rentabilité et d’efficacité non prouvées), nous n’avons qu’une idée incertaine des réalisations de collectivisation tentées ici et là dans un passé relativement proche. Collectivisation qui a pourtant été l’organisation générale adoptée pendant des milliers d’années par nos ancêtres.

Cette solution est-elle possible encore aujourd’hui et est-elle réaliste, compte tenu des changements qui affectent l’humanité  ?

Un seul article consacré à ce sujet ne pourrait suffire. Alors, après avoir passé en revue les différentes expériences connues, leurs réussites et leurs échecs, François Chatel se propose d’en faire un bilan et d’en déduire la possibilité et l’intérêt d’une réalisation actuelle.

 La situation

Dans ce pays, comme dans bien d’autres, existait à cette époque un clivage social marqué par des inégalités flagrantes. Ainsi, l’Eglise, l’armée et la police contrôlaient la situation, l’enseignement et la vie économique, l’entretien des aristocrates avec le budget de l’État, et l’ordre social. Le domaine agricole était aux mains des gros propriétaires et le secteur industriel naissant était sous la coupe de capitaux étrangers.

Dès la fin du 19ème siècle, la lutte contre cette oppression s’est organisée, d’une part, à l’aide de partis politiques comme le parti socialiste (PSOE), le parti communiste (PC) à tendance staliniste, le parti ouvrier marxiste (POUM), la Fédération anarchiste ibérique (FAI)  ; et d’autre part, par les mouvements ouvriers comme l’Union générale des travailleurs (UGT) de tendance socialiste, et la Confédération nationale du travail (CNT) adepte des thèses anarcho-syndicalistes.

C’est cette dernière qui proposa de réorganiser la société sur les bases du communisme libertaire, c’est-à-dire la mise en œuvre immédiate de la pratique de la solidarité et de l’émancipation définitive de l’exploitation capitaliste et de l’oppression étatique.

Les idées reposaient en grande partie sur  :

• une très forte décentralisation du domaine administratif,

• la collectivisation et l’autogestion dans le domaine économique,

• le libéralisme dans les domaines moraux et sociaux,

• un anticléricalisme virulent dans le domaine religieux,

• le rationalisme dans le domaine éducatif.

Jusqu’en 1936, la CNT était la cible d’une répression sanglante autant par la dictature monarchique (1923 à 1931) que par le gouvernement républicain qui suivit.

 ·*·

La victoire de la gauche aux élections du 16 février 1936 marque un tournant favorable à une révolution sociale, le gouvernement républicain alors formé est un front populaire qui regroupe les socialistes, les communistes, les groupes républicains de gauche (Gauche républicaine et Union républicaine), l’Esquerra catalane et l’ORGA (parti aoutonomiste galicien).

La droite répond par l’organisation d’un parti fasciste prônant le retour à l’ordre : la Phalange.

La confrontation était inévitable et s’est traduite par une guerre armée.

Le choix qui s’impose est : le fascisme ou la révolution.

Face à l’incapacité du gouvernement républicain de réagir au coup d’État fasciste, la CNT prend les choses en main et après sa victoire à Barcelone déclare l’avénement de la révolution.

C’est ainsi qu’un vent de collectivisations balaya l’Espagne dès le début de la guerre civile qui éclata en juillet 1936. En plus de la résistance contre l’armée fasciste, s’organisa partout où cela était possible la révolution sociale sous le mot d’ordre : « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ».

Après la fuite des patrons, des ingénieurs et des propriétaires terriens, la nécessité urgente de remettre en marche la production incitait à la collectivisation immédiate. En témoigne cet habitant de Calanda, en Catalogne : dès sa libération par les milices, le 26 juillet 1936, « le peuple s’est réuni sur la place et c’est là que le communisme libertaire a été proclamé. Comme ça, en un quart d’heure  ! Puis on a nommé un comité révolutionnaire composé de six membres de la CNT et de deux républicains, contre l’avis de leur organisation » [1]. Dans cette petite ville, comme partout dans le milieu rural espagnol, les riches possédaient les meilleures terres et louaient les moins productives. Ainsi 80% de la production profitait à 20% de la population, et pour la consommation, le rapport était équivalent. Calanda, comme les autres villages, était économiquement riche mais les gens y vivaient en grande majorité pauvrement. Ce qui explique que, dès le moment approprié, l’instauration de la révolution a été aussi spontanée.

 LA COLLECTIVISATION

Les usines réquisitionnées sont gérées par des comités de travailleurs ; les zones agricoles collectivisées fonctionnent comme des communes libertaires. Même les hôtels, les restaurants, les salons de coiffure, les transports sont gérés par leurs propres travailleurs. Dans certains endroits, l’utilisation de l’argent est totalement abolie, et remplacée par des systèmes de bons. Le nouveau prix des biens est ramené à 75% de sa valeur ancienne.

George Orwell en parle ainsi  : « J’étais en train de m’intégrer, plus ou moins par hasard, dans la première communauté d’Europe occidentale dont la conscience révolutionnaire et la haine du capitalisme étaient plus normales que le contraire. En Aragon, des dizaines de milliers de personnes, pour la plupart d’origine prolétaire, vivaient en termes d’égalité. En théorie, c’était une égalité parfaite, et en pratique, elle n’était pas loin de l’être. Par de nombreux aspects, on expérimentait là un avant-goût de socia­lisme » [2].

Les syndicats ou­vriers de la CNT sont très puissants. En quelques jours, ce sont 70% des entreprises et des commerces qui passent sous le contrôle des travailleurs.

 ·*·

Passons en revue ces transformations ainsi mises en place :

l’autogestion industrielle  : la fuite des patrons, des ingénieurs et même des techniciens amène la CNT, aidée par l’UGT, à s’emparer des entreprises, principalement en Catalogne et en Aragon. La vie collective est améliorée par la diminution des heures de travail, l’augmentation des salaires, la mise en place de l’assurance maladie, d’une retraite garantie, de conditions de travail améliorées. Les ouvriers parviennent à gérer des branches industrielles complètes et se montrent capables d’assumer la production sans chefs et sans discipline imposée. Prenant leur sort en main, ils votent les décisions importantes en assemblées générales.
Le fait de travailler pour le bien de tous et non pour un patron et ses actionnaires, change toute la donne. Le sentiment d’appartenance à un groupe [3] donne toute sa force à l’engagement individuel.

la collectivisation de la métallurgie  : les ouvriers vont là aussi faire la preuve de leur capacité créatrice, améliorant la technologie autant que l’organisation. Les collectivités démontrent alors leur faculté d’adaptation et leur efficacité, même sur le plan économique. à Barcelone, c’est le cas par exemples d’entreprises com­me Vulcano, Girona, Hispano Suiza, qui sont dirigées par des comités d’entreprise.

La socialisation de l’industrie du bois  : ce domaine occupe de 7 à 10.000 personnes. La socialisation se traduit par une réorganisation des ateliers, autant au niveau du matériel, et de la gestion que des méthodes de travail.
Les managers sont élus en raison de leurs capacités techniques et morales. Ainsi, Hernandez, menuisier de Séville, devient président de l’industrie du bois socialisée. L’ensemble de cette industrie s’appuie désormais sur les assemblées générales souveraines.
Il faut signaler partout la création d’écoles professionnelles, de piscines, de salles de sports, de bibliothèques, de bains publics, etc… portée par la volonté de changer le mode de vie. Les salaires sont unifiés et la journée de 8 heures est instaurée.
Dans ces conditions d’organisation rationnelle du travail, d’enthousiasme et de fraternité, il est rapporté que la production double et parfois même triple.

Les transports à Barcelone : là aussi, tramways, autobus, métro, taxis, chemins de fer de Catalogne se retrouvent aux mains des travailleurs et notamment entre celles des assemblées générales. Les mêmes réformes sociales que dans l’industrie sont appliquées et on y ajoute comme ailleurs la retraite à 60 ans avec un versement uniforme et le salaire intégral en cas de maladie, ainsi que bien d’autres aménagements sociaux.

L’alimentation  : la CNT prend la direction de 39 grandes entreprises alimentaires dont certaines sont transformées en restaurants, soit à prix modérés, soit en réfectoire populaire à prix fixe. Les travailleurs de ce secteur s’occupent de l’approvisionnement des grandes villes et notamment le marché central de Barcelone. On retrouve l’application des mêmes avantages sociaux que dans les autres domaines. Par exemple, à la brasserie “Damm”, la modernisation du matériel permet d’améliorer la production et pour se procurer l’orge, on fournit les semences aux collectivités paysannes. L’industrie du lait connait la même révolution.
Au contraire des propriétaires et des grandes entreprises comme Nestlé ne se souciant que de profit, les travailleurs qui les remplacent se préoccupent avant tout de fournir au peuple un produit de qualité et d’une hygiène maximale. Pour y parvenir, 7 usines de réfrigération et de pasteurisation modernes équipées d’un système de mise en bouteilles sont créées dans les lieux de production. Des camions citernes isothermiques y sont affectés et les fermes de production modernisées. C’est lors d’une assemblée générale souveraine qu’est créé un salaire égal pour tous. Lors d’une autre assemblée, le contrôle et l’encadrement de ces activités industrielles par le gouvernement de Catalogne sont refusés, toute mise sous tutelle par un État quelconque étant bannie.

L’école et la santé  : Le conseil de l’école nouvelle unifiée (CENU) est créé et sa première mission consiste à scolariser tous les enfants gratuitement, alors que 47% de la population est analphabète. Les couvents et les villas bourgeoises sont réquisitionnés et, à l’aide du syndicat du bâtiment, de nouvelles écoles sont construites où sont appliquées les méthodes Ferrer ou Montessori. Tout dogmatisme ou tout endoctrinement y est exclu, qu’il soit religieux ou révolutionnaire. L’objectif poursuivi est de créer des moyens pour développer et former des personnes libres dans la nouvelle société. On y adjoint des bibliothèques et des centres culturels.
Le syndicat de la santé est créé dès juillet 1936 alors que ce domaine connaît une situation déplorable en Espagne. En un an, six nouveaux hôpitaux ultramodernes, regroupant toutes les spécialités médicales, sont construits et organisés. Les tarifs des consultations et des opérations sont fixés et contrôlés par le syndicat. Dans les collectivités rurales, elles sont gratuites, ainsi que les produits pharmaceutiques.

Les collectivités agraires  : dans les villages, la population entreprend de développer le communisme libertaire. On s’empare des terres délaissées par les grands propriétaires et on organise le travail collectivement. Les con­ditions de vie s’en trouvent améliorées. La production augmente grâce à une exploitation plus rationnelle, à l’irrigation et au défrichement de terres nouvelles.
On compte 350 collectivités en Catalogne, 500 au Levant, 450 en Aragon, qui occupent 75% des terres. Chacune possède ses propres caractéristiques selon les décisions prises par les assemblées générales formées des collectivistes eux-mêmes.
Si la monnaie est utilisée dans les échanges réalisés en collectivités urbaines, à la campagne, les solutions vont de la suppression totale de l’argent et la prise au tas suivant ses besoins, aux systèmes de bons. Mais souvent va s’imposer la création d’une monnaie locale, non capitalisable parce que volontairement rendue éphémère (semblable en celà à la monnaie distributive). Parfois même, on a recours au salaire familial, non dépendant du travail mais proportionnel aux besoins familiaux (un revenu universel en quelque sorte).
Pour les échanges avec les autres collectivités, les fédérations régionales assurent l’équilibre entre les collectivités riches et les collectivités en difficulté. La plupart des échanges reste réglée par le troc selon la volonté générale de n’utiliser l’argent que le moins possible.

L’exemple de Calanda, cette petite ville rurale de Catalogne déjà citée plus haut, va permettre de se faire une idée des réformes, des stratégies économiques et sociales adoptées par l’ensemble des collectivités rurales en Espagne.

La police y est dissoute et remplacée par des gardes de surveillance contre une menace extérieure. « Pourquoi une police, il n’y avait pas de vol ! Chacun avait tout  ! » [1]. Le tribunal a disparu et la prison avec. Plus de notaire, plus d’héritage, puisqu’il n’y a plus de propriété privée. Les bornes et les clôtures ont été supprimées. Les terres des grands propriétaires sont récupérées et les petits paysans apportent les leurs pour les mettre en commun. De même pour le bétail, l’outillage, les volailles, les semences et l’ensemble des réserves alimentaires. Ces dernières sont redistribuées équitablement suivant les besoins de chacun. Tous les produits sont gratuits, comme certains services tels que le coiffeur, le cinéma, l’école, et aucun argent ne circule en interne. Parfois, on met même l’argent personnel en commun comme à Pobla de la Gradanella (Catalogne), Lagunarrota (Aragon) et Cervera del Maestre (province de Valence). Les meubles et surtout ceux amassés par les riches en fuite sont réquisitionnés et connaissent la même redistribution. Les habitations bourgeoises désertées sont utilisées et occupées suivant les nécessités. Par contre, les biens personnels restent acquis. Certains ont choisi de continuer à travailler seuls leur terre (quinze sur cinq mille habitants) mais ils ne peuvent exploiter quiconque et leur production doit correspondre à leurs besoins. Les collectivistes leur prêtent leurs machines et leur fournissent des produits nécessaires, si bien que nombreux sont ceux qui finissent par rallier la collectivité.

Le bourg est administré par un comité révolutionnaire de huit membres qui organise le travail, le ravitaillement et l’ensemble de la vie collective. Chaque soir, les délégués des groupes de travail viennent faire le compte rendu des éventuelles difficultés rencontrées ou des besoins à satisfaire. Ce comité prépare les cas à traiter et les décisions sont prises lors des assemblées générales suivant le principe de la démocratie directe. Les mariages ne sont pas enregistrés, seul l’engagement est pris en compte. Les divorces peuvent être proclamés en un quart d’heure mais, curieusement, ils sont très rares. Une habitation est donnée à chaque nouveau couple. Chaque naissance est par contre enregistrée afin d’ajuster la distribution. Plusieurs mesures sont également prises dans le domaine social  : autorisation de l’avortement, libération de la femme.

La mise en collectivité de la production permet l’acquisition de matériels comme des tracteurs et des moissonneuses-batteuses et des fermes collectives modernes, plus grandes, sont construites. De nouvelles techniques agricoles sont adoptées. De même les boulangers, les coiffeurs, les forgerons, les charpentiers, etc… bénéficient d’un matériel plus moderne, d’où une nette amélioration des conditions de travail et de la production.

En ce qui concerne la quantité et la qualité du travail dû, ces notions sont laissées à l’appréciation de la conscience de l’individu. Il y a toujours des volontaires pour les travaux pénibles ou nocturnes. Les “paresseux” en nombre infime (2 à Calanda par exemple) sont considérés comme des “malades” et ne sont pas sanctionnés dans l’espoir qu’un jour ils changent de comportement.

La notion de rentabilité est bannie et même inimaginable. Tous la refusent absolument comme tout contrôle du travail par une instance extérieure. Seul le résultat compte et chacun est conscient de ce qu’il faut faire sans avoir besoin de recevoir d’ordre.

À partir de 60 ans, les anciens peuvent ne rien faire mais en général ils désirent participer et s’occupent des jardins familiaux.

Les jours perdus pour cause de maladie sont considérés comme travaillés.

En ce qui concerne la distribution, l’église est généralement transformée en magasin, tel un marché couvert. Pour les produits abondants, comme les fruits, chacun se sert suivant ses besoins. Pour les produits plus rares, comme la viande, le lait, les chaussures, les draps, on utilise des bons ou des cartes où sont inscrits ces articles. L’huile d’olive abondante est distribuée pour l’année.

Pour les échanges avec l’extérieur, la pratique du troc l’emporte largement. Par exemple, des pommes de terre ou du blé contre des souliers, des olives pour des draps, des légumes contre de l’engrais, ce qui permettait d’utiliser la surabondance. Les disponibilités de chaque collectivité sont ainsi enregistrées par les Fédérations cantonales et régionales, ce qui permet de pallier aux éventuelles pénuries exceptionnelles de certaines collectivités et d’écouler la production manufacturée des villes proches.

Pour l’école, le couvent représente un bâtiment idéal et les instituteurs sont recrutés parmi les personnes ayant de l’instruction et parmi les sœurs encore présentes. Ils sont tous nourris par la collectivité. La mixité , interdite sous la République, est instaurée. L’analphabétisme a ainsi disparu pour la nouvelle génération qui manifeste une forte volonté de poursuivre des études. Des cours du soir sont même prodigués pour les volontaires.

Toute relation avec l’État est coupée, ainsi plus aucune fiscalité. Le gouvernement est devenu inutile pour ces collectivités. Elles attendent beaucoup de la fin de la guerre afin de pouvoir réaliser de grands projets grâce au retour des jeunes combattants.

L’avenir en décidera autrement…

 L’anéantissement 

Après le coup de force fasciste de juillet 1936 et le mouvement révolutionnaire lancé par les syndicats ouvriers, le gouvernement affaibli s’efforce de réagir par une série de mesures afin de reprendre le contrôle des zones où se réalise la révolution. L’objectif reste la constitution rapide d’une armée efficace, ce qui passe d’abord à ses yeux par la dissolution, plusieurs fois tentée, des différents comités de défense. Grâce à l’aide fournie par l’URSS à la République, le parti communiste, qui détourne cette aide à son profit, jouit d’une autorité de plus en plus prépondérante.

Or, le PCE soutient que la guerre civile n’est pas le moment choisi pour mener une révolution  : pour lui, l’objectif principal reste la défaite des forces de Franco, tandis que l’abolition du capitalisme est reportée à la fin de la guerre. Car la révolution pourrait effrayer les classes moyennes (fonctionnaires, petits commerçants, petits agriculteurs propriétaires ou même les ouvriers spécialisés), qui forment une partie importante du parti lui-même et Staline veut rassurer les pays occidentaux.

Alors la chasse aux collectivistes et leurs meneurs est désormais ouverte.

Le 16 décembre 1936, le journal soviétique Pravda publie un éditorial qui déclare : « L’élimination des trotskystes et des anarcho-syndicalistes a déjà commencé en Catalogne et elle est réalisée avec la même énergie qu’en Union soviétique » [4].

À la fin du mois de février 1937, le gouvernement républicain sous la pression communiste stalinienne prend un certain nombre de mesures répressives à l’égard des « contestataires de l’intérieur. »

Les moyens anti-révolutionnaires mis en œuvre sont sans limites et se traduisent par des actes d’une extrême violence à l’encontre des collectivistes. Les affrontements se font de plus en plus nombreux et violents entre partisans et adversaires de la révolution.

Ils débouchent de façon dramatique  :

Le 13 mai 1937, les deux ministres communistes, Jesús Hernández et Vicente Uribe, proposent au gouvernement de punir la CNT et le POUM, accusés d’être responsables des difficultés que connait le camp républicain dans la guerre menée contre le fascisme.

Le 6 juin, un décret gouvernemental rend illégales toutes les collectivités rurales qui n’ont pas encore été dissoutes.

En août, la 11ème division commandée par le communiste Lister est chargée de la destruction des collectivités en Catalogne et Aragon. Le commerce y est rétabli, ainsi que l’administration d’État et la propriété privée. Les grands propriétaires dont les terres avaient été collectivisées sont réintégrés dans leurs anciens droits. Les fermes et les entreprises collectivisées sont peu à peu reprises par les propriétaires individuels d’avant.

Les restes de la collectivisation sont progressivement détruits au cours de l’année 1938 par l’avancée des forces fascistes qui appliquèrent une terrible répression.

« La révolution espagnole fut la plus singulière des révolutions collectivistes du XXème siècle. L’impuissance manifeste des partis bourgeois incita très vite les libéraux et les conservateurs à rechercher une organisation capable d’arrêter le courant révolutionnaire lancé par les syndicats anarchistes et socialistes. Quelques semaines seulement après le début de la révolution, une organisation incarnait à elle seule tous les espoirs immédiats de la petite et moyenne bourgeoisie : le parti communiste. » [5]

Les paroles finales du dernier congrès de Saragosse furent les suivantes  : « La prétention de cette commission… se contenterait de [ce que son travail soit] l’esquisse de ce que le prolétariat devra mener à bien, un point de départ de l’humanité jusqu’à sa pleine libération. Que tous ceux qui se sentent l’intelligence, l’audace et la capacité suffisantes améliorent notre œuvre. » [1]


[1Le collectif Redhic, La collectivisation en Espagne, éd. CNT-RP.

[2George Orwell, Hommage à la Catalogne, éd. 10-18.

[3en collectivisation, l’ouvrier sait qu’il détient une part qui vaut 1/n employés dans les décisions prises pour l’entreprise.

[4José Peirats, Une révolution pour horizon, éd. CNT-RP.

[5Burnett Bolloten, La Guerre d’Espagne. Révolution et contre-révolution (1934-1939), éd. Agone, collection Mémoires sociales.


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