LE « Financial Times » du 2 avril 1977
a consacré un long article aux effets du chômage sur la
jeunesse européenne. En voici la substance. L’Organisation Internationale
du Travail estime à 7 millions le nombre de chômeurs de
moins de 25 ans habitant les pays de l’OCDE. Bien que ne représentant
que 22 % de la population active, ils entrent pour 40 % dans le nombre
total des chômeurs de l’OCDE. Chez les Neuf, ils représentent
un tiers du total des chômeurs et la moitié chez les Britanniques.
Ces chiffres sont tristement éloquents et révèlent
un mal profond, qu’on ne peut même pas espérer guérir
rapidement. En effet, les experts nous annoncent encore au moins dix
ans de chômage massif chez les jeunes. Ils s’attendent même
à ce que certains de ces jeunes ne trouvent jamais d’emploi de
toute leur vie.
Pourcentage des moins de 25 ans parmi les chômeurs :
On pourrait être tenté de faire retomber
la responsabilité de cette situation sur les émirats et
la hausse du prix du pétrole. Eh bien, non ! Ces mêmes
experts s’accordent à dire que le phénomène est
apparu avant la crise de l’énergie. Les statistiques britanniques
sont là pour le montrer. En 1968, au Royaume Uni, il y avait
26 000 jeunes chômeurs de moins de 19 ans ; en 1971, 58 000 ;
en 1975, 175 000 et en 1976, 200 000.
Le fort excédent des naissances observé en 1960 et les
années suivantes, fait actuellement sentir ses effets sur le
marché du travail. Le nombre des jeunes en âge de travailler
va donc croître jusqu’en 1980 beaucoup plus vite que le nombre
des travailleurs en âge de prendre leur retraite, et la baisse
du taux de natalité n’aura pas de répercussion avant 1985.
L’importance du chômage des jeunes est souvent expliquée
par l’absence de formation professionnelle. C’est ainsi qu’on estime
à 1 /3 la proportion des jeunes chômeurs qui ont achevé
leur scolarité obligatoire sans apprendre un métier. Ceux
qui en ont appris un ne sont pas forcément mieux lotis puisque,
dans la proportion de un sur cinq, ils n’ont trouvé que des emplois
de manoeuvres.
QUELS remèdes peut-on essayer d’apporter à
cette situation ? On peut, par exemple, accorder des avantages aux employeurs
qui embauchent des jeunes. D’abord, les effets de ces mesures seront
forcément limités, car il n’y a pas beaucoup d’emplois
à offrir et puis on donnera satisfaction à quelques jeunes
aux dépens d’un nombre équivalent de leurs aînés.
De plus, un jeune travailleur produit moins qu’un travailleur expérimenté
et doit souvent recevoir une formation complémentaire qui coûte
cher au patron. Egalement, les règlements qui protègent
les jeunes travailleurs découragent les employeurs.
Pour lutter contre le chômage des jeunes on peut mettre d’autres
travailleurs à la retraite anticipée. Dans ce cas, l’économie
risque de se priver d’une main-d’oeuvre expérimentée et
rentable. On peut encore prolonger la scolarité obligatoire,
mais pour recevoir quelle formation ? Et aux frais de qui ? Des familles
sans doute.
VOILA ce que dit le « Financial Times ». Le mal vient de très loin. Depuis longtemps déjà le nombre d’emplois que peut offrir l’agriculture, le secteur primaire, ne cesse de décroître. Pendant un temps, la relève est venue de l’industrie, touchée à son tour par le même phénomène. Elle ne peut rester rentable qu’en accroissant sa productivité, donc en réduisant sa main-d’oeuvre. Reste le secteur tertiaire. Les emplois continuent à y croître en nombre, mais leur augmentation n’entraîne pas une augmentation semblable du produit national brut. Pourquoi donc y investir ? D’autant que l’informatique le menace.
Il semble bien qu’il n’y ait pas de solution dans l’économie actuelle. Il va bien falloir que, sous la poussée des faits économiques, on repense toute la question. On ne tardera pas à conclure que seule l’Economie Distributive peut apporter la solution indispensable.